Autisme : l’urgence de moyens pour les francos et le Nord de l’Ontario

Crédit image: Rudy Chabannes

TORONTO – Les recommandations du groupe d’experts sur l’autisme mandaté par le gouvernement ont été rendues publiques aujourd’hui. Elles vont dans la direction opposée voulue par le gouvernement en 2018, pointant de graves carences dans les services en français et dans les régions du Nord.

Les coupures et modifications dans le Programme ontarien des services en matière d’autisme (POSA) avaient suscité beaucoup d’émoi, contraignant le gouvernement, au printemps dernier, à revoir sa copie.

Le ministre des Services à l’enfance et des Services sociaux et communautaires, Todd Smith, s’était alors donné jusqu’en avril 2020 pour adopter une nouvelle stratégie centrée sur les besoins de l’enfant, attendant, pour ce faire, les conclusions du groupe d’experts indépendants.

Basé sur une vingtaine de consultations et tenant compte d’un budget provincial annuel de 600 millions dollars, le rapport met en avant plusieurs pistes pour améliorer la qualité de vie des personnes atteintes d’autisme, parmi lesquelles :

  • Un accès à tous les services de base pour les enfants diagnostiqués formellement
  • Un accès à un processus de réponse urgente dès que le diagnostic est confirmé
  • Une gestion transparente du processus de liste d’attente
  • Un accès à des services en français partout dans la province
  • Un effort ciblé pour recruter des professionnels divers, y compris ceux d’origines autochtones et francophones

Pénurie de fournisseurs de services francophones

« Des préoccupations ont été exprimées concernant la pénurie de fournisseurs de services francophones et des Premières Nations, le manque d’accès général aux services dans le Nord, les régions rurales et éloignées de la province », fait ressortir le rapport.

« Il est recommandé que le ministère s’engage auprès des communautés du Nord, francophones et autochtones par le biais de la mise en œuvre du nouveau plan d’action pour s’assurer que la prestation des services réponde à leurs besoins. »

Le rapport final mentionne également noir sur blanc : « Les services en français doivent être disponibles partout dans la province et le ministère devrait investir dans une capacité accrue de fournir des services en français. »

John Fraser, chef intérimaire du Parti libéral de l’Ontario. Crédit image : Rudy Chabannes

Des obstacles importants dans le Nord

Les experts relèvent des obstacles dans le Nord. Pour John Fraser, des régions isolées comportent de nombreux francophones. Le chef intérimaire du Parti libéral estime que « le gouvernement doit réparer les dommages qu’il a fait, particulièrement auprès des familles dans le Nord qui n’ont pas le même accès aux services.

« La balle est dans le camp du gouvernement », dit-il. « Il y a, dans le Nord, un impact sur beaucoup de familles francophones. Si on veut changer quelque chose, il faut un plan. Le gouvernement a modifié ce programme pour de mauvaises raisons et a mis des milliers de famille dans la difficulté. »

« Je continue d’examiner attentivement le rapport du groupe d’expert en lui accordant tout le temps et l’attention qu’il mérite », a réagi Todd Smith, immédiatement après la sortie du rapport.

Le ministre des Services à l’enfance et des Services sociaux et communautaires a essuyé les critiques de l’opposition, à Queen’s Park, sur un dossier qui empoisonne la majorité progressiste-conservatrice depuis plusieurs mois.

« Je suis convaincu que ses recommandations constitueront une base solide pour le nouveau POSA », a-t-il ajouté par voie de communiqué, se donnant jusqu’en avril 2020 pour parachever ce programme dont il dit être une de ses priorités.

Feuilleton politique

Porté à l’origine par Lisa McLeod, le programme initial lancé l’hiver dernier puis corrigé dans la précipitation, suite à une levée de boucliers des familles, prévoyait de verser directement une somme d’argent aux familles en fonction de l’âge de l’enfant et du revenu familial, afin de réduire les listes d’attente en établissement spécialisé.

Entrées en vigueur au 1er avril dernier, la plupart des mesures n’ont pas résisté à l’épreuve des faits, poussant Todd Smith, nouveau ministre en charge, à annoncer plusieurs mesures.

Todd Smith, ministre des Services à l’enfance et des Services sociaux et communautaires. Crédit image : Rudy Chabannes

« Il est clair que nous n’avons pas bien fait les choses », avait-t-il concédé, disant avoir écouté les familles et vouloir bâtir une stratégie basée cette fois sur les besoins.

Le porte-parole de l’opposition aux Affaires francophones, Guy Bourgouin, s’est toujours montré très critique sur ce dossier, déplorant une enveloppe budgétaire trop restreinte. « On a dit depuis le commencement que l’enveloppe n’était pas suffisante parce que ces enfants ont des besoins spécifiques », a-t-il rappelé. « On a crié dans l’oreille d’un sourd. C’est désolant. »

« Le gouvernement change de canal pour améliorer sa popularité mais de quoi se souviendront les familles dans le besoin? » interroge-t-il, à propos d’un « gouvernement qui dit lutter contre le déficit en réduisant l’aide à l’autisme et en dépensant des milliers de dollars en publicité contre la taxe carbone. »