Les lauréats du concours C’est quoi ton scoop dévoilés

Emmanuelle Gingras a remporté le concours devant Mélodie Maxwell et Nathalie Kuesso. Photomontage ONFR+

L’automne dernier, ONFR+ lançait le concours C’est quoi ton scoop destiné à dénicher la relève des journalistes en Ontario français chez les 18-22 ans. Emmanuelle Gingras, Mélodie Maxwell et Nathalie Kuesso ont su se démarquer avec la production d’un article et d’une vidéo que l’on découvre ici.

L’Éducation sexuelle en Ontario : un problème non résolu

Par Emmanuelle Gingras, gagnante du Concours

Le curriculum d’éducation sexuelle n’est pas prioritaire dans les débats en Ontario, qui est actuellement en pleine période d’élection… Et pourtant! Peut-on vraiment affirmer que les jeunes Franco-Ontariennes ont accès à une éducation sexuelle optimale, à ce jour?

L’Ontario est doté de l’un des curriculums les plus complets au Canada, souligne Frédérique Chabot, directrice d’Action Canada pour la promotion en santé et les droits sexuels. Pourtant, ce dernier ne serait toujours pas à la hauteur des lignes directrices canadiennes et internationales.

Il semblerait que les notions du consentement et de relations saines, de l’orientation sexuelle ou alors de l’identité de genre ne concernent pas les droits fondamentaux à la santé des jeunes. La preuve : anciens comme nouveau curriculum permettent aux parents de retirer leurs enfants des cours traitant de sexualité.

Malgré le fait que 87 % (étude anglophone) des parents croient que leurs enfants devraient y avoir accès, le curriculum est loin d’être complet, et ce, en raison d’une propagande de promiscuité. On parle des risques, mais pratiquement pas des actes sexuels ni de l’émancipation par rapport à tout principe qui ne correspondent pas aux croyances catholiques. On nous enseigne : « Le meilleur moyen de contraception est l’abstinence! », « Non à l’abus sexuel et non à l’épanouissement sexuel! », et dans les écoles catholiques : « Nous sommes des êtres sexués, filles et garçons, femme et hommes! ».

C’est un mythe de croire que de parler de sexe « pervertis » les jeunes. C’est éviter d’en parler et de seulement soulever ses dangers qui mettent à risque leur sécurité physique… et sociale.

Bertrand (nom fictif), qui enseigne actuellement dans une école primaire catholique francophone en Ontario, se sent toujours dans l’obligation de cacher son homosexualité, en raison du cadre religieux. Ce dernier croit qu’« il y a place à améliorer » le curriculum actuel, et qu’il est absurde que la notion de l’identité de genre ait été déplacée de la 3e année vers la 7e année.

Bertrand connaît lui-même les impacts que cela peut avoir, et parle d’expérience. Lorsqu’il était au primaire, il a subi de l’homophobie et de l’intimidation relative aux stéréotypes genrés. À savoir qu’on peut commencer à avoir un sens inné de son genre avant l’âge de cinq ans. « Se le faire enseigner seulement au secondaire n’a aucun bon sens. On n’enseigne pas à respecter les droits et l’intégrité de [tout le monde] », se révolte Mme Chabot.

N’oublions pas aussi qu’en Ontario, parler de ces sujets revient dans la majorité des cas aux enseignantes, alors qu’il n’existe presque aucune ressource pour les soutenir dans la communication de ces informations, ni de mécanisme en place pour assurer qu’elles soient transmises de façon effective, comme le mentionne aussi l’experte. Surtout en français!

Toutefois, et heureusement, l’Ontario est la première province qui obligera tous les éducateurs et éducatrices agréés à suivre un programme de prévention de violence sexuelle à partir de septembre prochain! Vivement continuer de se concentrer sur les risques du sexe plutôt que de comprendre la source de ces violences! De comprendre que, dans la plupart des cas, elle se produit en raison du silence et de l’ignorance.

