Le temps des fêtes, une période éprouvante pour des étudiants internationaux de l’Ontario
Moments de retrouvailles en famille, célébrations au coin du feu ou du sapin, tables ornées de repas réconfortants de la saison… Le temps des fêtes peut avoir l’air un peu différent pour les étudiants internationaux. D’un coin à l’autre de l’Ontario, ils nous racontent à quoi ressemble cette période souvent teintée de solitude et de mal du pays.
Travailler le jour de Noël dans une petite commune de l’Ontario, c’est une réalité pour beaucoup de jeunes étudiants internationaux comme Serigne Mbacke Ngom.
Le jeune homme originaire du Sénégal en a l’habitude puisqu’il s’agit déjà de son quatrième temps des fêtes au Canada. Cette année, il y voit une opportunité de récolter plus de fonds pour l’année à venir.
« Le gouvernement a diminué le nombre d’heures de travail pour les étudiants internationaux (durant les périodes de cours), donc on profite du temps des fêtes pour travailler plus et économiser plus d’argent », explique-t-il en référence au retour d’un plafond du nombre d’heures de travail permises pour les étudiants hors du campus depuis l’automne.
L’année dernière, l’étudiant en Baccalauréat en administration des affaires avait tout de même voulu marquer le coup : « L’année passée, je suis resté à Hearst, on avait juste fait un petit dîner avec mes deux amis internationaux vu qu’ici il n’y a pas grand-chose à faire ici. »
Même constat à Toronto pour Nathalie Kuesso Keho Nimpa qui se prépare aussi à passer son quatrième Noël en terre canadienne. Pour la jeune femme originaire du Cameroun, il n’est pas non plus possible de rentrer au pays cette année.
Une décision motivée par le fait que la période est trop petite et le retour au Canada en serait rendu plus difficile émotionnellement.
« La première année où je suis arrivée, j’avais travaillé, je ne savais même pas que c’était possible de travailler à Noël donc c’était encore plus difficile de le vivre en voyant les autres en famille », confie-t-elle avant de préciser que beaucoup d’étudiants choisissent de travailler les jours fériés car le salaire y est majoré.
Une intégration difficile
Celle qui étudie en quatrième année en cultures numériques à l’Université de l’Ontario français se sent pourtant très nostalgique de cette période célébrée de manière très différente en Afrique.
« Au Cameroun, c’est une fête strictement religieuse autour de concerts et d’activités de commémorations de la nativité du Christ alors qu’ici c’est plus une célébration avec un dîner de Noël en famille », raconte-t-elle.
Ariane Goun, d’Ottawa, partage le même avis : « Quand on parle de Noël, on parle de la charité, mais ici les personnes sont beaucoup plus solitaires et repliées sur elles-mêmes alors que dans moi mon pays, en Côte d’Ivoire, ce n’est pas forcément le cas. »
Après trois temps des fêtes au Canada, l’étudiante de 27 ans juge que l’intégration y est plus difficile qu’en Afrique.
« J’ai remarqué que si tu veux vraiment discuter avec des personnes d’ici, il faut appartenir à une communauté comme faire du bénévolat ou d’autres activités de groupe. Le premier contact n’est pas facile. »
L’étudiante en deuxième année au baccalauréat en éducation a constaté la même chose à l’Université d’Ottawa : « Dans le programme d’éducation, beaucoup plus de personnes noires, donc les quelques Canadiens qu’on rencontre restent plus entre eux. L’inclusion est moins palpable. »
Comme l’année précédente, la jeune femme n’a pas de programme prévu pour le réveillon du Nouvel An, mais elle compte le passer avec sa sœur, qui habite également la capitale nationale.
« Bien que j’aie un parent ici, je sens quand même le manque de mes parents surtout avec le climat très froid qui accentue la solitude. »
Choc de cultures
L’intégration à des événements du temps des fêtes peut aussi s’avérer un peu complexe lorsqu’on ne partage pas les mêmes coutumes.
« Parfois la religion peut être un obstacle, parce que comme des fois tu peux avoir des amis de la région pour t’inviter à voir à boire, mais moi, comme je suis musulman, je préfère m’abstenir », reconnaît Serigne Mbacke Ngom.
Chafik El Aji, habitant à Sudbury, aimerait toutefois vivre ce temps des fêtes comme les locaux, « découvrir le vrai Noël, avec l’imagerie autour du Christ, les décors et tout ça, mais c’est malheureusement difficile à réaliser », se désole l’étudiant au Collège Boréal qui dit être gêné par l’aspect plutôt commercial que revêt le temps des fêtes ici.
« Chez nous, au Maroc, dès qu’on a une fête et qu’on sait qu’une personne est seule, on va l’inviter et lui faire vivre ces célébrations, mais ici, les personnes préfèrent le passer avec leur famille ou entre membres de la même communauté. »
Le jeune homme compte y remédier lui-même en préparant une soirée très spéciale pour des amis, eux aussi loin des leurs.
Pour l’occasion, sa maman compte lui envoyer des repas depuis le Maroc et lui-même se rendra à Montréal afin de faire le plein de produits orientaux qui sont introuvables dans le Nord ontarien.
« Le but c’est de sentir l’ambiance du pays et du partage, car mes amis aussi vont ramener des plats de chez eux, et puis comme j’ai aussi dix années de disc-jockey derrière moi, je vais mixer avec de la bonne musique », anticipe l’étudiant en génie civil et minier dont ce sera le premier temps des fêtes.