Ramadan : les musulmans franco-ontariens renouent avec leurs traditions

Le ramadan a débuté le 2 avril dernier. Les musulmans franco-ontariens l'accueillent avec enthousiasme après deux ans de restrictions. Crédit image : John M Lund Photography Inc / DigitalVision via Getty Images

Attendu avec impatience cette année par les fidèles après la levée des mesures sanitaires et des restrictions concernant les rassemblements, le mois de ramadan a débuté le 2 avril dernier en Ontario dans une ambiance empreinte de festivités et de joie des retrouvailles.

Après deux ans de pandémie synonyme de confinement et de restrictions, les musulmans de l’Ontario accueillent ce ramadan 2022 avec beaucoup de soulagement. Et pour cause, pour les musulmans du monde entier, ce mois est considéré comme une période de festivités, de retrouvailles et de partage par excellence, notamment à l’heure de la coupure du jeûne appelée le iftar.  

« Cette année, nous nous sentons plus libres et plus soulagés du fait que nous pouvons partager certains repas avec nos amis. Hier, nous avons reçu le fils d’une amie et c’était déjà différent. Qu’on le veuille ou non, nous avons des coutumes ramadanesques bien ancrées et il est difficile de s’en séparer », estime Nabila Idm’Hammed.

Entre soulagement et prudence

Même ressenti du côté de Thierno Soumare : « Le ramadan cette année est un ouf de soulagement parce qu’on peut maintenant passer du temps avec les amis et la famille et quand on connaît la signification de ce mois, on sait que le partage et les rencontres sont des choses très importantes durant ce mois. Après la levée des restrictions, ramadan c’est vraiment que du bonheur. »

Quant à Walid Hachani, la prudence devrait tout de même rester de mise. « Maintenant que les restrictions ont été levées et que tous nos proches ont reçu leurs deux vaccins et rappels, nous nous sentons plus à l’aise avec les réunions de famille et les regroupements entre amis. Nous sommes impatients de rétablir les traditions qui nous ont tant manqué ces deux dernières années. On a le sentiment que les choses pourraient revenir à la normale, mais l’augmentation du nombre d’infections pourrait mettre en danger le reste du mois de ramadan », craint-il.

Nabila Idm’Hammed, Franco-Ontarienne de confession musulmane. Gracieuseté

Et d’ajouter : « Le ramadan a aussi changé pour notre famille après la perte de mon père suite à des complications dues à la COVID-19, et cela quelques jours seulement avant le début du ramadan 2021. Ce mois a toujours été sa période préférée de l’année. Comme de nombreuses familles qui ont subi une telle perte pendant la pandémie, nous rétablissons notre vie avec plus de prudence et un peu d’appréhension. Le ramadan est devenu pour nous un moyen de se souvenir et de commémorer la vie de mon père. »

Impact psychologique

Toutefois, si ramadan 2022 est reçu avec enthousiasme chez la plupart des musulmans franco-ontariens, il n’en était pas de même durant la pandémie. En effet, si on a beaucoup parlé des conséquences des confinements successifs sur la santé mentale des personnes qui ne pouvaient pas fêter noël ou pâques en famille à cause de la crise sanitaire, elles sont rarement évoquées pour la communauté musulmane, sachant que l’impact pourrait être plus profond au regard de la durée du ramadan.

Le constat est beaucoup plus perceptible chez les nouveaux arrivants, à l’instar de Mme Idm’Hammed : « Nous sommes arrivés en Ontario à l’été 2020, c’est-à-dire en pleine pandémie. Du coup, on a passé le ramadan confinés et seuls, un cocktail Molotov d’émotions, un mélange de tristesse, de mélancolie et de solitude dans une ambiance ramadanesque morose, loin de celle familiale et chaleureuse dont on avait l’habitude. » 

 Cela dit, certains pratiquants prennent la chose avec philosophie. « Personnellement, je pense que ces deux années de confinement nous ont quand même permis de nous retrouver avec nous-même, ce qui permet de rester concentrer sur son jeûne, de méditer et d’être en paix avec soi-même et son environnement. Après tout, c’est le but recherché pendant ce mois sacré. Je pense que le confinement nous a aidés dans ce sens », explique M. Soumare.

Ramadan pour les néophytes

Ramadan est le neuvième mois du calendrier lunaire musulman. Pour la communauté musulmane, c’est le mois où le Coran a été révélé au prophète Mahomet. Le jeûne est l’un des cinq piliers de l’islam. Il est obligatoire pour tous les fidèles dès leur puberté. Toutefois, des dérogations divines sont accordées. Ainsi, les femmes enceintes ou qui allaitent, les personnes malades, les personnes âgées, les voyageurs ou encore les femmes en période de menstrues y sont exemptés.

Walid Hachani, Franco-Ontarien d’origine tunisienne. Gracieuseté

La période quotidienne du jeûne dure de l’aube jusqu’au coucher du soleil, et ce pendant 29 à 30 jours. En journée, les pratiquants ne peuvent pas manger, boire, fumer ou avoir des relations sexuelles.

Ceci écrit, l’essence du ramadan réside dans son côté spirituel et humain. En effet, au-delà du fait que ce mois soit dédié à la méditation et la contemplation, il a pour but de mettre les fidèles à la place des pauvres qui, eux, ont faim durant toute l’année. Le but étant de ressentir ce qu’ils ressentent et, par conséquent, savoir pourquoi il faut venir en aide aux démunis de ce monde. 

L’Ontario est la province qui compte le plus de musulmans au Canada. De plus, elle enregistre le plus grand taux d’accroissement de cette communauté.