Le parcours de l'équipe canadienne de basket, ici à la lutte avec les États-Unis pour la médaille de bronze, inspire les jeunes joueurs franco-ontariens. Crédit image: La Presse canadienne / AP Photo/Michael Conroy

La troisième place historique obtenue par RJ Barrett et ses coéquipiers à la Coupe du monde de basket peut faire figure de véritable exploit pour le grand public. Mais pour les joueurs universitaires canadiens franco-ontariens de la Laurentienne, Jordan Katchunga et Rudy Beya, c’est tout simplement le résultat de la montée en puissance du sport au pays.

Les deux joueurs de la Laurentienne sont tout sauf étonnés du parcours de leurs aînés à la Coupe du monde de basket aux Philippines, une impression partagée par Justin Serresse, l’entraineur en chef et le directeur général de l’équipe masculine de basket-ball de l’université Wilfrid-Laurier.

« J’espère qu’avec cette performance le Canada sera plus mis en avant car je pense que c’est l’un des pays qui a le plus de talent mais qui reste tout de même très sous-estimé », confie Rudy Beya. « On met beaucoup le hockey en avant car c’est le sport national, mais je pense qu’il y a beaucoup de talents cachés ici au Canada dans les autres sports comme le basket-ball mais aussi le soccer, le football. Je pense qu’avec une meilleure exposition, le monde pourra plus voir ces talents-là. » 

Des talents comme RJ Barrett, Shai Gilgeous-Alexander ou encore Dillon Brooks bien connus des suiveurs de la NBA, qui ont éclaté aux yeux du grand public lors de cette compétition, même si les horaires des rencontres les plus importantes, la demi-finale contre la Serbie (4h45) et le match pour la troisième place contre les États-Unis (4h30), ont pu être un frein pour attirer une audience plus large. 

Rudy Beya. Crédit image : Laurentian Athletics

« J’ai suivi la sélection surtout sur les réseaux sociaux parce qu’avec mes horaires d’école et mes entraînements c’était difficile de regarder les matchs en entier », confirme Rudy Beya. « Quand je ratais une mi-temps par exemple, je rattrapais en regardant les meilleures actions sur les réseaux sociaux sur mon temps libre. J’ai suivi les performances de RJ Barrett et Shai Gilgeous Alexander. J’ai aussi vu la grande importance qu’a eu Dillon Brooks par sa grande activité en défense. »

Jordan Katchunga, lui, a été en mesure de regarder tous les matchs à horaires raisonnables mais pour les autres ça a été visiblement plus compliqué. 

« Pour le match de la 3e place à 4h30 du matin, je me suis levé trop tard. Le match était terminé, mais j’ai regardé un résumé et des émissions qui donnaient de l’information sur la rencontre. C’était une belle rencontre, avec peu de défense mais c’était quand même divertissant on va dire. »

« Une fierté pour le basket et pour la nation »

Le fait d’avoir raté les derniers matchs en direct ne l’empêche pas d’avoir un regard sur la performance de l’équipe et de mesurer l’exploit accompli. 

« L’équipe a bien performé. Je m’attendais à ce que Jamal Murray (vedette des Nuggets de Denver champions NBA) soit là, mais même sans lui, ils sont allés chercher la troisième place pour la première fois de l’histoire du Canada. C’est une performance pour laquelle on peut être fier. C’est une fierté pour le basket et pour la nation, cela montre comment le sport est en train d’évoluer. Je suis aussi content d’avoir été témoin de ça, je suis un témoin de l’histoire. J’ai vu de quelle manière l’équipe a grandi et ça c’est vraiment bien. »

Pour les deux anciens coéquipiers – Jordan Katchunga a disputé sa dernière saison universitaire en 2022-23 – ce parcours n’est que le reflet de la progression du basket-ball au Canada qu’ils ont pu également remarquer à leur niveau dans le sport interuniversitaire. 

« Les jeunes Canadiens de la génération qui arrive ont beaucoup de potentiel pour aller en première division à l’étranger ou même en NBA G League », constate Rudy Beya qui va disputer sa deuxième saison avec la Laurentienne. « Le talent commence à se développer au niveau du sport interuniversitaire (CIS) et le niveau est en train d’augmenter. J’ai mon petit frère qui a 16 ans et qui fait déjà partie des meilleurs joueurs nationaux. On sent vraiment un grand développement et cela va permettre une plus grande exposition au Canada. » 

Les yeux tournés vers les Jeux olympiques

« Aussi, je note qu’on voit beaucoup de Canadiens qui quittent les divisions 1 universitaires américaines pour revenir jouer ici dans le U Sport », ajoute Jordan Katchunga. « Ça c’est une très bonne chose pour le Canada, on commence vraiment à nous prendre au sérieux. Je pense même que dans quelques années le Canada sera le deuxième plus gros marché pour le basket. »

Si Jordan Katchunga a mis derrière lui ses envies de carrière dans le basket et préfère transmettre son savoir aux plus jeunes, en leur partageant son expérience aux États-Unis en école préparatoire et en Junior College, cette Coupe du monde lui a tout de même ouvert les yeux sur le niveau du basket international et sa diversité. 

Jordan Katchunga. Crédit image : Laurentian Athletics

« Après avoir vu la Coupe du monde, j’ai pu m’apercevoir qu’il y a vraiment beaucoup de talent dans le monde à l’extérieur des États-Unis et du Canada. Le jeu est vraiment différent mais c’est intéressant de voir d’autres styles comme certaines équipes qui ne jouent pas vite mais se basent sur le mouvement de balle, les écrans. Il y a beaucoup plus de systèmes, tout le monde joue ensemble et est très bien coordonné. Chacun sait où il va se trouver sur le terrain. Je pense que beaucoup de gens vont regarder les Jeux olympiques l’année prochaine c’est sûr, surtout les Canadiens. »

Pour les Jeux Olympiques, ce sera sans doute trop juste pour Rudy Beya, mais le natif d’Ottawa passé par le Collège Franco Ouest ne cache pas que l’équipe nationale l’inspire. Il en fait même un objectif à long terme. 

« Mon but est de jouer pour l’équipe du Canada. Je ne pense pas que ce soit trop tard, je travaille beaucoup pour continuer à maintenir cette opportunité-là. Je pense que tout est possible quand on y croit avec l’aide de Dieu. Je travaille beaucoup individuellement et avec mes entraîneurs. Jouer pour le Canada, c’est un de mes plus grands rêves que j’ai envie de réaliser. Je suis né ici, je suis Canadien, je veux jouer pour mon pays, représenter ma famille et mes amis. »