Vincent de Haître débute sa quête pour retrouver les sommets
OBIHIRO – Après deux saisons difficiles et quelques péripéties avec l’équipe nationale, le patineur de vitesse franco-ontarien est de retour au premier plan. Il s’envole ce mercredi 1er novembre pour le Japon où il disputera la première des six manches de Coupe du monde de la saison à Obihiro du 10 au 12 novembre.
Tel le phoenix qui renaît de ses cendres, Vincent de Haître, le patineur de vitesse originaire d’Ottawa sort de deux saisons compliquées qui l’ont poussé en dehors de l’équipe nationale. Obligé de s’entraîner par ses propres moyens cet été, c’est du côté de Leval en Alberta qu’il a trouvé des compagnons d’entraînements et d’anciens entraîneurs de l’équipe nationale qui dirigent un programme réservé au développement des jeunes.
Ses six derniers mois n’ont pas été de tout repos. Au terme de la saison dernière, les entraîneurs de la sélection nationale lui ont fait comprendre qu’il n’aurait pas sa place dans le programme et qu’il ne pourrait rester qu’en tant que partenaire d’entraînement. Pour l’athlète qui fait partie de l’équipe depuis 11 ans et qui détient toujours le record national sur le 1000 mètres, la pilule était dure à avaler.
« C’était difficile parce qu’on a fini la saison et il y a eu zéro communication de la part des entraîneurs de l’équipe pendant un mois et demi. Finalement après quatre semaines, je me suis dit qu’il fallait que je commence à planifier quelque chose. La première fois que j’ai été à leur rencontre, on m’a dit quelque chose du genre, »tu mérites ton propre programme d’entrainement. » C’était un peu sur ce ton-là », confie-t-il.
« Ensuite, on a une deuxième rencontre avec le directeur des hautes performances et là on m’a bien fait comprendre qu’il n’y avait pas de place pour moi dans le groupe. Je suis resté calme, mais quand je suis rentré à la maison je n’étais pas content. »
Cela n’a pas pour autant freiné de Haître dans ses ambitions et sa confiance en ses capacités de revenir à un niveau suffisant pour aller chercher une qualification pour la série de six étapes de Coupe du monde. Il lui fallait pour cela trouver une alternative.
« Je savais que je n’allais pas être supporté financièrement pas l’équipe, mais je savais que je pouvais être dans le groupe. J’ai regardé mes options, au début j’ai pensé partir en Europe pour m’entraîner avec un autre groupe, mais ça ne rentrait pas dans ce que je voulais faire. En plus je m’étais acheté une maison ici en Alberta en 2021 ce n’est pas pour juste la quitter maintenant, j’aurais dû la vendre. Après, j’ai vu le programme de Leval, ce sont d’anciens coachs de l’équipe nationale qui sont là. Donc, moi, j’ai écrit mes entrainements en suivant ce qui se faisait à Leval et je pouvais ensuite profiter du retour technique de la part des entraîneurs. »
L’expérience a été positive et enrichissante pour l’athlète qui, en plus de trouver des partenaires pour s’entraîner et d’avoir des retours techniques d’entraîneurs qualifiés, a en plus joué un rôle de mentor auprès des jeunes.
« Les jours où je fais des affaires similaires à celles des juniors et des gars qui se développent dans ce système, je travaille avec eux et je partage mon expérience. Par exemple hier, on avait un entraînement de poursuite par équipe et j’avais deux juniors et un autre gars qui est en développement, on a bien travaillé ensemble et j’ai pu leur partager une information qui va les aider à progresser par la suite. J’ai trouvé du positif dans cette expérience, j’avais des partenaires d’entraînement et j’ai pu travailler ce que j’avais à travailler. »
Qualification assurée
Le moment fatidique des qualifications a ensuite livré son verdict lors des Championnats nationaux. Vincent de Haître a brillé. Sur ses quatre anciens partenaires d’entraînement de l’équipe nationale, seul un a fait de meilleurs résultats. Il a mis les trois autres sur le carreau. Pourtant, cette journée ne s’annonçait pas des plus simples, avec quelques complications imprévues dont il nous a fait part en exclusivité.
