Actualité

Autisme : un organisme anglophone reçoit un financement pour des services en français

Photo : Canva

TORONTO – Un organisme anglophone spécialisé en autisme de la région du Grand Toronto reçoit un financement de 400 000 dollars pour élargir ses services aux francophones. L’objectif : répondre à la demande croissante et desservir les régions dépourvues de services. Un financement qui soulève toutefois des interrogations pour la Société franco-ontarienne de l’autisme (SFOA) quant au manque de moyens pour les organismes francophones et à la pénurie d’activités pour des parents « au bout du rouleau ».  

Kinark Children and Youth, un fournisseur anglophone de services en autisme pour les enfants et les jeunes, bénéficiera d’un financement provincial de 400 000 dollars sur deux ans pour étendre ses services aux francophones.

« Ce financement nous permet de combler un vide critique dans les services en autisme pour les communautés francophones et rurales », affirme Cathy Paul, la directrice générale de Kinark.

Concernant la décision de solliciter ce financement, « nous savons que le français est non seulement l’une des langues officielles du Canada, mais aussi la langue principale de nombreuses personnes dans les régions que nous desservons », justifie Erin Johnston, gestionnaire principale des communications.

« Nous avons observé une demande croissante de la part de clients et partenaires francophones, poursuit celle-ci. La langue ne devrait jamais être un obstacle à l’accès aux services. (…) En tant qu’organisation historiquement anglophone, cette initiative comme une étape essentielle pour mieux représenter et répondre aux réalités linguistiques ».

« C’est bien plus facile pour une entreprise de cette envergure de monter un gros projet pour avoir du financement par rapport à nos petites organisations dans l’Est. »
— Carol Jolin, président de la Société franco-ontarienne de l’autisme (SFOA)

Des créations de postes permettront l’embauche d’un superviseur clinique, d’un consultant en autisme et d’un thérapeute instructeur, tous francophones, affirme l’organisation.

Les services francophones iront de l’analyse comportementale appliquée (ACA), au coaching virtuel, des formations pour les parents et aidants, ainsi qu’au soutien individualisé, déployés dans la région de York, la région de Durham, le comté de Simcoe, Muskoka et le Nord de l’Ontario, région la plus mal desservie.

Une démarche qui soulève toutefois une question : pourquoi ne pas avoir étendu les capacités d’un organisme déjà francophone pour une extension de ses services?

Si pour le président de la Société franco-ontarienne de l’autisme (SFOA) Carol Jolin, le besoin est réel dans la ville reine, « c’est bien plus facile pour une entreprise de cette envergure de monter un gros projet pour avoir du financement par rapport à nos petites organisations dans l’Est, comme la nôtre qui vient tout juste de pouvoir avoir une direction générale à temps partiel sans soutien administratif ».

Les organismes franco-ontariens pas logés à la même enseigne?

« 400 000 dollars c’est un chiffre qu’on rêverait d’avoir », commente M. Jolin qui rappelle que la SFOA avait failli fermer en 2023, faute de moyens, remise sur pied in extremis via une collecte de fonds par un groupe de parents soucieux de conserver les camps d’été adaptés à l’autisme pour leurs enfants.

Il s’agissait de pouvoir payer les frais récurrents et frais d’entreposage de 8000 dollars par année.

« On est en meilleure santé, on peut garder une direction générale, mais on loin d’aller chercher autant. Si on avait de plus gros moyens, on pourrait faire davantage », regrette-t-il.

Notamment avec un type de services liés à l’autisme sous-estimé et sous-financé à son sens, les activités de répit : les camps, dont il y a un grand besoin l’été, et la garde relais après l’école et avant le retour des parents du travail.

« Autisme Ontario ne donne pas d’activités de répit, c’est ce qu’on entend des parents qui sont au bout du rouleau. C’est le genre de services que nous pourrions proposer à grande échelle. »

Il faudrait selon lui élargir les critères de l’enveloppe de Programme ontarien des services en matière d’autisme (POSA) pour que les parents puissent payer des services de répit par son biais, comme c’est le cas en Alberta.

« Pour ce qui est de Kinark, j’ose croire qu’ils vont se donner les moyens d’être vraiment efficaces pour les francophones bien qu’ils ne soient pas sous la Loi sur les Services en français (LSF), ce qui est toujours inquiétant », déplore le président de la SFOA.  

N’étant en effet pas d’un organisme désigné en vertu de la LSF, il n’est donc pas tenu par les mêmes obligations légales.

Sa porte-parole a cependant indiqué qu’ils exercent leurs activités dans plusieurs régions désignées, avec l’engagement d’offrir des services en français conformément aux besoins des communautés.

Une obligatoire contractuelle liée au français, assure le gouvernement

« Tous les fournisseurs de services financés par le ministère ont l’obligation contractuelle de fournir des services équivalents en français », assure le bureau de Michael Parsa, ministre des Services à l’enfance, des Services communautaires et des Services sociaux.

De préciser que : « Les bénéficiaires retenus du Fonds de renforcement des capacités sont ceux qui ont démontré leur capacité à élargir l’accès aux services, notamment pour les familles vivant dans des communautés nordiques, rurales et éloignées, ainsi que pour les familles francophones et autochtones. »

La subvention accordée à Kinark provient du Fonds de renforcement des capacités de la main-d’œuvre du POSA qui vise à augmenter la capacité des organismes à offrir les services cliniques principaux.

Les subventions versées dans le cadre de ce fonds s’inscrivent dans un investissement de 37 millions de dollars auprès de 100 fournisseurs de services pour enfants en Ontario, pour qu’un plus grand nombre ait accès aux services du POSA. L’organisation Kinark prévoit que cette initiative permettra d’offrir des services à 110 familles supplémentaires. Les services cliniques devraient débuter à l’automne 2025.