Chroniques

Bientôt un parc Trèva-Cousineau à Orléans?

Trèva Cousineau, en 2016. Photo : MIFO

Chaque samedi, ONFR propose une chronique sur l’actualité et la culture franco-ontarienne. Cette semaine, l’historien et spécialiste de patrimoine Diego Elizondo.

La Ville d’Ottawa a lancé le 8 avril dernier des consultations publiques pour différentes propositions toponymiques sur son territoire. Parmi les six propositions soumises au public pour rétroaction, l’une d’elles se distingue du côté franco-ontarien : celle de renommer un parc existant à Orléans du nom de la militante francophone Trèva Cousineau.

Trèva Legault est née le 12 juin 1937 à Timmins, dans le Nord de l’Ontario. Sa famille déménage à Kirkland Lake où elle y grandit à partir de l’âge de 6 ans. Au secondaire, cette première de classe étudie comme pensionnaire à l’Académie Sainte-Marie à Haileybury, une école secondaire privée pour filles dirigée par les Sœurs de l’Assomption de la Sainte-Vierge où elle retiendra trois valeurs cardinales : engagement, rigueur et détermination.

Grâce à une bourse, elle part étudier en nutrition à l’Université d’Ottawa en 1956. Pendant ses études, elle s’implique en politique étudiante, devient journaliste pour La Rotonde et représente l’École des sciences domestiques auprès du Conseil des gouverneurs (alors seule femme à siéger au conseil).

Elle obtient un baccalauréat en sciences en 1959 de l’Université d’Ottawa et elle étudie aussi en éducation de 1959 à 1960 à l’Ontario College of Education à Toronto.

Elle rencontre le juriste franco-ontarien André Cousineau – qui deviendra son époux – et prend le nom de Trèva Cousineau. Elle est enseignante de 1959 à 1962 et diététicienne de 1964 à 1967.

Un fort engagement scolaire

De retour dans sa ville natale de Timmins en 1963, elle se fait élire au Timmins District Roman Catholic Seperate School Board / Conseil scolaire des écoles catholiques de Timmins, un conseil scolaire bilingue.

Sur les neuf conseillers scolaires élus, un seul est anglophone tandis que les huit autres sont francophones. Pourtant, les activités et délibérations se passent en anglais. Elle décide alors de consacrer sa vie à la protection et à l’épanouissement de la francophonie.

Nommée au Conseil des affaires franco-ontariennes en 1976, elle y siègera jusqu’en 1982. Réélue aux élections scolaires suivantes, elle reste en poste jusqu’en 1983. Pendant ses mandats, elle fut vice-présidente et présidente à deux reprises en 1975 et 1978 du conseil scolaire.

Trèva Cousineau, lauréate du Prix Florent-Lalonde en 2017, remise par l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario. Photo : MIFO

Elle fut aussi membre élue de l’Association française des conseils scolaires de l’Ontario de 1976 à 1984 à titre de représentante du Nord, présidente du secteur catholique, vice-président de l’association et présidente provinciale à deux reprises, 1980 et 1983.

Elle fut également membre élue à partir de 1979 de l’Ontario School Trustees’ Council puis sa présidente en 1981 et 1982. Enfin, elle fut nommée membre au comité consultatif sur le rôle des conseillers scolaires de la ministre de l’Éducation de l’Ontario de 1981 à 1983.

Loin de s’arrêter et de se limiter au secteur scolaire, son implication communautaire continuera de se déployer dans les années subséquentes.

À Timmins, une implication communautaire accrue

Avant de quitter Timmins, elle cofonde le Centre Cor Jesu en 1984 (un centre pour alcooliques et narcomanes) et en assume la direction générale l’année suivante.

En 1985, elle déménage à Sudbury où elle devient coordonnatrice des services en français à l’Hôpital Sudbury Algoma de 1985 à 1988 et, par la suite, coordonnatrice des Services en français pour le ministère des Services sociaux et communautaires, secteur du Centre-Nord (districts de Sudbury et Algoma) où elle fait la promotion de la nouvelle Loi sur les services en français, adoptée en 1986.

Son engagement communautaire franco-ontarien comprend le Bureau des gouverneurs du Collège Cambrian, le conseil d’administration du Centre franco-ontarien de folklore et celui de la paroisse Sainte-Anne.

En outre, elle est l’une des six membres nommés par décret du gouvernement provincial à la Commission MacDonald (1984-1986), chargée d’étudier le financement des écoles élémentaires et secondaires de la province.