« J’ai été malade tout le long (des qualifications), mais je ne l’ai dit à personne, car on n’avait pas besoin de le savoir. Mon 500M était correct, mais ce n’était pas l’épreuve que je visais. Je visais les 1000 m et 1500 m. Il y avait 5 places au 1000 m et 4 places au 1500 m pour se qualifier, j’ai fini 3e et 4e. »
Avec la qualification en poche, Vincent aborde désormais les différentes étapes de Coupe du monde avec un plan bien précis en tête. Il s’alignera sur ses distances de prédilection les 1000M et 1500M, en plus du sprint par équipe sur lequel il garde un œil, en étant toujours le détenteur du record du monde.
« On m’a aussi demandé si je pouvais être l’alternatif pour les épreuves de poursuite par équipe. Je vais être bien sollicité pendant ces Coupes du monde. Beaucoup même pour quelqu’un qui s’est entrainé seul tout l’été », plaisante-t-il.
Toujours très motivé
L’athlète est conscient qu’il revient de loin après deux saisons difficiles. Il veut essayer de retrouver un niveau élite petit à petit et a donc fixé des objectifs par palier. Dans un premier temps, il visera une entrée dans le groupe A (top20). Une fois cet objectif atteint, il essaiera de faire partie de la première moitié du groupe, c’est-à-dire être parmi les 10 meilleurs en essayant de battre ses records personnels de la saison.
« Ce serait déjà satisfaisant, ça voudrait dire que je progresse. Après, si je vois que j’arrive à faire ça rapidement et à retrouver le top 10 par exemple au bout de deux Coupes du monde, je commencerai à viser des podiums, explique-t-il. Ce sera toujours ça l’objectif sur le long terme. Mais à court terme, si je peux déjà revenir dans le top 10, je considérerai que j’ai fait un bon début de saison. »
Le chemin s’annonce long et sinueux pour retrouver les sommets, mais Vincent de Haître n’a jamais perdu sa motivation. Son expérience lui permet de bien se connaître et d’être en mesure de jauger son niveau de performance. L’envie de gagner et de progresser est toujours présente en lui.
« Dans le patinage de vitesse, le pic de niveau se situe entre les âges de 25 et 32 ans. J’ai 29 ans, je suis en plein dedans. Je n’ai pas été blessé cette année, c’est nouveau pour moi, ça faisait longtemps que je n’avais pas été blessé. Tout va bien, la motivation est là parce que je crois que c’est encore possible. Il y a des jours où c’est difficile et on peut se trouver des excuses ou du négatif, c’est très facile de trouver des raisons de se dire que ce n’est pas possible, mais plus tu te dis que ce n’est pas possible, moins tu essaies. Au final, ça devient impossible en raison des choix que tu fais. »
Pour ce dernier, « l’essentiel est de prendre de bonnes décisions chaque jour ».
« La somme de petites décisions, la somme de choses positives chaque jour permet de toujours y croire. Quand je m’entraîne, je vois que le potentiel est quand même là. Je reste motivé pour plusieurs raisons : d’abord j’aime le sport, j’aime la compétition et j’aime transmettre à la prochaine génération, avoir un impact positif sur leur carrière. Il y a également le côté de l’ego. Je me sens bon, je sais que je suis bon et que je peux revenir sur un podium! Je ne suis pas prêt à lâcher tant que je ne suis pas 100 % sûr que je ne suis pas capable. »
Vous l’aurez compris, Vincent de Haître est très loin de songer à raccrocher comme auraient pu le faire croire ses déboires des saisons précédentes. C’est à l’inverse avec une faim de loup qu’il aborde cette saison hivernale avec la ferme intention de briller de nouveau.