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Les Jésuites quittent le Grand Sudbury : « pas de déception » pour le Père Perron

Les Jésuites quittent la ville de Sudbury plus de 140 ans de présence active. Photo: gracieuseté de Donald Perron

Le Père Perron, de son nom civil Donald Perron, est un père jésuite qui officie à la Villa Loyola ,dans le sud de Sudbury. Il a été pasteur de l’église Sainte-Anne-des-Pins de 2006 à 2012.

La fermeture de la Villa Loyola a été annoncée le 21 octobre dernier et aura lieu officiellement ce dimanche, avec une cérémonie marquant le départ des Jésuites, à l’École secondaire du Sacré-Cœur.

Les Jésuites, présents dans le Grand Sudbury depuis 140 ans, ont contribué à l’essor du milieu post-secondaire de langue française dans la région, notamment avec la création du Collège Sacré-Cœur.

« Pour quelle raison est-ce que les Jésuites quittent la ville de Sudbury?

La Villa Loyola, où nous demeurons, est une maison qui a été construite dans les années 60 pour des retraites. Mais les gens, culturellement, ne sont plus là-dedans. Cela nous a poussés à diversifier nos activités, comme faire de l’hôtellerie, mais, comme jésuites, on n’est pas appelés à faire de l’hôtellerie.

Alors, pour que la Villa soit rentable, il faudrait faire de la publicité et entrer en compétition avec les complexes hôteliers, mais là encore ce n’est pas dans notre identité. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de fermer les portes de la villa et mieux concentrer nos efforts dans les paroisses à l’île Manitoulin, avec les confrères qui sont là. Malheureusement, je ne serai plus en contact avec tant de personnes que j’aime bien, mais en même temps, c’est un cadeau, parce que j’ai besoin d’avoir un peu d’espace à 88 ans. Alors, pas de déception.

C’est grâce au Père Donald Perron que le programme d’éducation physique au Collège Sacré-Cœur avait été créé et reconnu par le ministère de l’Éducation. Photo : gracieuseté de Donald Perron

Le 25 mars dernier, vous fêtiez 50 ans de prêtrise. Quelle est la suite pour vous?

Je vais aller à Midland, au nord de Toronto, dans le Sanctuaire des mortiers canadiens, à partir du 1er juin. C’est une basilique érigée en 1925 et où Jean de Brébeuf a été martyrisé, entre autres. Alors, d’un côté, il y a le sanctuaire. De l’autre côté, c’est la reconstitution de la Huronie, soit le premier village francophone, qui était aussi un fort, et où il y a eu le massacre des Iroquois en 1549-1550. Le gouvernement de l’Ontario a reconstitué ce fort-là dans les années 1960 et s’en occupe encore aujourd’hui, c’est quasiment devenu un musée.

Un événement aura lieu ce dimanche. C’était important pour vous de faire des adieux formels?

Absolument. Il y aura des amis des jésuites, dont Pierre Riopel et d’autres, d’autres qui sont passés par le Collège Sacré-Cœur, ou encore des amis de la compagnie qui viendront assister à l’événement. On aura une messe en après-midi avec le responsable des Jésuites au Canada, une brève présentation historique sur l’histoire de la présence des jésuites à Sudbury et en Ontario. Ce sera une bonne occasion de rencontrer les gens de répondre à leurs questions.

C’est dans l’enceinte du Collège du Sacré-Cœur que la Société historique du Nouvel-Ontario (SHNO) a vu le jour en 1942. Source : Encyclopédie du patrimoine culturel de l’Amérique française

Les Jésuites ont joué un certain rôle dans l’éducation francophone de Sudbury. Qu’en retenez-vous?

Effectivement. Au départ, il y a eu la paroisse Sainte-Anne-des-Pins, dans les années 1880 qui a été créée par les Jésuites. Ils ont ensuite fait venir des religieuses pour bâtir l’hôpital, et ont ouvert le Collège Sacré-Cœur en 1913. Il faut se rappeler qu’à ce moment-là, le gouvernement de l’Ontario ne favorisait pas l’éducation en français, bien au contraire. Alors, la première année du collège Sacré-Cœur, tout était en anglais, avec quelques cours en français. C’est seulement en 1916 qu’on est passé à de l’enseignement exclusivement en français, parce que le collège est devenu privé. En 1957, il deviendra l’Université de Sudbury, avec une charte, et des cours au centre-ville. L’Université Huntington et celle de Thornloe étaient intéressées à bénéficier des fonds de l’Université de Sudbury, alors on a créé la fédération qui est devenue l’Université Laurentienne.

Croyez-vous, justement, que le projet de l’Université de Sudbury, dont la rentrée est prévue en septembre, est viable?

J’espère que ce projet va fonctionner maintenant que l’établissement est libéré de son affiliation à la fédération. Je suis heureux qu’on ait trouvé cette alternative de partenariat avec l’Université d’Ottawa parce que, justement, ça permet à l’Université de Sudbury d’avoir une durée dans un de ses projets initiaux, qui était d’être une université francophone. On espère aussi que la paroisse universitaire va être réanimée par l’évêque. Alors, on aurait la double combinaison francophone-catholique, au moins de façon indirecte, par la paroisse.

Le Père Perron pense que les programmes qui seront offerts à l’Université de Sudbury pourront aider à former des enseignants. Archives ONFR

Quel est l’héritage des Jésuites en matière de leadership aujourd’hui?

Ça fait longtemps qu’on travaille en éducation et à former des leaders. Il faut dire qu’il y en a, dans la communauté, des leaders. On a œuvré à transmettre notre façon de faire, notre façon d’être. En quelque sorte, nous nous sommes collés au système de l’éducation en Ontario, d’apprendre à apprendre.

Avez-vous l’impression que, comme au Québec, les gens se désintéressent quelque peu de la religion aujourd’hui, comme on le voit avec la fermeture de nombreuses églises en Ontario?

Oui, je pense que culturellement, il y a un désengagement à caractère religieux, mais quand même, l’engagement de la foi n’est peut-être pas loin en dessous de ça, c’est-à-dire le service des autres. Par exemple, en septembre, Bruno Michel, qui est un diacre, a proposé de faire des exercices spirituels dans la vie courante. On a eu 15 personnes qui sont venues tous les samedis matin à 11h pour partager sur le cheminement dans les exercices spirituels. Au fond, c’est la présentation de la foi chrétienne dans un mode le plus simple. »