Des mois d’attente pour un cours de conduite dans le Nord
Vous voulez obtenir votre permis de conduire ou renouvelez votre licence de camionneur et vous vivez dans le Nord de l’Ontario? Prenez votre mal en patience, car suivre un cours de conduite peut parfois prendre de un à huit mois d’attente. Une offre réduite en raison de la COVID-19 qui inquiète les élus concernant la sécurité sur les routes.
À Kapuskasing, les cours de conduite sont passés de quatre fois à deux fois par semaine en plus de voir les heures réduites de sept heures à cinq voire quatre heures par jour. L’attente pour obtenir certains cours peut parfois être de huit mois, soit deux de plus qu’avant la pandémie, explique le maire de Kapuskasing, Dave Plourde.
Même son de cloche à Hearst. Le bureau de licence est seulement ouvert une fois par semaine avec des heures réduites. La ville aimerait pouvoir augmenter le nombre d’heures et de jours disponibles.
« Ça fait des années qu’on demande ça au gouvernement, mais on dirait que géographiquement, ils ne savent pas où on est », déplore le maire de Roger Sigouin
« Si tu manques ton cours, tu attends une autre semaine. En hiver, il ne faut pas qui l’y ait une tempête de neige, car c’est repoussé une autre semaine », ironise M. Sigouin.
À Kapuskasing, le maire Plourde dit n’avoir reçu aucune explication pour le prolongement de ces coupures.
« Ce n’est pas le bon temps pour ça. En ce moment, c’est une accumulation et plus la pandémie s’allonge, plus il va y en avoir. Ce n’est pas un manque de demandes : la demande est là. Il n’y a pas de raison de couper des heures, c’est complètement le contraire. »
Ce dernier affirme que ce genre de situation nuit à l’économie et aux entreprises de sa région.
« On a annulé des cours qui nous donnaient plus de camionneurs. Ce n’est pas en faisant ça qu’on va en avoir plus… Ça n’existe pas, ils (les entreprises) n’ont pas de camionneurs. Il y a certainement une demande et un manque. »
Pour Roger Sigouin, le gouvernement à son rôle à jouer pour réduire la pénurie de camionneurs dans le Nord.
« Quand on parle de l’industrie qui manque de conducteurs et qu’ils ne sont pas capables d’aller prendre leur licence, il y a un problème. Il faut que le gouvernement comprenne qu’il doit donner des services et que quand il donne ça aux compagnies privées, il doit s’assurer qu’elles donnent du service. »
Questionné par ONFR+, le bureau de la ministre des Transports Caroline Mulroney indique que la décision ne revient pas au gouvernement.
« Les écoles de conduite étant des entités privées, le ministère des Transports n’a pas le mandat d’exiger qu’une école de conduite exerce ses activités à un certain endroit, ni d’exiger la fréquence à laquelle elle offre des leçons de conduite. »
Le bureau de la ministre ajoute que les cours de conduite seront autorisés lors de la deuxième étape du plan de déconfinement de la province.
Sécurité routière
De plus en plus de monde dénonce les chauffeurs qui passent par la route 11 et 17, déplorant le manque d’expérience de certains qui nuisent à la sécurité routière, notamment en hiver.
« Nos enfants et adolescents voyagent sur ces mêmes chemins. Les hivers sont déjà inquiétants et là il faudrait laisser des gens qui ne savent pas conduire? Il faut les former comme il faut et faire sur de savoir dans quoi ils (les chauffeurs) s’embarquent. Ce n’est pas en chauffant à Toronto qu’ils vont savoir ce qu’est le Nord de l’Ontario », note le maire Plourde.
Le maire de Hearst croit que le gouvernement doit changer sa stratégie.
« Il y a des gens qui vont sur la route avec aucune expérience et ça, c’est correct pour eux et j’ai amené ce problème-là au gouvernement. Il y a un problème dans la machine. Le gars qui a de l’expérience et qui a un bon papier du docteur et qui est capable de travailler pour encore quatre à cinq ans, pourquoi ne pourrait-il pas continuer? Je n’ai pas eu de réponses à mes questions. »
« Une problématique pour la région »
De son côté, le député du coin Guy Bourgouin dit être débordé de plaintes à son bureau chaque semaine concernant ce problème. Pour lui, Mme Mulroney ne réalise pas que les gens n’ont pas le choix de se déplacer en auto pour aller travailler. Il n’existe pas de service d’autobus ou de train pour les gens du Nord, souligne M. Bourgouin.
« C’est problématique pour la région… C’est inacceptable que, pour nous dans le Nord, on se fasse couper nos heures de services pour accommoder les autres. Le problème est que l’industrie est entourée de ça. On a besoin de ces chauffeurs de camion et des licences. Il y a des petites entreprises qui engagent du monde et qui se font dire « je ne peux pas travailler aujourd’hui, car je ne suis pas capable d’avoir mes licences et je ne sais pas si je vais pouvoir y aller la semaine prochaine » », dénonce le député de Mushkegowuk—Baie James.
Selon ce dernier, la ministre Mulroney se cache derrière le fait que l’achalandage dans d’autres régions de la province est beaucoup plus élevé pour expliquer cette situation dans le Nord.
« Tu ne peux pas nous comparer au Sud. On a moins de population et un plus grand territoire à couvrir. Ils mettent un standard qu’on ne peut pas mettre dans les régions éloignées du Nord. »