Le commissaire aux langues officielles du Canada, Graham Fraser. Archives

L’ancien commissaire aux langues officielles Graham Fraser estime que le Québec est la seule province canadienne qui a nui de façon systématique à sa minorité linguistique dans les dernières décennies.

Dans une lettre parue dans Le Devoir mardi, celui qui détient la plus grande longévité de tous ayant occupé ce poste, dénonce le traitement réservé aux anglophones du Québec depuis plusieurs années, notamment sous le gouvernement Legault avec sa plus récente annonce sur les universités québécoises. Il laisse entendre que c’est faux de prétendre que « la minorité anglophone (du Québec) est la mieux traitée au Canada ».

« Mais il n’y a aucune province, sauf le Québec, qui a fait un effort systématique au cours des dernières décennies pour affaiblir les institutions de la minorité », écrit-il.

Pour étaler sa pensée, il cite la récente ouverture de l’Université de l’Ontario français, le collège Saint-Boniface qui est devenu l’Université Saint-Boniface et le fait que l’Université Moncton célèbre son 60e anniversaire.

Le député de l’Est ontarien Francis Drouin n’a pas digéré les propos du chien des gardes des minorités linguistiques entre 2006 et 2016.

« Le jeudi noir en Ontario n’a jamais eu lieu selon l’ancien commissaire. Lorsque nous avons occupé un poste comme commissaire aux langues officielles, faire l’autruche n’est pas une excuse. Le devoir de s’informer avant de s’exprimer est important… même pour les has-been », a-t-il dénoncé sur X (Twitter).

Son collègue acadien René Arsenault se dit en « désaccord » avec les propos de M. Fraser, signalant toutefois être fier du chemin parcouru au niveau institutionnel au cours des dernières décennies, mais qu’il reste du travail à faire sur le terrain « ce qui accroche souvent dans les provinces comme le Nouveau-Brunswick », dit-il en entrevue.

Graham Fraser avance qu’un sondage réalisé au début de son mandat comme commissaire au milieu des années 2000 où les anglophones du Québec étaient pessimistes par rapport à leurs institutions alors que c’était le contraire pour les francophones « m’a fait écrire cette phrase-là », précise-t-il entrevue avec ONFR.

« Ce que je voulais souligner, c’est qu’au Québec, il y a de l’ignorance et une incompréhension de la réalité des communautés francophones hors Québec », ajoute-t-il.

Il soutient toutefois qu’il faudrait exclure les anglophones de Montréal lorsque l’on compare le sort des deux minorités linguistiques du Canada.

« Ce n’est pas comparable… La comparaison entre les anglophones à Sherbrooke, à Trois-Rivières en Gaspésie, doit se faire avec les francophones à Saint-Boniface, à Sudbury. »

Il soutient que le capital de sympathie du gouvernement Ford, avec le jeudi noir en 2018 et plus récemment avec le refus de financer l’Université de Sudbury, « n’est pas fort ». Il fait état aussi des événements des derniers mois au Nouveau-Brunswick, mais il mentionne que ces gestes posés sont plus synonymes « d’ignorance et de négligence ».

« Mais ça n’a pas détruit la morale des institutions des communautés francophones », relate-t-il.

Selon le recensement de 2021, le nombre de locuteurs de l’anglais au Québec, selon la première langue officielle parlée, à atteint pour la première fois le million et augmentant de 12 à 13 % par rapport à 2016. C’est 70 % des anglophones qui habitent sur l’île de Montréal. Hors Québec, le français a connu une chute de 3,6 % à 3,3 % en cinq ans alors que le nombre de locuteurs a diminué de 36 000. La descente la plus marquée est en Ontario qui a connu une baisse historique au niveau du français.