Société

Un syndicat étudiant veut bâtir des logements à l’Université d’Ottawa

Le campus de l'Université d'Ottawa. Photo : Archives ONFR

OTTAWA – Créer des logements abordables gérés par et pour les étudiants. C’est le projet sur lequel table le Syndicat des étudiants de l’Université d’Ottawa (SÉUO). L’initiative vise à contribuer à atténuer la crise du logement qui frappe durement la communauté étudiante.

« Nous espérons développer des logements qui pourraient se louer à 750 $ par mois », explique Jack Coen, président du syndicat, en entrevue avec ONFR.

Pour concrétiser cette idée, le syndicat collabore avec Housing Canada — un organisme à but non lucratif qui milite pour des logements étudiants coopératifs, non marchands et abordables — afin de lancer une campagne visant la création d’un fonds étudiant dédié au logement.

« Ce projet existe déjà dans plusieurs autres universités, et nous venons tout juste d’en amorcer la campagne », précise M. Coen.

Concrètement, le SÉUO souhaite soumettre une question référendaire lors des prochaines élections générales du syndicat, prévues en hiver. L’objectif : permettre à chaque étudiant de contribuer 8,75 $ par trimestre, montant prélevé directement de leurs frais de scolarité.

« Avec quelque 40 000 étudiants, cette contribution pourrait constituer une base financière solide pour amorcer la construction de logements abordables destinés à la population étudiante », souligne M. Coen.

Le Syndicat étudiant de l’Université d’Ottawa avait lancé un Caucus exploratoire sur le logement étudiant en juin 2024. Gracieuseté

Pour ce faire, le syndicat compte sur un partenariat avec House Canada, qui a accès à des programmes de financement gouvernementaux pour ce type de projets.

Fondé à l’Université de York à Toronto, House Canada est inspiré du modèle québécois de l’UTILE (Unité de travail pour l’implantation de logement étudiant). L’organisme soutient des initiatives étudiantes visant à développer des résidences sur ou près des campus, afin de réduire la pression sur le marché locatif privé.

« Et si les gouvernements municipaux ou le provincial ou le fédéral souhaitent s’y joindre, nous serions évidemment très heureux de collaborer », ajoute M. Coen.

Une crise qui s’aggrave à Ottawa

Ce projet s’inscrit dans un contexte de forte pression immobilière sur la communauté étudiante. Le rapport 2024-2025 sur le logement étudiant, présenté par le syndicat en mai dernier, met l’accent sur cette réalité.

52 % des étudiants affirment avoir eu de la difficulté à se loger, y lit-on. Aussi, 62 % déclarent que leur situation en matière de logement a un impact négatif sur leur santé mentale. De plus, 95 % estiment que le prix des loyers constitue un problème majeur. Les étudiants vivant en Ontario font face à un loyer moyen plus élevé (935 $) que ceux vivant au Québec (830 $).

« Pour un étudiant payé au salaire minimum, cela représente environ 54 heures de travail par mois uniquement pour couvrir le loyer — une réalité intenable pour ceux qui étudient à temps plein », souligne M. Coen.

« La spéculation immobilière, la privatisation et le manque de logements protégés ont aggravé la situation, particulièrement dans la capitale fédérale », ajoute-t-il.

Ces constats renforcent la volonté du syndicat d’agir également sur le plan structurel.

L’Université d’Ottawa annonce 2600 nouveaux lits

Le SÉUO souhaite que l’Université d’Ottawa transforme certains terrains sous-utilisés, comme ceux situés sur l’avenue King Edward, en logements coopératifs.

« Une nouvelle résidence doit voir le jour, ce qui est une bonne nouvelle, mais elle sera gérée par le privé — ce qui pose encore la question de l’abordabilité », rappelle M. Coen.

Pour Jack Coen, président du SÉUO, la crise du logement affecte particulièrement les étudiants francophones internationaux. Gracieuseté

En effet, l’Université d’Ottawa a annoncé récemment que son Bureau des gouverneurs a approuvé un projet de logement étudiant. Il s’agit du premier d’une série de nouveaux bâtiments qui ajouteront au total 2600 nouveaux lits.

Cela commence par la démolition de la résidence Brooks, un complexe universitaire de 700 lits, fermé depuis 2018 pour insalubrité et situé au cœur du campus. Cette démolition devrait commencer dès mai 2026, sous réserve de l’obtention des permis nécessaires. Un consortium de quatre entreprises, regroupées sous la bannière Integrated Campus Solutions (ICS), a été choisi comme soumissionnaire privilégié.

Étudiants francophones affectés

À l’Université d’Ottawa, 32 % des étudiants de premier cycle déclarent que le français est leur langue principale. Or, plusieurs d’entre eux, notamment les étudiants internationaux, sont parmi les plus durement touchés par la crise du logement.

« Ils paient souvent plus cher pour des logements de qualité inférieure. Beaucoup signent leur bail avant d’arriver au Canada, sans pouvoir faire une visite. Cela les rend vulnérables aux comportements abusifs de certains propriétaires », déplore le président du SÉUO.

Certains vivent dans des logements insalubres, mal entretenus ou dangereux. Il est question de fenêtres brisées non réparées, d’immeubles où la sécurité est compromise et de logements partagés avec des personnes en situation d’itinérance.

Cette réalité inquiète de plus en plus les représentants étudiants dans un contexte de crise du coût de la vie et d’augmentation des droits de scolarité.

Une situation stable au Collège La Cité

Alors que le SÉUO souhaite accroître l’offre de logements abordables à Ottawa, le Collège La Cité affirme, de son côté, que la situation demeure stable pour sa communauté étudiante.

« Actuellement, le Collège La Cité ne prévoit pas ajouter de nouvelles places à sa résidence étudiante », indique l’équipe des Communications et des relations publiques.

Avec la stabilisation du nombre d’étudiants internationaux, les stratégies déjà en place permettent selon le Collège de répondre adéquatement aux besoins en matière de logement.

Pour la session d’hiver 2026, des chambres sont d’ailleurs toujours disponibles, ce qui témoigne, selon l’administration, d’une capacité suffisante pour accueillir les nouveaux étudiants dès janvier.