La reprise du tourisme fait du bien dans le Nord de l’Ontario

La reprise du tourisme fait du bien aux établissements touristiques du Nord. Crédit photo : Voyageur Wilderness Program.

Après deux étés marqués par la pandémie, la saison estivale de cette année est vécue comme un vent de fraîcheur pour les entreprises de l’industrie touristique du nord de la province. Si les établissements à taille familiale profitent majoritairement de la reprise des activités et la fin des mesures sanitaires, même si l’ombre de la pandémie continue de planer sur l’industrie.

« Ça va être peut-être notre meilleure année depuis 11 ans qu’on a commencé », se réjouit Carole Wolfe, propriétaire du Joli Voyageur Resort and Campground situé dans le canton de Lavigne à Nipissing Ouest.

Celle qui dirige l’établissement proposant des espaces de camping, des chambres d’hôtes et des maisons de campagne dit déjà afficher complet jusqu’en septembre prochain.

Du côté de Marc-André Therrien, co-propriétaire et fondateur du restaurant et de la microbrasserie Whiskeyjack Beer Company à Temiskaming Shores, l’achalandage est monté en flèche dès la fin de la saison scolaire.

Situé à proximité du Lac Témiscamingue, le jeune entrepreneur originaire de Kapuskasing dit profiter de la reprise de la circulation maritime dont son établissement bénéficie largement. « Il y a plus de bateaux, plus tôt que l’été plus tôt dans la saison donc c’est très encourageant pour cet été. »

Même si l’établissement bénéficie d’une clientèle locale très fidèle depuis le début de la pandémie, les clients de l’Abitibi, du Québec et du Nord de l’Ontario n’ont pas tardé à être retournés profiter de sa terrasse.

La clientèle internationale absente

Malgré l’ouverture des frontières internationales, les touristes internationaux n’ont, quant à eux, pas encore étés nombreux à poser leurs bagages dans les établissements hôteliers et de villégiatures du Nord.

C’est le cas du côté du Voyageur Wilderness Program (VWP) proposant des logements et expériences de canots écoaventure, culturelles et basées dans la nature offertes dans le nord-ouest de la province, près de Atikokan.

Selon la propriétaire de cet établissement niché sur une île isolée de 5 acres dans le territoire des Nations métisse et Achinabe, Michelle Savoie, cette saison marque avant tout le retour des touristes voisins américains et des manitobains.

Michelle Savoie dans sa pourvoierie de l’île Voyageur. Crédit photo : Voyageur Wilderness Program.

Accueillant avant la pandémie un grand nombre de clients du Japon dans le cadre du programme »Global Experience Japan », de l’Europe ou encore de l’Australie, ce début de saison la clientèle internationale est inexistante.

« Ces visiteurs ne sont pas revenus, évidemment, parce que leurs pays sont encore dans des vagues de COVID-19 alors c’est difficile de revenir faire du tourisme si son propre pays souffre encore de la pandémie », reconnaît la propriétaire métisse.

De nouvelles habitudes de voyage

Carole Wolfe dit s’estimer heureuse de ne pas avoir perdu de clientèle depuis la pandémie et avoir même gagné de nouveaux adeptes du camping. « On a eu de nouveaux clients qui n’ont jamais campé et qui ont commencé parce qu’avec la covid il y avait pas grand-chose qu’ils pouvaient faire et puis là, ils sont devenus fidèles. »

Carole Wolfe en compagnie de son mari Rodney Wolfe, co-propriétaire du Joli Voyageur Resort & Campground à Lavigne. Gracieuseté.

Elle constate aussi que les clients choisissent de réserver plus de nuitées qu’avant la pandémie. Elle l’explique notamment par la montée du prix du gaz.

« Avant il y avait des gens qui arrêtaient un soir puis cette année les gens restent 3, 4, 5 soirs donc on est vraiment chanceux », lance la propriétaire originaire de Sturgeon Falls.

Des ajustements nécessaires

Après deux années de plusieurs vagues épidémiques, les propriétaires des établissements liés au tourisme ont dû procéder à des changements dans leur manière de travailler comme Marc-André Therrien.

Il a notamment décidé de supprimer les réservations : « Ça mettait beaucoup de pression sur les clients pour arriver à l’heure avec les limites de capacité, donc maintenant c’est premier arrivé premier servi, on peut tourner les tables beaucoup plus rapidement donc c’est mieux pour les clients et les serveurs », affirme-t-il avant d’ajouter avoir également mis en place un système de commande en ligne.

Avec une mission écologique incluant des douches et des salles de bains centrales, Michelle Savoie a dû faire installer un système de ventilation et davantage de services dans les sanitaires dans son établissement.

Du côté du Joli Voyageur Resort and campground, les formalités d’accueil se font désormais à l’extérieur et les salles de bain sont utilisées de manière alternée afin de limiter le nombre de personnes dans les salles d’eau.

Des difficultés du Nord

La pénurie de travailleurs n’épargne pas le Nord et Michelle Savoie en sait quelque chose. Elle a dû jouer avec des désistements de potentiels employés à la dernière minute. Selon elle, l’isolement particulier de son établissement est un frein au recrutement, à fortiori celui saisonnier.

À cela s’ajoutent la difficulté d’approvisionnement et le besoin de se coordonner et faire des prévisions de matériel.

La clientèle reste malgré tout compréhensive quand les délais de service sont longs. « On est en train de s’adapter, mais les gens sont vraiment bons avec nous », affirme-t-elle en ajoutant que ceux-ci sont heureux d’arriver dans la nature.

« On fait beaucoup plus avec moins d’employés », déclare Marc-André Therrien qui a choisi, pour sa part, de travailler avec une plus petite équipe. La difficulté d’embaucher a tout de même permis, selon lui, de revoir la manière de travailler et d’être plus efficace sur le plancher.

Marc-André Therrien, copropriétaire du Whiskeyjack Beer de Hayleybury offrant des bières fraîchement brassées. Gracieuseté.

Même son de cloche chez Carole Wolfe : « On avait moins de choses à leur donner à faire et plus pour nous donc on n’avait pas besoin de plus de monde, mais moins », confie-t-elle.

La menace des feux de forêt pèse aussi sur des établissements comme le VWP qui a été durement touché en août de l’été passé quand il a fallu faire évacuer l’île. Si le scénario se répétait, ce serait catastrophique selon Michelle Savoie.

Avec une fréquentation loin des niveaux de l’ère prépandémique, son établissement risquerait de ne pas s’en relever. « Si ça frappe de nouveau, ça va être vraiment dur, mais on va espérer qu’il va pleuvoir suffisamment », finit-elle.