Francophonie : « les grandes questions sont largement réglées », dit un conservateur

Le conservateur Bernard Trottier avec sa famille.

TORONTO – Bernard Trottier, un élu conservateur francophone né en milieu minoritaire, défend le bilan du gouvernement de Stephen Harper en matière de protection du français et de bilinguisme. Les conservateurs ont livré la marchandise pour s’assurer de la vitalité des citoyens de langue française au pays, insiste-t-il.

ÉTIENNE FORTIN-GAUTHIER
efgauthier@tfo.org | @etiennefg

« Je me suis engagé beaucoup avec le Comité permanent des langues officielles et nous avons travaillé et fait des recommandations pour la feuille de route sur la dualité linguistique. La feuille de route mise de l’avant entre 2008 et 2013 a été renouvelée pour cinq ans, car les communautés francophones voulaient du financement à long terme et nous leur en avons donné », affirme Bernard Trottier, qui tente de se faire réélire dans la circonscription d’Etobicoke—Lakeshore, située dans le Grand Toronto.

Bernard Trottier est né à Saint-Paul, en Alberta, d’une famille où l’on parlait le français. Au cours de son mandat, il a fait une tournée des communautés francophones de sa province d’origine. « Ce sont des Gaulois. Les gens qui vivent dans plusieurs des petits villages sont des francophones dont les familles sont arrivées à la fin du 19e siècle. Ce sont des communautés fortes et vaillantes », dit-il. Les enfants de M. Trottier parlent français et fréquentent une école francophone. « On est très fier de nos origines et de notre futur avec le français », dit-il.

À son avis, les électeurs francophones qui vivent en situation minoritaire ne font pas des droits linguistiques une priorité. « Les batailles linguistiques qu’on avait, je crois que ce sont des faits accomplis. Les droits linguistiques sont reconnus et on constate la forte demande pour l’éducation en français. Il y a d’autres enjeux que les francophones regardent. Par exemple, moi, je suis avec les conservateurs pour des raisons économiques. Un grand nombre de francophones sont d’accord avec cette approche », affirme M. Trottier.

En entrevue à #ONfr, Bernard Trottier a amené sur la table le cas de Michel et Lynda Thibodeau qui ont été incapables de se faire servir en français par le personnel de bord d’un vol d’Air Canada. Pour le couple, il s’agissait d’un manquement probant à la Loi sur les langues officielles.

« Quand on se demande si on peut commander un 7-Up dans un avion d’Air Canada, disons qu’on commence à chercher des batailles moins importantes. Vous savez le cas dont je parle. Les grandes questions sont largement réglées, mais si on peut toujours faire mieux », croit quant à lui le député sortant. « La dualité linguistique du Canada est un fait accompli et tout le monde le sait », tient-il à ajouter.

 

L’immigration, une priorité

L’enjeu de l’immigration francophone est une priorité de l’avis de Bernard Trottier. « Il y a plus de fonds mis en immigration. Si on veut que la francophonie aille un futur dans les autres provinces, il faut mettre l’accent sur une bonne politique d’immigration et veiller à l’intégration des immigrants », dit le conservateur. La cible de 4,4 % d’immigrants francophones peine à être atteinte, mais demeure importante selon lui.

« C’est un bon défi d’avoir cette cible. Mais la réalité avec l’immigration, c’est que les pays d’où viennent nos immigrants viennent surtout d’Asie », dit M. Trottier.

Le premier ministre sortant, Stephen Harper, commence plusieurs de ses discours à l’étranger dans la langue de Molière. Bernard Trottier estime que son chef devrait être une inspiration pour d’autres Canadiens qui ont l’anglais comme langue maternelle.

« Le premier ministre ne vient pas du tout d’un milieu francophone. Mais comme adulte, il a appris la langue française. Il a fait une belle démarche, c’est un symbole pour les autres citoyens qui peuvent eux aussi apprendre le français », estime M. Trottier.

Plusieurs candidats francophones qui se présentent dans des circonscriptions majoritairement anglophones utilisent des pancartes électorales bilingues. Bernard Trottier a fait un choix différent, les siennes sont uniquement en anglais.

« Dans une circonscription comme Etobicoke-Lakeshore, le français est peut-être la 9e ou la 10e langue la plus parlée. Je pourrais avoir des affiches en polonais, ukrainien, chinois, tibétain, mais la lingua franca ici est l’anglais, c’est une réalité », répond-il à ce sujet.

Lors du scrutin de 2011, Bernard Trottier avait battu le chef libéral Michael Ignatieff par 2896 voies. Il avait reçu l’appui du maire de Toronto de l’époque Rob Ford, qui n’avait pas encore été éclaboussé par la plupart des scandales qui l’ont ensuite touché.

« Ce n’est pas à cause de son appui que j’ai gagné », dit aujourd’hui Bernard Trottier, qui a appuyé John Tory lors de la dernière élection municipale. M. Trottier dit ne plus avoir de contact avec l’ancien maire Ford et de ne pas avoir reçu son appui cette fois-ci.