Une possible mais difficile relance pour Wynne en 2017
[ANALYSE]
TORONTO – L’année s’est bien mal terminée pour Kathleen Wynne. 2016 fut probablement l’année la plus difficile pour la première ministre de l’Ontario depuis son accession au pouvoir en 2013.
SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @sebpierroz
Entre les accusations portées avec le Sudburygate, la grogne contre les factures d’électricité, la popularité de la première ministre de l’Ontario a plongé dans les abysses. Annus horribilis.
A dix-huit mois des élections générales, peut-elle rebondir? Il sera en tout cas difficile pour la chef du Parti libéral de dégringoler encore plus en 2017.
Mme Wynne jouera une bonne partie de sa crédibilité au printemps lors de la présentation du budget. L’équipe libérale tentera à cette occasion de présenter un état des lieux financiers des plus équilibrés. Une façon de s’ériger en gouvernement responsable. Ce sera pourtant l’une des rares munitions de la première ministre en 2017.
En vérité, Mme Wynne devra attendre beaucoup des autres. À commencer par Justin Trudeau. La cote de popularité élevée dont jouit le gouvernement libéral du Canada ne devrait pas se tarir grandement. Souvent plus soucieux des enjeux à la Chambre des communes qu’à Queen’s Park, les résidents des comtés d’Ottawa pourraient donc rester assez fidèles à Mme Wynne. La preuve : la très large victoire de Nathalie Des Rosiers lors de l’élection partielle d’Ottawa-Vanier en novembre dernier.
Pour le reste, la cote de popularité de Mme Wynne dépendra beaucoup des deux autres leaders de l’opposition. Le progressiste-conservateur Patrick Brown, donné gagnant en 2018 selon les sondages, est loin d’avoir encore franchi la ligne d’arrivée. Le chef du Parti progressiste-conservateur (Parti PC) devra composer avec la frange des « conservateurs sociaux », très à droite, et de plus en plus volubiles ces dernières semaines sur leurs intentions.
Rien n’indique aussi que la néo-démocrate Andrea Horwath ne va pas augmenter sa cote de popularité. Jusqu’à maintenant discrète, elle bénéficie d’une image plus rassembleuse que les deux autres chefs de partis. Sans compter que le virage à droite de Mme Wynne sur les questions économiques (austérité budgétaire, abandon du projet du plan d’épargne-retraite) pourrait mettre du vent dans les voiles du Nouveau Parti démocratique (NPD).
C’est justement ce vent nouveau qui manque toujours à la première ministre de l’Ontario. Le remaniement ministériel en juin dernier, puis le discours du trône trois mois après, n’y ont rien fait. Un nouvel obstacle pourrait de plus s’ajouter pour l’équipe libérale en 2017 : l’adhésion de l’Ontario au marché du carbone en partenariat avec le Québec et la Californie. La province prévoit des revenus annuels de 1,9 milliard $ de ce système de plafonnement et d’échanges.
Si on ne peut pas être contre la vertu, cette nouvelle stratégie du clan Wynne ne sera pas sans conséquence pour le portefeuille des Ontariens. Elle coûterait environ 5 $ de plus par mois sur la facture de chauffage résidentiel et pourrait se traduire par une hausse de 4,3 cents du prix du litre d’essence.
Pour la première ministre qui vient de faire son mea culpa à la suite de l’augmentation des factures d’électricité ,après la vente partielle d’Hydro One, le moment est donc bien mal venu.
Le verdict arrivera probablement lors de la fin de session à Queen’s Park en juin. Si les bonzes du Parti libéral sont restés jusqu’à maintenant derrière leur chef malgré les tempêtes, la donne pourrait être alors différente.
Mme Wynne sera-t-elle tentée de démissionner? C’est ce qu’avait décidé son prédécesseur Dalton McGuinty empêtré dans les scandales, et déjà victime à son époque d’une certaine usure du pouvoir des libéraux.
Preuve aussi que les difficultés des libéraux ne peuvent s’expliquer uniquement par la personnalité de Kathleen Wynne.
Cette analyse est aussi publiée dans le quotidien Le Droit le 17 décembre