Salon du livre du Grand Sudbury : 90 ateliers menacés par la grève
SUDBURY – Le Salon du livre du Grand Sudbury se prépare à lancer sa programmation. Toutefois, alors que la grève des enseignants bat son plein, près d’une centaine d’activités prévues risquent de ne pas voir le jour.
« À moins que la grève se termine très bientôt, la tournée scolaire des auteurs est annulée », affirme Geneviève Leblanc, directrice générale du Salon du livre. « Ça représente environ 90 ateliers en salle de classe. »
« Il est encore trop tôt pour se prononcer définitivement », nuance-t-elle. « Cependant, les contraintes de la grève du zèle empêchent les enseignants de l’Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO) d’accueillir des invités. Les auteurs jeunesse du Salon du livre ne font pas exception à cette règle. »
L’organisme littéraire sudburois commence déjà à chercher des solutions de rechange.
« Nous sommes en train de trouver des manières de pallier les pertes », explique Mme Leblanc. « Des garderies et des bibliothèques publiques sont prêtes à ouvrir leurs portes pour recevoir nos auteurs. Donc nous pourrons offrir des activités aux jeunes, mais ce sera après les heures de classe. »
« Si la grève n’est pas terminée d’ici le mois d’avril, il sera aussi très difficile pour les écoles de planifier leurs visites sur le site principal du Salon du livre, prévues pour le 7 et 8 mai », ajoute-t-elle.
Pour combler ce manque, la directrice dit vouloir miser sur le marketing pour inciter les francophones à participer à la journée familiale du samedi.
« Si les visites scolaires sur le site sont annulées, on offrira des forfaits spéciaux aux familles qui veulent se déplacer », affirme-t-elle.
Espanola : une petite communauté ressent le choc
Lors de la tournée scolaire, des auteurs jeunesse visitent une trentaine d’écoles des conseils scolaires de la région du Grand Sudbury.
« On couvre quand même un territoire assez large, qui s’étend jusqu’à Espanola », explique Mme Leblanc.
« Ce qui est le plus triste, c’est les élèves qui n’auront pas accès aux activités. Le Salon du Livre, c’est juste une fois aux deux ans. Quatre ans, c’est long sans recevoir des auteurs en salle de classe. »
Même son de cloche de la part des enseignantes francophones d’Espanola.
Annie Lapointe a participé à des activités du Salon du livre alors qu’elle enseignait à l’École Saint-Paul de Lively. Maintenant à l’École Saint-Joseph d’Espanola, elle espérait recevoir un atelier cette année.
« Les jeunes étaient tellement fiers. », raconte-t-elle avec enthousiasme. « Chaque fois qu’ils finissaient un livre, c’était la grosse parade le lendemain matin : « Madame, madame! J’ai lu un autre livre! » . »
« Non seulement ils aimaient ça, mais il y en a qui ont amélioré leur niveau de lecture en si peu de temps. Ça serait tellement dommage d’annuler les activités cette année. »
« C’est absolument une perte pour les élèves de la région », vient renchérir sa collègue, Jennifer Colard. « Le marathon de lecture l’an dernier a beaucoup encouragé mes élèves à lire en français. »
Mme Lapointe espère que les familles iront eux-mêmes chercher les services.
« S’il y a des ateliers offerts à la bibliothèque publique d’Espanola, j’encouragerai tous mes élèves d’y aller. »
Un accès un livre difficile
À la bibliothèque publique d’Espanola, les ressources en français se font rares. L’absence du salon littéraire se fait donc doublement sentir.
« Dans notre collection pour enfants, tous nos livres ont 30 à 40 ans », affirme la bibliothécaire en chef d’Espanola, Rosemary Rae. « C’est vrai pour notre collection en général, mais c’est particulièrement vrai pour notre collection francophone. »
Depuis qu’elle a accepté le poste il y a 4 ans, Mme Rae tente de rectifier ce problème, dit-elle.
« Nous n’avons pas de personnel bilingue depuis 2017 », explique-t-elle. « Lors du programme de lecture d’été, nous faisons de notre mieux pour engager un élève bilingue qui peut faire la lecture en français avec notre participant du primaire. Mais ce n’est pas toujours facile de trouver quelqu’un. »
Alors que le congé du mois de mars arrive à grands pas, la bibliothèque offrira une série d’activités jeunesse. Aucune de ces activités ne se déroulera en français.
Un salon en santé
Si le Salon du livre tire une partie importante de ses revenus des ateliers en salle de classe, Mme Leblanc tient à souligner que l’événement n’est aucunement menacé.
« C’est certain que la grève aura un impact financier sur le Salon du livre », note-t-elle. « Mais ce n’est pas assez pour nous fragiliser. »
Le Salon du livre avait aussi ressenti l’impact du couperet du gouvernement ontarien l’an dernier, lorsqu’il avait coupé les subventions de fonctionnement du Conseil des arts de l’Ontario.
Mme Leblanc maintient tout de même que la situation financière du Salon du livre n’a rien de précaire.
« Ça a affecté tout le monde », avoue-t-elle. « Mais on a bien absorbé le choc avec des augmentations de tous les autres bailleurs de fonds. Ils comprennent aussi que les difficultés actuelles sont hors de notre contrôle. »
L’organisme se prépare aussi à déposer une demande de subvention pluriannuelle.
« La réponse qu’on reçoit déterminera vraiment la santé financière du Salon pour les années à venir. Si elle est acceptée, ça stabiliserait notre financement de base pour les prochains quatre ans, ce qui nous permettrait enfin d’embaucher un second employé. »
« En somme, ça va très bien », conclut-elle.