À Orléans, un rapport décisif

La famille Cousineau s’installe en 1989 dans le bastion franco-ontarien d’Orléans. Celle qui est alors présidente du Groupe consultatif sur la gestion de l’éducation en langue française remet, en 1991, au ministre de l’Éducation un rapport qui mènera à la création des 12 conseils de langue française de l’Ontario, en 1998.

Directrice générale du Conseil de l’éducation catholique pour les francophones de l’Ontario (1990-1996) et de la Fédération nationale des conseils scolaires francophones (1992-1996), elle devient présidente de l’ACFO provinciale en 1997 pour une durée de deux ans.

Trèva Cousineau, aux côtés de Raymond Cho, ministre des Services aux aînés et de l’Accessibilité, au moment de recevoir le Prix d’excellence de l’Ontario pour les personnes âgées en novembre 2018 remis par la lieutenante-gouverneure de l’Ontario, Elizabeth Dowdeswell, à l’Assemblée législative de l’Ontario. Photo : MIFO

Entre 1999 et 2004, elle est membre du comité de direction et gestionnaire de la partie communautaire de l’Entente Canada-communauté-Ontario en plus d’être l’adjointe exécutive à la députée provinciale d’Ottawa-Vanier, Claudette Boyer, de 2001 à 2003.

Finalement, Trèva Cousineau effectue un retour à la direction générale de l’ACFO provinciale de 2004 à 2006.

Retour au MIFO

En 2006, elle devient membre du comité organisateur du projet des Monuments de la francophonie d’Ottawa, projet parrainé par le District des fondateurs du Richelieu International, dont elle est membre depuis 1993. Les six premiers monuments ont été érigés de 2006 à 2007.

Membre et secrétaire du comité organisateur du Festival de la Saint-Jean à Ottawa (2008-2015), elle est également membre du comité organisateur des États généraux de la francophonie d’Ottawa (2011-2013).

Elle préside de 2011 à 2021, environ, l’organisme Dialogue Canada qui monte au front pour faire de la ville d’Ottawa une ville officiellement bilingue.

Présidente du MIFO de 2016 à 2021, elle l’est redevenue depuis le printemps dernier.

Membre du comité fondateur de l’hebdomadaire L’Orléanais en 2017, elle est trésorière depuis 2019 de l’Association du patrimoine familial francophone de l’Ontario. Pendant 10 ans, jusqu’en 2024, elle a été coordonnatrice du Gala de la francophonie d’Ottawa, aujourd’hui le Gala de la Francophonie plurielle.

« Qu’un parc soit nommé à Orléans où elle réside depuis plus de 35 ans et où elle continue de s’impliquer tombe sous le sens »

Qu’un parc soit nommé à Orléans où elle réside depuis plus de 35 ans et où elle continue de s’impliquer tombe sous le sens. Elle le mérite avec son implication dans la francophonie depuis plus de 50 ans.

Même si elle ne s’est pas lancée en politique provinciale active en 1983 et en 2011, sa feuille de route communautaire est impressionnante.

Celle que le chroniqueur Denis Gratton avait surnommée en 2012 le « bouclier de la francophonie » et qui avait pour modèle Gisèle Lalonde deviendrait la troisième femme francophone à avoir un parc nommé en son nom à Ottawa (dont la première Franco-Ontarienne de naissance) et la première à Orléans.

Le parc Glen est situé au 1756, promenade des Soeurs Grises, à Orléans, juste à côté de deux écoles, dont une de langue française, l’École élémentaire publique L’Odyssée. Photo : Google Maps.

Déjà bien connu dans la communauté franco-ontarienne, le nom de Trèva Cousineau saura enrichir la toponymie d’Orléans, en remplacement du nom actuel du parc visé qui s’appelle « Glen » et qui est situé au 1756, promenade Grey Nuns.

Je propose que l’inauguration du nouveau nom du parc coïncide avec le 25 septembre et qu’on y installe un drapeau franco-ontarien permanent.

Pour que le nom de cette militante franco-ontarienne infatigable soit perpétué dans la durée, le public est invité à faire valoir son opinion auprès de la ville d’Ottawa sur la proposition de renommer à Orléans le parc Glen à parc Trèva-Cousineau jusqu’au 6 mai prochain.

Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que leurs auteur(e)s et ne sauraient refléter la position d’ONFR et de TFO.