De moins en moins d’immigrants francophones en Ontario
TORONTO – La sonnette d’alarme est tirée pour l’immigration francophone en Ontario. Les derniers chiffres obtenus par #ONfr montrent une nette baisse de l’arrivée de résidents permanents francophones dans la province.
SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @sebpierroz
Selon la mesure utilisée par l’Ontario et mise en valeur par l’Office des Affaires francophones (OAF), il y a eu 2103 nouveaux arrivants francophones dans la province au cours de l’année 2014. L’équivalent de 2,2 % du total des résidents permanents admis.
C’est moins qu’en 2009 au moment du lancement de la mesure, où plus de 3000 nouveaux arrivants francophones (2,9 %) choisissaient l’Ontario comme terre d’accueil. Une proportion qui grimpait même à 3,4 % en 2011.
Chaque année, plus de 100 000 personnes viennent tenter leur chance dans la province la plus populeuse du Canada, principalement à Toronto et à Ottawa.
En réalité, la définition du gouvernement de l’Ontario se veut inclusive. Elle englobe ceux dont la langue maternelle est le français, qui ont choisi le français comme langue officielle parlée au Canada, mais aussi… ceux provenant d’un pays désigné « francophone ». Une donnée pouvant du même coup regrouper des Suisses de langue allemande ou les Flamands en Belgique susceptibles d’immigrer au Canada, mais ne parlant pas français pour la majorité.
« Durant les dernières années, beaucoup de francophones désireux de venir au Canada sont allés s’installer à l’ouest du pays, notamment en Alberta », explique Luisa Veronis, professeure de géographie sociale à l’Université d’Ottawa.
Outre la mesure utilisée par le gouvernement de l’Ontario, plusieurs autres moyens de calculs existent du côté du gouvernement fédéral. Là encore, les chiffres obtenus tendent vers une baisse.
D’après les données transmises par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC), le nombre de nouveaux arrivants francophones est au plus bas depuis 2003. Selon les chiffres, un peu plus de 1555 résidents permanents francophones se sont installés en Ontario en 2014, l’équivalent d’une proportion de 1,62 %.
Ces résultats différents de ceux du gouvernement Ontario s’expliquent sur un point : le palier fédéral compte dans son calcul les immigrants « d’expression francophone » (langue maternelle, langue officielle choisie), mais fait fi du pays francophone d’origine.
« Il faut peut-être juste relativiser un peu tous ces résultats », prévient Mme Veronis. « Les chiffres ne tiennent en effet pas compte de l’immigration secondaire venant des autres provinces. Beaucoup de résidents permanents francophones ayant choisi le Québec comme lieu d’établissement au Canada viennent ensuite s’installer en Ontario. »
Responsabilité fédérale
Dans ces conditions, l’Ontario doit doubler son nombre d’immigrants francophones, si elle veut se conformer à la Loi sur l’immigration en Ontario votée en mai 2015 qui prévoit notamment une « immigration francophone de 5 % ».
La ministre déléguée aux Affaires francophones, Madeleine Meilleur, a de nombreuses fois appelé à un « appui » du gouvernement fédéral en la matière. « La province de l’Ontario collabore avec le gouvernement fédéral et les gouvernements des provinces et territoires en vue d’atteindre la cible en matière d’immigration francophone. La stratégie ontarienne en matière d’immigration a été élaborée en coopération avec la communauté franco-ontarienne, afin de refléter ses besoins », a t-elle fait savoir par courriel à #ONfr, en toute fin de journée, mercredi.
En réalité, l’Ontario ne sélectionne qu’un maximum de 5700 immigrants par année. La majorité des immigrants sont choisis par le gouvernement fédéral.
Mais le fédéral est-il le seul responsable du faible nombre d’arrivants francophones? Pas tout à fait, sous-entend Mme Veronis. « L’Ontario a une responsabilité. Lorsqu’en dehors du Canada, la province fait la promotion de l’immigration, elle se présente dans la très grande majorité du temps comme une province unilingue, et ne met pas en valeur le fait francophone. »
Pour l’universitaire, les ressources doivent être aussi multipliées. « Il faudrait peut-être plus de subventions pour les écoles, les services d’établissement en français. Pour éviter l’assimilation, l’offre de cours en français doit être plus soutenue. »