« Sans économie forte, le budget n’est pas applicable », dit la SÉO
[ENTREVUE EXPRESS]
QUI :
Denis Laframboise est le président de la Société économique de l’Ontario (SÉO), organisme dont le but est de promouvoir les petites et moyennes entreprises francophones et francophiles en Ontario.
LE CONTEXTE :
Hier, le gouvernement ontarien a déposé son deuxième budget depuis son arrivée au pouvoir en juin 2018, le premier dans la période inédite de la pandémie. Le déficit budgétaire se chiffre maintenant à 38,5 milliards de dollars.
L’ENJEU :
La SÉO attendait ce budget avec appréhension, souhaitant un coup de pouce pour les entreprises, dont beaucoup affrontent les restrictions, voire les fermetures, imposées par la pandémie.
« Quelle est votre première réaction à la lecture du budget?
Le budget n’est pas vraiment une surprise. Il y a une aide au niveau du tourisme qui est intéressante, avec un crédit touristique de 20 % [Le gouvernement s’engage à une aide pouvant atteindre 20 % des dépenses admissibles pour le tourisme dans la province]. En revanche, il n’y a pas beaucoup de nouvel argent aux entreprises. On est conscient que le gouvernement ne peut pas se permettre d’aller plus loin. Avec tous les déficits accumulés, tôt ou tard, quelqu’un devra payer pour ça.
Cette somme que vous évoquez pour le tourisme, est-elle utile?
20 % de crédit, c’est intéressant, mais tant et aussi longtemps que les frontières vont demeurer fermées, les Américains et les Européens ne pourront plus venir au Canada. C’est bien de soutenir le tourisme, mais si les touristes ne viennent pas… On pourrait avoir le plus beau budget possible, mais sans une économie forte, il n’est pas applicable.
Quel est le meilleur point du budget, selon vous?
Ce qui est bon, ce sont les crédits au niveau des taxes foncières. Je connais beaucoup d’amis qui sont dans la restauration. Dans les trois prochains mois, beaucoup vont devoir malheureusement fermer leur porte. À Ottawa, on attend beaucoup de la baisse des restrictions.
Qu’est-ce que vous auriez aimé voir?
J’aurais voulu plus de crédits pour les entreprises pour les inciter à améliorer leur position de liquidité. Les entreprises arrivent à tenir, mais doivent regarder leurs liquidités. On parle beaucoup de santé dans le budget, mais les entreprises doivent aussi avoir leur part.
On parle d’un « Fonds de secours pour les organismes francophones sans but lucratif suite à la COVID-19 » d’un million de dollars. Comment voyez-vous cela?
C’est bien, cela va dans le sens de l’annonce de septembre dernier, pour nous, le milieu des entrepreneurs. Nous allons pouvoir en profiter en distribuant l’argent aux entrepreneurs. Le ministère des Affaires francophones nous a déjà fait des demandes pour distribuer ces fonds. Un 500 000 $ destiné aux entreprises franco-ontariennes nous a déjà été confié, avec 250 000 $ pour soutenir la création d’une nouvelle plateforme en ligne et les 250 000 autres pour la promotion.
Est-ce assez ces sommes d’argent? L’Assemblée de la francophonie de l’Ontario demandait, par exemple, plus de 12 millions de dollars pour les organismes à but non lucratif?
On est dans une situation anormale, où les déficits s’accumulent. On comprend le gouvernement. Je suis peut-être plus prudent au niveau des déficits, mais qui va rembourser?
Au-delà du budget, quel est le gros besoin en ce moment pour votre organisme?
Le besoin est de voir l’avenir et ce qu’il va nous apporter. Pour l’instant, tout le monde nage dans l’incertitude. On a reçu des fonds de réactivation du gouvernement fédéral, et là on travaille avec les entreprises. Est-ce que la COVID-19 va disparaître du jour au lendemain? On ne sait pas quand la situation va se régulariser, ni quand on aura un vaccin. Les fonctionnaires font du télétravail au centre-ville d’Ottawa, par exemple. Les commerces semblent vides.
Comment est le moral des entreprises avec lesquelles vous travaillez?
Bon, mais les fêtes approchent. D’habitude, le temps des fêtes est un bon temps pour les entreprises. Là, on ne sait pas comment elles vont supporter le choc. »