Production de déchets en Ontario : la sonnette d’alarme tirée
TORONTO – L’Ontario produit une quantité « renversante » de déchets, selon la commissaire à l’environnement de l’Ontario, Dianne Saxe. Dans un nouveau rapport publié mercredi 4 octobre, elle décortique la Loi favorisant un Ontario sans déchets, mais se questionne sur les stratégies adoptées et critique l’absence d’échéancier.
ÉTIENNE FORTIN-GAUTHIER
efgauthier@tfo.org | @etiennefg
La commissaire peine à comprendre comment le gouvernement peut vouloir réduire les déchets, sans se donner une cible datée. Elle recommande que des dates butoirs soient déterminées.
Selon elle, la province devrait aussi interdire aux citoyens de jeter les déchets alimentaires, rédiger des normes sur le recyclage qui soient claires et applicables et créer un marché profitable pour que toutes les matières puissent avoir une seconde vie dans le processus de recyclage.
Les citoyens doivent réduire leurs déchets
Il faut réduire les déchets à la source. La commissaire à l’environnement ne peut pas être plus claire : les citoyens doivent moins consommer et envoyer moins d’ordures dans les bacs à déchets. Lors de sa conférence de presse, elle a urgé les Ontariens à changer leurs habitudes.
« Le programmes des bacs bleus permet de recycler seulement 8% de l’ensemble des déchets de l’Ontario. ».
« Il faut acheter des objets qui durent plus longtemps, plutôt que d’acheter des objets qui brisent et qu’on jette à la poubelle », a lancé la commissaire. « Je fais mon compost à la maison », ajoute-t-elle.
Mais ils ne sont pas les seuls à devoir réduire leur empreinte sur la planète. « La province ne devrait pas laisser les institutions et les entreprises produire autant de déchets », insiste la commissaire, qui rappelle que ces deux groupes envoient 2,2 millions de tonnes de déchets de plus que les citoyens dans les sites d’enfouissement.
En 2004, la province s’était donnée l’objectif d’envoyer 60 % de ses déchets au recyclage. La cible n’a pas été atteinte, alors que seulement 20 % le sont.
La réalité du terrain est différente, disent des maires
La nouvelle loi ontarienne adoptée en juin 2016 ne « définit pas de manière explicite le rôle des municipalités dans le réacheminement des déchets », constate la commissaire à l’environnement. Pourtant, les Villes sont en première ligne de la gestion des déchets. Et c’est souvent très complexe, disent des maires interpellés par #ONfr.
La Ville de Hearst revient de loin, affirme son maire. « Il y a six ans, on était vu comme les pires en matière de gestion des déchets et du recyclage. Là, on fait mieux. Le gouvernement nous a forcé à faire la collecte aux maisons et on prend nos responsabilités », a indiqué le maire Roger Sigouin.
Tous les citoyens ne sont pas contents des changements. Mais le maire leur donne un argument économique. « À ce rythme-là, notre dépotoir allait être plein dans une quinzaine d’années. Pour en créer un deuxième, ça coûterait 5 millions de dollars. Avec le recyclage, on gagne du temps », lance-t-il.
Mais le recyclage a forcé la Ville à transformer ses méthodes et à effectuer des investissements, car elle mène elle-même la collecte. « C’est beau changer des politiques, mais il y a un coût au niveau municipal. Et parfois, ça fait très mal. Ce sont les politiciens locaux qui vont payer le prix politique et économique », confie M. Sigouin.
Le président de l’Association française des municipalités de l’Ontario (AFMO), Claude Bouffard, abonde dans le même sens. « Il n’y a pas assez d’argent du gouvernement. Il faut des ressources pour former les citoyens sur le recyclage. Il y a encore des citoyens qui mettent tout aux poubelles », lance celui qui est aussi maire de Rivière des Français.
Pour l’instant, ses citoyens doivent venir apporter dans des conteneurs leur recyclage. « Mais les gens laissent des poubelles et la compagnie de recyclage renvoie le chargement. On est sur le point d’installer des caméras pour prendre les gens et les punir », dit-il, invitant le gouvernement à faire plus de sensibilisation auprès des citoyens pour que des changements en profondeur se produisent.
Le gouvernement dit être un « leader vert »
Le gouvernement ontarien dit accueillir positivement le rapport de la commissaire à l’environnement. Des changements pourraient être apportés à la suite du rapport, indique son ministre responsable du dossier.
« L’Ontario était en avance lorsqu’on a posé les premiers pas pour réduire, réutiliser et recycler les déchets (…) Malgré notre réputation de leader vert, nous sommes d’accord avec la commissaire que des changements doivent être apportés pour améliorer les programmes et réduire la quantité totale de déchets qui vont vers les sites d’enfouissement », a indiqué Chris Ballard, ministre de l’environnement et des changements climatiques.
Il affirme qu’il est vrai qu’il faut réduire la quantité de déchets alimentaires et organiques qui se retrouvent dans les poubelles. À ce sujet, il fait savoir que des consultations auront lieu cet automne pour élaborer un plan d’action en matière de déchets alimentaires et organiques, qui devrait être en vigueur dès le printemps.