Fermeture du Centre « ON y va » de l’AFRY : un recul pour les services de garde en français

Le Centre ON y va géré par l'AFRY fermera ses portes le 31 décembre. Source: Getty Images

MARKHAM – L’Association des francophones de la région de York (AFRY) fermera définitivement son centre pour l’enfant et la famille ON y va, à la fin de l’année. Ce coup dur pour l’offre de service de garde en français, très limitée au Nord de Toronto, intervient en l’absence de la directrice générale, Nadia Martins, en congé illimité.

« Au cours des derniers jours, l’AFRY a malheureusement dû prendre la décision difficile de mettre fin à ses activités dans le centre ON y va, à Markham, après avoir déployé tous les efforts jugés nécessaires pour assurer la continuité des opérations », a annoncé l’organisme communautaire qui dessert les francophones de la région de York.

En fonction depuis 2018, au sein de l’école élémentaire catholique Sainte-Marguerite-Bourgeoys, l’unique centre de la région proposant des services en français de garde d’enfants jusqu’à six ans, de développement de la petite enfance et de formation au rôle parental, offrira une dernière journée d’activités le 18 décembre, avant de fermer ses portes « de façon permanente » le 31 décembre.

L’affiche teintée de déception annonçant la fin des activités. Source : page FB de l’AFRY

Joint par ONFR+, son président Rémi Nolet met en avant des raisons de performance et de partenariats qui ne répondaient pas aux objectifs fixés par la région, gestionnaire du centre financé par le ministère de l’Éducation.

Dans la dernière année, dominée par la pandémie, seules trois familles fréquentaient le centre de façon récurrente et 96 enfants ont eu accès au moins une fois à ses services.

Des raisons de « performance » avancées par la région

C’est la raison pour laquelle les deux parties ont décidé de ne pas reconduire le contrat de deux ans, qui arrivait à échéance.

« Il y a eu une période de discussions face à la performance du centre et les attentes de la région », confie M. Nolet. « Il était possible de continuer, mais avec beaucoup de choses à traverser, des points de vérification qui auraient dû être faits pour assurer que le centre réponde aux attentes de la région. On avait trop peu de familles (…) et on n’avait pas établi suffisamment de partenariats avec la communauté. »

Rémi Nolet, président de l’AFRY. Gracieuseté

« Pendant les discussions, ils (la région) nous ont aussi reproché de ne pas avoir ouvert le centre suffisamment rapidement lorsque le confinement était terminé. On focusait beaucoup sur le virtuel. Eux, ils voulaient aller vers le présentiel. Mais étant dans une école, il fallait discuter avec le conseil scolaire pour vérifier qu’on suivait tous les protocoles. »

Le centre avait rouvert ses portes le 10 novembre dernier, après une fermeture prolongée liée aux défis imposés par la COVID-19, avant de refermer lors du deuxième confinement, se limitant à des services virtuels et en extérieur, suivant les directives de santé publique.

Une structure inadaptée à la réalité

L’AFRY défendait initialement l’idée d’avoir un service ON y va mobile capable de couvrir les besoins des francophones dispersés en plusieurs endroits de la région, particulièrement au Nord. Évoquée dès 2018 puis dans les derniers mois, cette solution n’avait pas été retenue par la région de York, souhaitant d’abord que l’organisme fasse ses preuves avec un premier centre fixe.

« Ça aurait été le meilleur modèle », estime le président Nolet. « On ne peut pas demander à des parents de se déplacer de Newmarket à Markham tous les jours. »

De nouvelles discussions auront lieu, début 2021, à l’issue de l’entente actuelle, entre l’organisation, la région et la province afin de voir comment offrir ce type de service qui pourrait renaître dans un format mieux adapté.

« L’éducation et les familles sont au cœur de la vitalité de la francophonie de York », insiste le président de l’AFRY pour qui référer des familles francophones à des organismes anglophones n’est pas normal. « On veut les accompagner en français, car si elles commencent à aller chercher ces services en anglais, elles risquent d’y demeurer. »

En attendant, l’AFRY oriente les familles vers les deux garderies restantes d’East Gwillimbury et de Richmond Hill. Les deux éducatrices permanentes du Centre On y va y ont été réaffectées. Aucun poste d’éducatrice n’a donc été supprimé.

Pandémie et direction intérimaire

« L’AFRY se porte bien financièrement et les autres projets continuent à avancer », assure Rémi Nolet, précisant que l’absence de la directrice générale n’est pas liée à la situation actuelle.

« Elle est en congé indéterminé pour des raisons personnelles, avec un retour prévu dans la nouvelle année », escompte-t-il.

Depuis octobre dernier, l’intérim est assuré par Joannie Blais, adjointe aux directions.

« Le conseil d’administration aurait aimé avoir la perspective de sa direction générale permanente face à tout ceci. On a dû se baser sur l’information à laquelle on avait accès pour prendre la meilleure décision. »

La directrice générale, Nadia Martins (à gauche), absente des discussions avec la région de York. Source : Facebook AFRY

Dans un échange de courriels, Kathy Lucky, directrice du Département des services communautaires et de santé de la Région du York, affirme que les familles seront soutenues virtuellement par d’autres programmes ON y va à Markham, mais en anglais. 

Peut-on mettre fin à des services en français en milieu minoritaire pour des raisons de « performance » et demander aux francophones d’utiliser des services anglophones?

Le ministère des Affaires francophones n’a pas souhaité se positionner, mais le ministère de l’Éducation, qui est le bailleur de fonds, s’est montré assez clair dans sa réponse à ONFR+.

« Les gestionnaires (la région de York) doivent atteindre des objectifs clés, notamment s’assurer que les enfants et les familles francophones ont accès aux programmes en français », avertit Ingrid Anderson, coordinatrice des relations médias.