Uaque est une commande du CNA à la chorégraphe Andrea Peña, autour des photographies d’Edward Burtynsky. Photo: Rachel Crustin / ONFR

OTTAWA – Le Centre national des arts (CNA) a officiellement débuté sa saison 2024-2025 mardi, avec la deuxième édition de son festival Sphère. Le premier spectacle, Uaque, est également présenté ce mercredi. Il incarne l’âme du festival, en exploitant le rapport entre la nature et l’humain, tout en croisant les disciplines artistiques.

Sur une musique jouée en direct par l’Ochestre du CNA et le musicien Eƨƨe Ran, des danseurs en costume minimaliste se meuvent sur scène, dans une chorégraphie plutôt lente, qui évoque une symbiose presque méditative. Derrière eux, deux grands écrans projettent des images prises à travers les années par le photographe canadien Edward Burtynsky. Ces dernières évoquent l’impact de l’industrialisation et de l’activité humaine sur la Terre et l’environnement.

Uaque marie les disciplines de la danse, de la musique et de la photographie. Photo : Rachel Crustin / ONFR

Lorsqu’elle s’est plongée dans l’œuvre d’Edward Burtynsky, Andrea Peña a rapidement eu une vision de ce qu’elle voulait créer sur scène. Entre autres, elle avait déjà dans l’idée de représenter des corps presque nus.

Pour la chorégraphe canado-colombienne, il s’agisssait d’une opportunité unique de lier ses deux disciplines, elle qui est également designer industrielle. « Les images d’Edward Burtynsky parlent de l’anthropocène, de l’impact de l’être humain sur la Terre, au sens large, explique-t-elle à ONFR. Je trouvais que c’était une belle opportunité de parler de notre relation avec la Terre, de nos relations avec les systèmes, en tant qu’êtres humains. Ce sont des concepts vraiment difficiles à aborder avec la danse. C’est très abstrait. Donc, de pouvoir travailler avec ces images, c’était un cadeau. »

Le spectacle Uaque met en vedette une dizaine de danseurs anonymisés pour former un groupe humain en relation avec la nature. Photo : Rachel Crustin / ONFR

« Si on entrait dans des costumes, on situerait l’être humain dans une société, une classe sociale, une époque. Et je voulais aller chercher un type d’humanité qui allait plus dans quelque chose que la mode ne peut pas nous communiquer. »

Elle explique aussi que les images présentent la Terre nue et crue, et qu’elle voulait y ajouter des représentations humaines dans ce même état de vulnérabilité.

Un premier spectacle pour Caroline Ohrt

Uaque est une collaboration entre les volets Orchestre et Danse du CNA, en plus du photographe Edward Burtynsky et du musicien électronique Eƨƨe Ran. Il s’agit non seulement du premier spectacle de Sphère et du premier de la saison, mais aussi du premier spectacle programmé par Caroline Ohrt, nommée au poste de productrice générale de Danse CNA en 2023.

« Je suis extrêmement fière de travailler au CNA, raconte-t-elle en entrevue avec ONFR. Je n’aurais pas pu demander mieux pour ouvrir ma première saison. »

Après plus d’un an à y travailler, la première programmation de Caroline Ohrt à la barre de Danse CNA est fin prête à se déployer. Photo : Rémi Thériault

Dès son entrée en poste, le directeur musical de l’Orchestre du CNA, Alexander Shelley, l’a approchée pour collaborer autour de l’œuvre d’Edward Burtynsky. C’est elle qui a eu l’idée de recruter Andrea Peña. « Elle a une vision 360. Elle est capable de regarder un projet avec plusieurs éléments et de faire en sorte que la force de chacun ressorte. »

L’idée de créer un spectacle multidisciplinaire l’enchantait particulièrement. « Pour moi, la rencontre des disciplines est quelque chose qui est extrêmement riche. On peut en sortir des messages très puissants. »

La première partie du spectacle pose la question des connexions des humains entre eux et avec la Terre dans leur état le plus simple, alors que la seconde se demande comment accéder à la complexité. Uaque signifie « proche, voisin, ami » en muisca, une langue autochtone colombienne. Une autre représentation aura lieu ce soir.

La suite du festival

Le ton est donné pour cette deuxième édition de Sphère, un condensé d’œuvres explorant les liens entre l’art et la nature. L’événement orchestré par Alexander Shelley réunit les six volets du CNA (Orchestre, Danse, Théâtre français, Théâtre anglais, Théâtre autochtone, Musique populaire et variétés) et se déploie jusqu’au 20 septembre.

Le restaurant 1 Elgin et la lanterne Kipness ajouteront aussi leur grain de sel, respectivement avec un repas spécial, inspiré de la gastronomie autochtone, et l’affichage d’œuvres de l’artiste et microbiologiste Chloé Savard. Cette dernière, connue sur les réseaux sociaux sous le nom de Tardibabe, offrira également une présentation gratuite en français le 15 septembre.

Après avoir créé le spectacle aux Jardins de Métis, à Montjoli, au Québec, Christine Beaulieu a présenté Les sauments de la Mitis dans différents endroits, en plus d’en sortir l’adaptation littéraire. Photo : Marie-Andrée Lemire

D’autres artistes à voir pendant Sphère sont le ténor wolastoqiyik Jeremy Dutcher et la soprano Renée Flemming. Le volet francophone est représenté par Les saumons de la Mitis, une fable écologique de Christine Beaulieu. Cette dernière avait connu un franc succès avec la pièce documentaire J’aime Hydro, dans laquelle elle tentait de comprendre le fonctionnement de la société d’État québécoise. Si elle donne encore dans le théâtre documentaire avec Les saumons de la Mitis, c’est cette fois du point de vue du poisson que l’histoire est racontée.

Le festival Sphère comprend également certaines activités gratuites, dont des activités familiales et une exposition dans le foyer du CNA intitulée En profondeur : réflexions sur le chagrin et la crise climatique.