Brandie Wilkerson et Melissa Humaña-Paredes ont fièrement représenté le Canada à Paris. Photo : Mark Blinch/COC

[ENTREVUE EXPRESS]

QUI  

Brandie Wilkerson est une joueuse de volley de plage née à Lausanne d’une mère suissesse francophone et d’un père américain. Arrivée à Toronto à l’âge de 7 ans, c’est au Canada qu’elle a découvert le volley de plage et c’est l’Unifolié qu’elle représente sur la scène internationale avec sa coéquipière Melissa Humaña-Paredes. 

LE CONTEXTE 

La paire canadienne Wilkerson-Humaña-Paredes a réalisé un parcours hors du commun aux Jeux olympiques de Paris, ponctué d’une médaille d’argent après être passée par la phase de repêchage.

L’ENJEU 

La seule médaillée franco-ontarienne tous sports confondus des JO, revient pour ONFR sur son parcours, partageant ses émotions aux différentes étapes de la compétitions et les solutions qu’elles ont été en mesure de trouver avec sa partenaire pour jouer leur meilleur jeu au meilleur moment.

« Près de trois semaines après votre médaille d’argent, quel est votre sentiment à froid sur cette performance? 

Maintenant que le temps est passé, je suis de plus en plus heureuse. Lorsque nous étions aux Jeux, nous étions focalisées sur la compétition, on ne pensait qu’à nos performances. Et même la finale, nous l’avons perdue, ça a été difficile de finir le tournoi comme ça.

Dans les premiers jours après celle-ci, c’était dur de réaliser ce que nous avions fait. Mais maintenant, avec le temps, après avoir parlé avec ma famille, mes amis et être rentrée à la maison, je suis très contente, très fière et très heureuse de ce qu’on a accompli. On l’a fait pour nous, mais aussi pour le sport, pour le Canada. Il y a plein de personnes qui ont été inspirées par ce qu’on a fait, donc, aujourd’hui, je considère ça vraiment comme quelque chose de spécial. 

Brandie Wilkerson et Melissa Humaña-Paredes ont remporté la première médaille olympique de l’histoire du volley de plage féminin canadien. Photo : Leah Hennel/COC

Revenons sur la compétition. Tout n’a pas très bien commencé avec cette troisième place dans la phase de groupe, qui vous a obligées à passer par les repêchages. Quel était votre état d’esprit à ce moment-là? 

Ce n’était certainement pas le plan que nous avions prévu de passer par cette phase de lucky losers. On n’avait jamais joué ce match. On n’avait jamais commencé un tournoi comme ça…

Mais après, c’est comme ça. C’est les JO. Je crois que toutes les équipes ont connu des moments difficiles. Pour nous c’était au début, mais cela nous a permis d’avoir des discussions honnêtes et dures entre nous et avec notre équipe, pour déterminer ce qu’on devait faire pour accepter ce challenge, dont nous étions nous-mêmes à l’origine. Après ça, on était plus proche et on a joué plus en équipe.

Est-ce qu’une sorte de doute avait commencé à s’installer?

Il n’y a jamais eu entre Melissa et moi un sentiment qu’on ne pouvait pas trouver un moyen de gagner. C’est juste que ça n’a pas commencé comme on l’avait imaginé. Je crois, de toute manière, que les équipes qui gagnent aux JO sont celles qui sont capables d’utiliser leurs capacités d’ajustement, pour changer de perspective et être en mesure d’utiliser tout ce qui est fait à l’entraînement, au fil des années, dans ces moments. 

Vous avez clairement trouvé les bons ajustements, puisqu’ensuite jusqu’à la demi-finale, vous n’avez plus perdu un set…

On a trouvé notre jeu d’équipe dans ce match contre les Tchèques. En plus, ce qui est drôle, c’est qu’on l’a fait par nous-mêmes. Notre entraîneur nous a dit avant ce match ‘c’est à vous de jouer, vous savez comment jouer’. Il n’a presque rien dit de plus. Il n’a même pas mis en place de plan de jeu. Rien. Il nous a fait prendre conscience que nous devions juste aller sur le terrain et faire ce que nous savions faire. 

Vous avez ensuite éliminé les Américaines en huitième de finale et les Suisses en demi, deux équipes parmi les favorites. Qu’est ce qui a fait la différence? 

C’était deux équipes que nous pensions devoir affronter dans les matchs pour la médaille, mais c’est arrivé un peu plus tôt. Quand on a appris qu’on allait jouer les États-Unis, je me suis dit ‘j’ai de la peine pour elles’ car nous n’avions pas le choix. Nous devions gagner ce match, nous avions travaillé trop dur pour ce moment. Et encore une fois, c’était de notre faute si nous devions jouer une équipe aussi forte aussi tôt. 

Pour ce match, je crois que le fait que c’était nos deuxièmes JO, cela nous a beaucoup aidées dans les moments difficiles. J’ai pu voir chez nos adversaires, qui étaient plus jeunes, que dans certains moments, elles étaient très nerveuses. Il y a certains points cruciaux qu’il faut absolument gagner, et je crois que nous avons tiré profit de notre expérience pour cela. C’était la même chose avec les Suisses, on les a senties nerveuses, alors que nous, de notre côté, nous avions déjà connu des moments très difficiles. Donc, nous étions prêtes pour gagner. On voulait, en plus, faire quelque chose de très grand pour le Canada. Chaque point avait une grande importance pour nous. 

Brandie Wilkerson et sa coéquipière ont livré une finale mémorable, la première de l’histoire de la compétition féminine de volley de plage aux JO à finir en trois sets. Photo : Kevin Light/COC

Pour finir, vous perdez en finale contre les Brésiliennes après un premier set très serré, puis en dominant largement le deuxième, avant de céder dans le troisième. Est-ce que c’est ce premier set qui aurait pu tout changer? 

Ce premier set m’énerve encore un petit peu encore aujourd’hui. On a eu des opportunités pour le gagner. Ensuite, on a bien vu dans le deuxième set qu’on savait ce qu’il fallait faire pour gagner. On était toutes les deux fâchées de ce premier set perdu.

Après, c’est une finale, rien n’est facile. Le Brésil est très fort aussi. Personnellement, je pense qu’on a connu des hauts et des bas durant tout le tournoi. Dans ce match, sur les petits moments où, comme je l’ai dit avant, il faut prendre les points, les Brésiliennes en ont pris un petit peu plus. Ça ne se joue à rien, c’était serré. C’est même la première fois de l’histoire du tournoi olympique que la finale va en trois sets.

Ça s’est joué sur des petits détails. Avec Melissa, ça ne fait que 18 mois qu’on joue ensemble, donc le Brésil qui est ensemble depuis plus longtemps en a tiré profit. Mais je garantie que la prochaine fois, ça ne va pas se passer comme ça! 

En parlant de prochaine fois, quelle est la suite pour vous? Envisagez-vous de poursuivre l’aventure ensemble jusqu’à Los Angeles 2028? 

Oui. Melissa et moi venons juste de commencer ensemble. On veut voir ce qu’on peut faire avec plus de temps. On veut gagner la médaille d’or pour le Canada. Si on pouvait le faire à Los Angeles, là où on habite, ce serait spécial. »