« Le gouvernement est déconnecté du Nord », dénoncent des élus du Nord-Est et l’opposition
SUDBURY – Des critiques envers le gouvernement provincial se sont fait entendre lors de la 61e conférence annuelle de la Fédération des municipalités du Nord-Est de l’Ontario (FMNO). Pour des membres de l’opposition comme pour certains élus de petites municipalités, les efforts de la province seraient dirigés davantage vers le Sud, au détriment du Nord.
« Le gouvernement est déconnecté du Nord. Ils (les progressistes-conservateurs) ont l’habitude d’ignorer les particularités de cette région, ils montrent de l’intérêt quand ils veulent mais quand il faut agir, ils disparaissent », a lancé Marit Stiles, cheffe du Nouveau Parti démocratique de l’Ontario et porte-parole de l’opposition, ce mardi à Sudbury.
Au deuxième jour de la conférence, son allocution, dont la moitié a été faite en français, a trouvé un écho parmi les quelque 200 élus et représentants de municipalités du Nord Est présents dans la salle.
En entrevue avec ONFR, Marit Stiles et Jamie West, député néo-démocrate de Sudbury, dénoncent entre autres le fait que la province aurait comptabilisé les lits de soins de longue durée et lits de résidence universitaire dans le calcul des municipalités pour atteindre les cibles en matière de logement.
La maire de Fauquier-Strickland, une municipalité de 142 habitants située sur la route 11, se dit en accord avec les propos de Mme Stiles qui est, selon elle, celle qui fut la première à aborder les enjeux spécifiques du Nord.
« Ils disent qu’ils ont investi de l’argent pour construire des logements… Nous on l’a pas ressenti. Le pourcentage c’est facile à dire mais c’est le Sud qui va avoir le mérite », confie Madeleine Tremblay.
La maire de la ville depuis 18 ans estime qu’il faudrait que la province appuie davantage les municipalités : « C’est beau de bâtir du logement abordable, mais c’est ceux qui existent déjà qui vont avoir besoin d’amour, et ça ne devrait pas sortir des fonds des municipalités. »
Un transfert néfaste des coûts vers les municipalités
Également de passage, la cheffe du Parti libéral de l’Ontario et ex-mairesse de Mississauga, Bonnie Crombie, en a profité pour fustiger le gouvernement Ford : « Les politiciens de Queen’s Park devraient passer plus de temps dans les régions comme le Nord pour comprendre qu’il y a des besoins très spécifiques ici. »
« Les enjeux des soins de santé mentale et du sans-abrisme ont été injustement transférés aux municipalités alors que c’est le rôle de la province de financer ces institutions », livre-t-elle avant d’ajouter que « les municipalités ne peuvent pas vivre sur du déficit comme le fait la province avec 9 milliards de dollars de déficit ».
« C’est sûr qu’ils (le gouvernement) n’en font jamais assez, surtout pour une petite municipalité comme la nôtre, mesure Jacques Dorval, maire d’Opasatika. On a des besoins plus grands parce que nos revenus en taxes ne sont pas aussi élevés que les autres villes et on a pas la même population. »
Le maire de la ville située à 30 minutes au nord de Kapuskasing dit avoir profité de l’événement pour approcher les ministres Stan Cho (Soins de longue durée) et Graydon Smith (Richesses naturelles et Forêts), présents le premier jour, afin d’obtenir de l’appui dans certains dossiers.
L’argent du Nord va vers le Sud
« Personne au niveau du gouvernement provincial n’a tenu compte des disparités géographiques pour avoir accès à des soins de santé », a déclaré Robin Jones, présidente de l’Association des municipalités rurales de l’Ontario (AMRO) devant l’assemblée des élus.
« C’est important pour les gens qui ne sont pas dans le Nord ou des zones rurales, nous n’avons pas les mêmes enjeux », a ajouté celle qui est aussi la mairesse de Westport.
Le conseiller municipal du quartier 1 Sudbury, Mark Signoretti, regrette le fait que l’industrie minière, dont l’exploitation a des conséquences sur l’état des infrastructures et des routes du Nord, ne profite qu’au Sud.
Et d’ajouter : « Ce que je vois, c’est que l’extraction des minéraux critiques bénéficie surtout au Sud, à Toronto ou à l’Est à Ottawa, les revenus ne restent pas dans le Nord. »
Le maire de Cochrane et président de l’Association des municipalités du Nord-Est de l’Ontario, Peter Politis, est du même avis : « Nous avons besoin qu’une partie de l’argent des contribuables qui quitte nos communautés revienne pour contribuer à la mise en place d’infrastructures sociales. »
Routes, infrastructure : d’autres enjeux communs
D’autres ont déploré le fait que le gouvernement n’est pas allé de l’avant dans sa promesse d’instaurer quatre voies sur la route 69 ou encore l’absence d’opérations de déneigement sur la route 11.
L’absence de financement au niveau des projets d’infrastructure dans les petites localités retarde d’importantes rénovations sur les routes.
« ll n’y a pas de financement pour cela. Nous avons besoin de l’aide du gouvernement chaque fois que nous devons faire quelque chose parce que nous sommes une si petite communauté », constate Bill Rosenberg, maire de Thessalon, bourgade de 1260 habitants.
La lourdeur du processus de demande de subventions provinciales a aussi des conséquences, comme en témoigne Debbie Rydall, trésorière de la ville située à une heure de route de Sault Ste. Marie avec le cas du pont de la rivière Thessalon sur l’autoroute 17B.
« Nous avons obtenu du financement, ce qui est exceptionnel, mais entre le moment où nous avons reçu l’annonce, et celui où nous avons lancé l’appel d’offres, les coûts ont augmenté de plus d’un million de dollars », indique-t-elle en expliquant que la petite municipalité devra donc débourser 2,8 millions, dont 1,6 de son propre budget.
Ce mercredi matin aura lieu l’assemblée générale annuelle de l’organisme, un rapport sera ensuite envoyé à la province avec des recommandations. 110 municipalités font partie de la FMNO, seules six n’en font pas partie dans le Nord-Est.