Cet élargissement permettra à 8500 nouveaux magasins de vendre de l’alcool. Source : Canva

TORONTO – Comme souhaitait le faire le premier ministre ontarien Doug Ford en 2018, avec sa campagne « Buck a beer » (une bière à un dollar), l’alcool, dont le vin, la bière et les boissons alcoolisées, sera disponible dans les épiceries, les dépanneurs et les grandes surfaces de l’Ontario dès le 1er janvier 2026.

Pour la première fois en Ontario, les consommateurs pourront se procurer de la bière, du vin, du cidre, des coolers, sodas alcoolisés prêts à boire à faible teneur en alcool dans tous les dépanneurs, les épiceries et magasins à grande surface participants.

« Nous avons promis à la population de l’Ontario de leur offrir plus de choix et de commodité. Aujourd’hui, nous tenons cette promesse. Il n’y a aucune raison pour que les consommateurs ontariens ne puissent pas bénéficier de la même expérience d’achat que les Canadiens de toutes les autres provinces lorsqu’ils veulent se procurer du vin pour une réception ou une caisse de bières ou de sodas alcoolisés en se rendant au chalet », a déclaré le premier ministre Doug Ford.

Cet élargissement permettra à 8500 nouveaux magasins de vendre de l’alcool. La LCBO (Liquor Control Board of Ontario), qui avait jusque-là un monopole, continuera de vendre les spiritueux tels que la vodka, le gin et le whisky, et restera le fournisseur exclusif de tous les détaillants, bars et restaurants.

The Beer Store conservera quant à lui son rôle principal de distributeur de bière aux bars et restaurants jusqu’en 2031, dans le cadre d’une période de transition.

Le premier ministre Doug Ford lors de la conférence de presse à Etobicoke, depuis les rayons d’un dépanneur. Crédit image : Compte X officiel de Doug Ford

Le premier ministre ontarien dit que le gouvernement veillera à assurer une transition stable et responsable vers « un nouveau marché qui favorisera les produits fabriqués en Ontario et les emplois locaux ».

Ce nouveau plan implique en effet entre autres la mise en place de prix concurrentiels pour favoriser la concurrence et offrir des prix plus avantageux aux consommateurs, le retrait des exclusivités de formats d’emballage et un investissement de 10 millions de dollars sur cinq ans alloués au ministère de la Santé pour la santé publique.

Pour aider les producteurs de la province, le gouvernement indique qu’il mettra en place une série de mesures transitoires, notamment des exigences d’espace d’étalage pour favoriser les producteurs artisanaux.

Cela comprendra également la suppression de la taxe de base de 6,1 % sur le vin vendu dans les établissements vinicoles, permettant à l’Ontario d’être plus compétitif par rapport aux autres provinces.

La Commission des alcools et des jeux de l’Ontario continuera à gérer l’octroi des licences pour la vente d’alcool.

Des réactions mitigées

« L’annonce d’aujourd’hui constitue une excellente nouvelle pour les dépanneurs de l’Ontario. L’élimination des restrictions désuètes sur la vente de la bière, du vin, des coolers et des boissons prêtes à boire créera de nouvelles sources de revenus pour nos entreprises locales et répondra aux demandes des clients au sein d’un marché de plus en plus concurrentiel », a déclaré la présidente et chef de la direction du Conseil canadien de l’industrie de dépanneurs, Anne Kothawala.

« Il s’agit d’une victoire majeure pour les vignerons et les travailleurs de l’industrie vinicole de l’Ontario, en particulier dans la région du Niagara », s’est réjoui le député néo-démocrate de Niagara Falls Wayne Gates.

« Le Niagara est la plus grande région viticole du pays et contribue pour plus d’un milliard de dollars au PIB du Canada. L’élimination de cette taxe de base aidera l’économie de Niagara et créera davantage d’emplois pour les résidents », ajoute-t-il dans un communiqué, rappelant qu’en 2018, il avait déjà déposé un projet de loi visant à supprimer à la taxe de 6,1%.

Le député de Sudbury Jamie West, porte-parole de l’opposition officielle en matière de travail, a rappelé que « les emplois de milliers de travailleurs syndiqués sont en jeu et nous devons veiller à ce que la transition se fasse de manière à ne laisser personne de côté ».

« Il y aura des impacts uniques sur les régions rurales et le nord de l’Ontario, où les retours de bouteilles et de canettes sont centralisés par l’intermédiaire des services des magasins de bière », a déclaré M. West. « Nous devons nous assurer qu’un plan est en place pour que les habitants du Nord ne soient pas encore une fois laissés pour compte par ce gouvernement. »

Aux questions des journalistes s’interrogeant sur la sécurité des usagers plus exposés à l’alcool, dès le matin, à la station-service par exemple, le premier ministre ontarien répond : « Nous devons traiter les gens comme des adultes et avoir confiance en eux. Nous sommes le seul endroit au monde qui limite encore cette vente. »

Plusieurs associations de santé mentale et d’addictions ont réagi, notamment l’Association canadienne pour la santé mentale, Santé mentale pour les enfants et Addictions & Mental Health Ontario, expliquant que l’augmentation du nombre de points de vente d’alcool augmente les conséquences négatives sur la santé, notamment la violence, les blessures, les accidents liés à l’alcool et les décès par suicide.

« Malgré ces preuves de plus en plus nombreuses, le gouvernement de l’Ontario a déjà considérablement amélioré l’accès à l’alcool, en augmentant le nombre de lieux de disponibilité, en prolongeant les heures d’ouverture et en modifiant les règles des restaurants et des bars », déplorent ces associations.

Elles rappellent notamment qu’en Ontario, les coûts des soins de santé associés à l’alcool ont augmenté de 35 % sur une décennie, passant de 1,73 milliard de dollars en 2010 à 2,3 milliards de dollars en 2020.

L’Ontario Safety league craint la disponibilité de boissons alcoolisées à base de liqueur forte, dans les stations-service par exemple, et l’impact sur la sécurité routière notamment. Il pointe également du doigt la ressemblance des emballages de certaines marques entre les versions alcoolisées et non alcoolisées et la confusion et l’exposition possibles pour les enfants et des jeunes.

« Nous demandons au gouvernement de repenser à deux fois ses plans avant d’étendre l’accès de l’alcool, notamment les boissons à base d’alcool fort dans les dépanneurs », exhorte l’organisme.

Comparatif réalisé par Ontario Safety League entre des marques de boissons dont les versions alcoolisée et non alcoolisée pourraient prêter à confusion, selon l’organisme. Source : Ontario Safety League