Justin Trudeau
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OTTAWA – Le premier ministre Justin Trudeau a prononcé des excuses au nom du Parlement, à la suite de l’invitation du président de la Chambre des communes d’un ex-soldat nazi lors du discours du président ukrainien vendredi dernier.

« Au nom de toutes les personnes présentes dans cette Chambre, je tiens à présenter mes plus sincères excuses pour ce qui s’est produit vendredi et pour la situation dans laquelle le président Zelensky et la délégation ukrainienne ont été placés », s’est excusé Justin Trudeau à la période des questions.

« C’est une erreur qui a mis le Parlement et le Canada dans un embarras profond, et nous regrettons tous profondément de nous être levés dans la Chambre et d’avoir applaudi, même si nous l’avons fait sans être conscients du contexte », affirmait-il quelques instants plus tôt dans une déclaration aux journalistes.

En rappel, le président de la Chambre, le Franco-Ontarien Anthony Rota, avait invité et rendu hommage à un ex-soldat nazi de la Seconde Guerre mondiale lors du discours du président de l’Ukraine Volodymyr Zelensky, assis dans la Tribune du Parlement. Le premier ministre se dit troublé à l’idée que « cette flagrante erreur soit politisée par la Russie et ses partisans afin de diffuser une propagande mensongère sur les raisons qui poussent l’Ukraine à combattre ».

Questionné en Chambre par le Bloc Québécois, Justin Trudeau n’a pas voulu explicitement certifié s’il avait appelé le président Zelensky.

« Nous avons passé plusieurs messages directement au peuple ukrainien et au président Zelensky », a-t-il répondu.

Tous les partis de l’opposition pressaient le premier ministre d’aller dans ce sens dans les derniers jours. En matinée, le chef conservateur demandait ce geste à Justin Trudeau, qu’il tient « responsable pour la pire catastrophe en ce qui concerne la réputation diplomatique de notre pays de notre histoire ». Le premier ministre et son bureau auraient dû avoir prévenu cette crise, estiment les conservateurs, ce que réfute le principal intéressé.

« Que le leader de l’opposition suggère que tous les invités des parlementaires soient approuvés par le gouvernement en place constitue en fait une grave attaque contre les droits et privilèges des parlementaires », critique le chef libéral.

Hier, c’était le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique (NPD) qui demandaient au premier ministre de présenter des excuses au nom du Canada pour cet événement en compagnie du président Zelensky.

Les libéraux derrière Anthony Rota

Malgré les événements des derniers jours, le désormais ancien président de la Chambre des communes Anthony Rota a toujours la confiance du caucus libéral.

« Moi j’ai confiance en M.Rota … Je pense qu’il mérite de pouvoir continuer à travailler », a réagi Mona Fortier, la députée d’Ottawa-Vanier.

Le représentant franco-ontarien pourra rester dans le caucus libéral, selon ses collègues du parti qui sont venus à sa défense.

« Bien sûr, pourquoi pas? Il a été élu et je garderais la porte bien ouverte pour lui. Ça a été un bon représentant du peuple pour sa circonscription. Il a du travail à faire et puis il faut qu’il continue à faire ce travail », estime le député acadien Darrell Samson.

Le député de la circonscription du Nord de l’Ontario, Nipissing-Timiskaming a annoncé sa démission mardi.

« La décision qu’on a prise hier était à propos de la chaise du président. C’est un précédent qu’on crée », affirme le député de l’Est ontarien Francis Drouin.

« C’est important quand il y a une erreur comme ça qui a été commise que ça soit reconnu pour les futurs présidents et je ne veux pas dénigrer M. Rota. Il reste un homme intègre et puis je le respecte », ajoute le représentant franco-ontarien.

Le ministre Jean-Yves Duclos plaide lui aussi pour le maintien d’Anthony Rota au sein des banquettes du gouvernement.

« M. Rota est un député libéral comme les autres députés libéraux et il a maintenant besoin de continuer à faire son chemin sur la base de ce qu’il a déjà exprimé », dit le ministre québécois.

Déjà des successeurs potentiels

Un peu moins de 24 heures après le départ de M. Rota, plusieurs ont démontré de l’intérêt pour devenir président ou présidente de la Chambre des communes. À l’heure actuelle, c’est le doyen au Parlement, le député bloquiste Louis Plamondon qui assume l’intérim jusqu’au 3 octobre, date de l’élection d’un nouveau président.

La députée franco-ontarienne Carol Hughes, qui agit à titre de vice-présidente adjointe de la Chambre actuellement, sera la candidate pour les néo-démocrates. La députée du Nord de l’Ontario pourrait devenir la première femme à ce poste depuis 1983.

« Je crois également qu’il est temps que le Parlement élise une femme à la présidence. Cela fait plus de quarante ans qu’une femme n’a pas occupé le poste de président. Cher.e.s collègues, certains d’entre vous n’étaient même pas nés lorsque Jeanne Sauvé a pris son tour historique à la présidence. À ce jour, elle n’est pas seulement la première, mais la seule femme à avoir occupé le poste de Président », écrit-elle dans une lettre adressée à ses collègues parlementaires.

La députée franco-ontarienne d’Algoma-Manitoulin-Kapuskasing, Carol Hughes. Crédit image : archives ONFR+

Cette dernière aura de la compétition de la part de l’actuel vice-président Chris d’Entremont, qui a présidé les deux dernières séances.

« Bien sûr que je veux être président », a répondu le député acadien aux journalistes à son arrivée au caucus conservateur.

« Je l’ai fait pendant les deux dernières années. J’en suis venu à apprécier le travail que tout le monde fait à la Chambre. Je pense que j’ai l’expérience d’offrir à la Chambre au moins une façon de travailler avec tous les membres du Parlement » a-t-il vendu.

Le député libéral Greg Fergus a aussi indiqué qu’il déposerait sa candidature à ce poste. Le processus d’élection est un vote permettant aux députés de classer leurs collègues par ordre de préférence dans un scrutin préférentiel qui demeure secret.