Drapeau franco-ontarien : une avancée saluée qui ne fait pas oublier d’autres enjeux au point mort

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TORONTO – Les réactions se multiplient depuis hier, alors que les députés provinciaux doivent plancher une dernière fois, dans les jours qui viennent, sur le projet de loi faisant du drapeau franco-ontarien un emblème officiel de la province. Plusieurs acteurs communautaires et politiques saluent cette étape, sans baisser la garde sur d’autres enjeux plus terre-à-terre.

« C’est une belle symbolique, une occasion de reconnaître officiellement le drapeau », réagit Carol Jolin.

Le président de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) apprécie le calendrier choisi par les progressistes-conservateurs. Le projet de loi privé 182, déposé par la députée Natalia Kusendova, devrait être mis au débat la semaine prochaine et adopté en troisième lecture le 24 septembre, veille du Jour des Franco-Ontariens.

Mais le leader de l’AFO aimerait tout de même voir s’instaurer « un équilibre entre les initiatives symboliques et celles qui concernent les services en français ».

Son institution milite, entre autres, pour la refonte de la Loi sur les services en français. « Ça demeure un enjeu extrêmement important pour la communauté », dit-il, rappelant au parti au pouvoir sa promesse de moderniser cette loi sous l’actuel mandat.

M. Jolin s’inquiète par ailleurs d’un sujet encore plus urgent : la survie des organisations sans but lucratif. Il presse les gouvernements provincial et fédéral à s’engager sur la création d’un fonds de stabilisation afin d’éviter que ces structures ne mettent la clé sous la porte.

« La COVID-19 a eu un impact énorme. Sans cette aide, 12% de nos organismes pourraient disparaître d’ici les fêtes. »

Carol Jolin, président de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario. Source : Twitter

« Bonne nouvelle » et « beaucoup d’enthousiasme »

« C’est avec beaucoup d’enthousiasme qu’on accueille cette nouvelle », lance Soukaina Boutiyeb, la présidente de l’Association des communautés francophones d’Ottawa (ACFO Ottawa). « Le drapeau représente notre communauté et la communauté appartient à la province. C’est n’est que normal que notre province s’attribue également ce symbole. »

Une fois élevé au même rang que le drapeau ontarien, le drapeau devrait flotter en permanence devant le parlement provincial, veut croire Mme Boutiyeb.

La présidente de l’ACFO Ottawa, Soukaina Boutiyeb. Archives ONFR+

« Ce drapeau ne devrait pas être hissé juste le 25 septembre. C’est quelque chose qui doit rester permanent, comme on le voit dans certaines villes. »

« C’est une très bonne nouvelle », abonde Serge Paul, le président de  l’Association des communautés francophones de l’Ontario à Toronto (ACFO-Toronto).

« Il ne faut pas négliger les symboles, car ils influencent les politiques et amènent des actions par la suite. »

« Ça donnera aux anglophones l’opportunité de mieux nous connaître », croit-il, escomptant que l’étendard franco-ontarien gagne en visibilité par sa présence dans les cérémonies officielles, qu’elles soient anglophones ou francophones.

« Ce n’est pas des symboles qu’on veut, mais des actions »

« Un geste symbolique, ça ne nourrit pas nos enfants, ça nous assure pas l’accès aux services en français dans la santé, l’éducation ou la justice », estime, pour sa part, Guy Bourgouin, le porte-parole aux Affaires francophones de l’opposition officielle.

« Je suis le premier à reconnaître que les gestes symboliques sont importants, mais je crois que les mesures concrètes sont encore plus importantes. »

Le député néo-démocrate de Mushkegowuk-Baie James « félicite la députée de Mississauga-Centre [Natalia Kusendova], mais je l’engage aussi à soutenir les autres projets de loi comme celui que j’ai déposé sur la modernisation de la Loi sur les services en français », dit-il, regrettant « l’absence des affaires francophones dans les débats du gouvernement » et « un recul des droits linguistiques ».

« Ce n’est pas des symboles qu’on veut, mais ce sont des actions », ajoute la députée de Glengarry-Prescott-Russell et porte-parole libérale aux Affaires francophones, Amanda Simard.

« Ça fait deux ans que le gouvernement promet de moderniser cette loi. On n’a toujours aucun signe de vie, comme dans tous les dossiers qui touchent la communauté franco-ontarienne. On veut des actions, on veut des lois gravées pour des siècles, pas des drapeaux plantés dans le sol pour quelques années. »