Refonte de la Loi sur les services en français : la communauté franco-ontarienne reste aux aguets
TORONTO — Présentée le jeudi 4 novembre, la refonte de la Loi sur les services en français fera partie d’un projet omnibus soumis par le gouvernement Ford. Même si l’heure est à la fête, plusieurs organismes communautaires restent vigilants quant à la réalisation des promesses évoquées.
« Cette étape historique que nous franchissons améliorerait considérablement l’accès aux services en français par les francophones », estime la ministre des Affaires francophones, Caroline Mulroney. « Le projet de loi déposé, combiné à notre stratégie globale sur les services en français, permettrait aux Ontariennes et aux Ontariens d’avoir un accès instantané à des services en français fournis par des travailleurs bilingues. »
Le nouveau projet de loi garantit le droit à « une offre active » des services en français au sein de la province. Cela implique qu’il serait de la responsabilité des organismes gouvernementaux, des ministères et de toutes autres institutions comprises dans la loi, d’offrir des services en français de qualité qui sont accessibles à l’ensemble de la communauté franco-ontarienne.
Le projet de loi exigerait la révision de la loi sur les services en français au minimum tous les 10 ans pour « répondre à l’évolution des besoins de la population francophone. »
Pour Johanne Lacombe, présidente de l’Association franco-ontarienne des conseils scolaires catholiques (AFOCSC), cette nouvelle représente une victoire pour la communauté franco-ontarienne.
« C’est quand même dommage de voir que la Loi fait partie de l’accord omnibus présenté par le gouvernement. Il faut que le tout soit présenté séparément pour qu’elles aient plus d’impact et plus de place », ajoute-t-elle.
De son côté, l’ACFO de Toronto présente quelques réserves quant au projet de loi qui a été émis. Pour l’organisme, il était nécessaire de réaliser une refonte de la loi après 35 ans, mais ils attendent de voir les actions sur le terrain pour juger des avancées sur la question linguistique.
« Les propositions sont intéressantes, cela peut répondre à un certain besoin. Maintenant, on attend de voir ce qui va se passer. On voit souvent qu’il y a de grandes différences entre ce qui est sur le papier et ce qui est sur le terrain. Nous ferrons notre propre jugement », déclare Serge Paul, président de l’ACFO de Toronto.
Un projet de loi qui porte encore des lacunes
Pour l’ACFO de Toronto, le projet de loi aurait dû prendre en considération les particularités de chaque région au sein de la province.
« Toronto a des besoins et des attentes différentes des autres régions désignées. C’est une bonne réforme et on aime se focaliser sur le positif. On trouve tout de même que certains points ne prennent pas en compte les besoins particuliers d’autres régions, autres qu’Ottawa », explique Alina Sklar, avocate et administratrice à l’ACFO de Toronto.
Selon elle, en plus du manque de prise en considération des régions, le projet de loi n’est pas clair quant à la définition de services de qualité. L’avocate estime que des services en français de qualité devraient être à la fois abordables pour l’ensemble de la population et rendus dans des délais raisonnables. Si cela n’est pas pris en considération, elle craint que la population ne fasse pas usage des services proposés.
L’ACFO de Toronto craint entre autres que le budget alloué à l’appui économique des francophones ne soit pas suffisant pour répondre aux défis économiques existants.
Dans sa mise à jour financière, le gouvernement s’engage à investir 1,5 million de dollars dans les entreprises francophones et à assurer une révision de la loi sur l’impôt foncier en vue d’exonérer l’UOF.
« Il faut comprendre qu’il y a des problèmes actuels quant à l’accès aux services en français qui ne sont pas réglés à date. Il est vrai que le budget couvre la main-d’œuvre, mais cela n’inclut pas d’autres services », déplore Alina Sklar. « Quand on parle des services en français, on parle aussi des services juridiques en français. Cette loi-là ne touche pas forcément des services dont les francophones ont grandement besoin, comme la loi sur les tribunaux judiciaires ou encore la loi sur le Code criminel. Elles devraient être aussi réformées. »
Le commissaire indépendant écarté de la liste des réformes
Trois ans après l’énoncé économique qui causa l’abolition du commissariat aux services en français, les Franco-ontariens et Franco-ontariennes n’auront pas réussi à obtenir le retour du commissaire indépendant.
Pour Johanne Lacombe, le commissaire s’assurait du respect de la langue au sein des institutions gouvernementales. Son absence pourrait porter préjudice quant aux initiatives proposées.
Selon elle, si le travail est bien fait et que tous les appareils gouvernementaux respectent les obligations prescrites par le projet de loi, il ne devrait pas y avoir de problème sur le long terme. Elle rajoute tout même que la communauté reste aux aguets pour surveiller tout déraillement.