Quelle place pour le sport de haut niveau dans les collèges francophones ontariens?
[SPORT UNIVERSITAIRE]
Après s’être penché sur la ligue du Sport U sur les trois épisodes précédents, ce quatrième et dernier volet de notre série sur les sports universitaires met en lumière deux institutions qui proposent une éducation totalement en français et qui évoluent dans l’Association ontarienne de sport collégial (OCAA en anglais) : le Collège Boréal (Sudbury) et La Cité (Ottawa).
Les deux collèges sont historiquement bien implantés dans le sport intercollégial puisqu’ils en font partie depuis les années 90 pour La Cité – qui était à l’époque la partie français de Collège Algonquin – et depuis plus de 25 ans pour le Collège Boréal.
Depuis toujours, il a été nécessaire d’avoir deux ligues séparées entre l’universitaire et le collégial en raison des différences de durée dans les programmes scolaires, plus courts au collège.
« Cette différence a un gros impact, explique David Touchette, le directeur des sports à La Cité. Si nous avons des étudiants athlètes pour seulement un an ou deux, on a beaucoup moins de temps pour les entraîner et les former correctement à leurs sports. »
« L’université qui a des programmes pour développer les athlètes sur quatre à cinq ans aurait un trop gros avantage si on se mettait à concourir avec eux. C’est pour cela qu’on a divisé en deux divisions, universitaire d’un côté et collégial de l’autre. »
Une différence de moyens avec le sport U
Malgré ces différences de durée dans les programmes, tout est, comme souvent, une question de budget et d’effectifs. « Il y a des petites universités qui participent dans le collégial parce qu’elles n’ont pas le nombre d’étudiants nécessaire pour participer à la ligue universitaire. Elles ne gagneraient jamais », précise M. Touchette.
À l’inverse, le directeur des sports nous confie que certains collèges qui possèdent d’énormes moyens comme Humber College à Toronto, pourraient envisager à l’avenir d’intégrer le U Sports. « Mais ce n’est pas pour tout de suite,. On parle de cela dans le futur. »
Il est donc difficile de considérer les deux petits collèges – en termes de budget et d’effectifs – sur le même plan que la grande ligue de sport universitaire.
Les universités ont généralement plus d’étudiants, un budget plus vaste et donc de meilleures installations. « Elles peuvent payer des entraîneurs de meilleure qualité et, tout ça mis ensemble, fait que les universités ont des avantages que les collèges n’ont pas, compare David Touchette. Cela dit il y a des collèges qui ont une grande population, un budget conséquent, de bons équipements. La différence de niveau n’est donc pas énorme mais il y en a tout de même une. »
Peu de disciplines dans la ligue intercollégiale
D’un point de vue compétitif, le Collège Boréal n’est engagé que dans le badminton mixte et le volley-ball masculin et féminin.
Lucie Groulx, gestionnaire de la vie étudiante au sein de l’institution de Sudbury, confirme qu’il n’y a pas de concurrence avec les universités par rapport aux sports proposés au Collège Boréal.
Du côté d’Ottawa, La Cité possède des équipes de volley-ball masculines et féminines et une en basket-ball masculin. Dans les deux collèges, le reste des sports proposés demeure récréatif avec des tournois organisés tout au long de l’année mais pas au sein de l’Association ontarienne de sport collégial.
Ainsi, à l’instar des grands collèges comme Humber cité par David Touchette, les collèges francophones n’ont pas pour vocation à envoyer leur athlètes dans le monde professionnel. Rares sont les exemples de sportif passés par les deux institutions qui ont poursuivi une carrière professionnelle de très haut niveau. David Touchette se souvient d’Aymeric Ravier qui a poursuivi un bout de carrière dans le basket professionnel du côté de la France, en nationale 3 (5e division).
Les enjeux pour La Cité et le Collège Boréal sont avant tout de bien figurer dans leurs disciplines. Le fait de disposer de programmes totalement en français pourrait être vu comme un avantage pour attirer les meilleurs athlètes franco-ontariens mais, pour le directeur des sports de La Cité, ce n’est pas forcément une réalité qu’il retrouve sur le terrain.
« On attire des étudiants francophones, mais cela dit la majorité des Franco-Ontariens sont bilingues, reprend M. Touchette. Ils sont à l’aise pour étudier en anglais. Nous sommes 27 collèges dans la ligue ontarienne et en termes de population, La Cité est le sixième plus petit. Donc si on se compare à des collèges qui ont quatre à cinq fois plus d’étudiants que nous, cela veut dire qu’ils ont plus de ressources budgétaires. Les meilleurs joueurs francophones sont parfois attirés par ces collèges-là qui offrent des bourses ou d’autres avantages que nous ne pouvons pas offrir au même niveau. »
Par ailleurs, même si La Cité pouvait s’appuyer sur un nombre grandissant d’athlètes francophones internationaux qui rejoignent ses rangs, il existe des limitations au niveau du nombre de joueurs étrangers autorisés par équipe. Une règle qui vise à favoriser les étudiants-athlètes canadiens mais qui pénalise l’institution franco-ontarienne.
Du côté de Sudbury, il y a un duel local francophone contre anglophone avec le Collège Cambrian qui propose les mêmes sports. Dans cette optique, le fait de proposer des programmes en français est vu par Lucie Groulx comme un avantage.
« Je pense que ça reste un avantage. C’est une singularité que nous avons, de notre côté. La francophonie c’est notre raison d’être, les étudiants qui viennent au Collège Boréal font le choix de venir étudier en français et de devenir des travailleurs bilingues sur le marché du travail. »
« Avec l’avènement des baccalauréats au Collège Boréal, nous allons avoir l’occasion de retenir les étudiants pour plus de trois ans, se satisfait M. Groulx. C’est une chance pour nous d’apporter une stabilité et de pouvoir développer nos équipes suffisamment et de maximiser les années que les athlètes ont au sein du sport provincial et ainsi pouvoir atteindre de meilleurs résultats. »
Du point de vue des résultats, La Cité occupe actuellement la sixième place en basket masculin. C’est l’équipe qui performe le mieux parmi les sports proposés par les deux institutions. Les équipes de volley des deux collèges, quant à elles, connaissent des saisons difficiles.