Quand la reine Elizabeth II visitait le Nord

La venue de la princesse Elizabeth II en 1951 fut un événement marquant pour la communauté de Kapuskasing. Gracieuseté du Musée commémoratif Don Ravel de Kapuskasing.

SUDBURY – Il y a de ces passages qui marquent une existence, et dans le Nord le souvenir des visites de la reine Elizabeth II en fait partie. Alors que les hommages continuent d’affluer, pour les habitants de communes comme Kapuskasing ou Sudbury, l’annonce de son décès est loin d’enterrer le passé, mais plutôt d’en souligner l’impact. ONFR+ vous fait replonger dans l’histoire du passage remarqué de la royauté dans les communautés du Nord.

« C’est gravé dans notre cœur », nous confie Julie Latimer, ancienne conservatrice et actuelle directrice de la bibliothèque de Kapuskasing, au sujet du passage événement de la reine Elizabeth II dans la communauté du Nord.

Quelques milliers de personnes étaient sur place pour accueillir le couple, venues de tous les environs pour avoir la chance d’apercevoir la royauté britannique.

Celle qui n’était alors que princesse était de visite dans plusieurs villes du Nord telles que Sudbury et Kapuskasing en octobre 1951, seulement deux ans avant son couronnement. Et le choix de cet itinéraire était à l’époque le fruit d’une suggestion du gouverneur général de l’époque, Alexandre de Tunis.

La reine Elizabeth II, alors princesse, et le prince Philip visitent l’usine de pâte et papier Spruce Falls de Kapuskasing. Gracieuseté du Musée commémoratif Ron Morel de Kapuskasing.

Celui-ci venait de visiter, un an plus tôt, des moulins de Kapuskasing et en garda une telle impression qu’il l’avait proposé au Roi George VI qui devait faire la tournée pancanadienne, mais l’a délégué à sa fille Elizabeth en raison de graves problèmes de santé.

UN SOUVENIR ENCORE VIBRANT

Julie Latimer fut responsable de l’exposition célébrant les 60 ans de règne de la reine en 2012 au Musée commémoratif Ron Morel de Kapuskasing. Même si elle n’était pas née lors de la visite de trois jours à Kapuskasing de 1951, celle-ci n’en demeure pas moins touchée par le passage de la reine.

« Je regardais les photos puis je pouvais voir les expressions quand elle rencontrait les gens, quand on lui expliquait les procédés au Moulin, tu sentais sa sincérité et qu’elle était vraiment intéressée à nous rencontrer et nous entendre », raconte-t-elle avec émotion.

Elizabeth II arrive devant l’auberge Kap Inn. Gracieuseté du Musée commémoratif Ron Morel de Kapuskasing.

Selon Julie Latimer, la perception que les habitants ont de la reine n’a fait que s’améliorer et est toujours aussi positive aujourd’hui et son passage aura eu de belles répercussions sur la ville.

L’établissement hôtelier Kap Inn où le couple princier avait logé dans une suite rebaptisée, encore aujourd’hui, ‘princess suite’ et a conservé le nom de ‘Windsor dining room’ pour une de ses salles sans parler d’une grande photo et un livre signé par le couple lors de son passage.

À LA RENCONTRE DES FRANCO-ONTARIENS

Le couple royal sera de retour dans le Nord, à Sudbury à deux autres reprises pour visiter une mine en 1959 puis pour l’inauguration de Science Nord en 1984.

Bien que francophone et francophile, la reine Elizabeth n’est pas allée spécifiquement à la rencontre des Franco-ontariens lors de ses visites, selon l’historien Serge Dupuis. Une situation à laquelle elle remédia en 1984 alors qu’elle visite le musée provincial qui s’apprêtait à ouvrir.

« ON FAISAIT ENCORE UNE DIFFÉRENCE POUR LES ANGLOPHONES » – DENISE GUIDO

C’est d’ailleurs, cette même année que la province reconnaissait le français comme langue officielle de son système judiciaire explique le professeur d’histoire à l’Université Laval.

Celui qui vient de consacrer une conférence à ce sujet ajoute que le cortège royal traversera les secteurs francophones de la ville qui comptait 40 % de francophones. Le boulevard LaSalle et l’avenue Notre-Dame aux abords desquels se sont réunis les élèves de langue française.

Elizabeth II devant une escorte des cadets du secondaire de Kapuskasing. Gracieuseté du Musée commémoratif Don Ravel de Kapuskasing.

Denise Guido s’en rappelle. La Franco-ontarienne ne s’est pas rendue à Science Nord, mais le souvenir du passage de la reine devant sa maison de l’avenue Notre-Dame reste encore dans son esprit, le bruit des voitures et des cris enthousiastes dans les rues est difficile à oublier.

« On faisait encore une différence pour les anglophones, que la reine d’Angleterre se déplace dans le Nord chez nous c’était fort, elle était vraiment généreuse avec nous », confie-t-elle avant d’ajouter qu’elle se désole de son décès.

UNE INAUGURATION EN GRANDE POMPE

Près de 5 000 personnes étaient présentes pour l’inauguration du centre des sciences qui se fera dans les deux langues officielles en présence du premier ministre Bill Davis qui à l’inverse de la Reine ne peut s’adresser à la foule en français, conte Serge Dupuis.

« On confiait le God Save the Queen à une chorale d’un high school, tandis que les élèves du Collège Notre-Dame entonnent l’Ô Canada dans sa version originelle », poursuit-il.

« UN MOMENT TRÈS IMPORTANT DE L’HISTOIRE DE NOTRE VILLE » – RÉJEAN GRENIER

L’ex-journaliste Réjean Grenier était présent, il couvrait l’événement pour le compte de la Canadian Broadcasting center (CBC).

« L’idée qu’elle venait à Sudbury ça en faisait un événement majeur pour une petite ville comme Sudbury et que je sois le journaliste de la CBC qui couvre ça, c’était quelque chose! » se souvient celui qui est aujourd’hui éditorialiste pour le journal Le Voyageur de Sudbury.

Réjean Grenier se dit chanceux d’avoir pu être plus proche de la Reine que la foule lors de l’inauguration de Science Nord. Archives ONFR+

Il raconte aussi le double événement de l’ouverture de Science Nord qui était vu comme une grande nouvelle non seulement pour Sudbury, mais aussi pour tout le nord de l’Ontario.

« Avoir la reine pour ouvrir Science Nord c’était une grande fierté, un moment très important de l’histoire de notre ville », finit-il.