Nous avons tous le droit, ici en Ontario, de s’abstenir d’avoir des rapports sexuels, et nous avons aussi le droit de nous abstenir de protéger nos jeunes. Nous avons le droit de ne pas souhaiter leur émancipation, de nous approprier leur identité et de les faire subir l’ignorance. Depuis toujours, nous avons le droit de ne pas leur faire connaître et accéder à leurs droits… il est temps que ça change.

Voici la vidéo envoyée par Emmanuelle Gingras.

L’industrie du mariage, tout un univers

Par Mélodie Maxwell, mention spéciale du jury

Derrière un mariage se cache une industrie qui pourrait produire 2 milliards de dollars en 2022 en Ontario, selon HelloSafe. Elle est composée de planificateurs, de traiteurs, de salles de réception, de photographes, de coiffeurs, de maquilleurs, de compagnies de décoration et de tenues de mariage, de DJ ou musiciens, de photo booth et plusieurs autres.

Tous ces services varient entre 100 et 10 000 $. Les services les plus dispendieux sont le traiteur et la salle de réception, qui peuvent coûter jusqu’à 9 640 $, d’après HelloSafe, et en moyenne, un mariage en Ontario coûte entre 20 000 $ et 40 000 $. 

L’industrie qui produit beaucoup d’argent en Ontario souffre depuis l’arrivée de la COVID-19. Plusieurs ont annulé et reporté leur mariage à différentes reprises, ce qui a causé une perte de plus de 780 millions de dollars en 2020 et seulement en Ontario.

D’ailleurs, Ottawa a connu une baisse significative de couples mariés depuis les deux dernières années. Dans le tableau ci-dessus, on peut voir une baisse de 86 % dans les mariages à l’hôtel de ville d’Ottawa ainsi qu’une diminution de 56 % au sein de l’Archidiocèse d’Ottawa-Cornwall et ce, entre les années 2019 et 2020. 

Non seulement la pandémie a annulé des mariages, mais elle a aussi annulé les deux plus gros salons du mariage à Ottawa : le Capital Wedding Show et le Ottawa Wedding Show. C’est un événement dans lequel plusieurs services de mariages se rassemblent dans une salle et vendent leurs services aux futurs mariés. Avec l’absence des salons, la communauté de l’industrie du mariage a été obligée de s’adapter et de trouver de nouvelles façons de vendre ses services. 

« Les salons du mariage étaient la place où les gens allaient magasiner », affirme Lexine Ménard, propriétaire de LexiBooth. « On a dû se rediriger vers les médias sociaux et investir dans des publicités en ligne, ce qui est moins gagnant parce que les gens ne peuvent pas nous rencontrer et découvrir la vraie expérience LexiBooth. » 

Après deux ans d’absence, le Ottawa Wedding Show a finalement eu lieu l’automne dernier, et le Capital Wedding Show a rouvert ses portes le 12 et 13 février dernier, mais il a presque été annulé en raison du convoi de la liberté. Au lieu de s’installer au Centre Shaw au centre-ville d’Ottawa, deux jours avant l’ouverture, les organisateurs ont changé la location au Infinity Convention Centre.

Selon Steve Mills, l’un des organisateurs du Capital Wedding Show, il était hors de question d’annuler cet événement rassembleur, car l’industrie du mariage en avait besoin. Non seulement pour les couples, mais aussi pour les exposants. 

« On savait que la vente de billets était spectaculaire, la demande était là, donc c’était très important de le réaliser », souligne Steve Mills. « C’est aussi très important pour les exposants d’être ici. Pour plusieurs d’entre eux, ce salon leur permet de sécuriser un revenu annuel. S’ils ne l’ont pas, ils sont en difficulté. Alors, on avait absolument besoin d’avoir le Capital Wedding Show pour eux. » 

En raison du changement de location, une bonne partie des exposants ont décidé de ne pas se présenter au salon. Mais pour ceux qui étaient présents, ce festival de mariage leur a permis de commencer sur le bon pied la saison de mariage 2022-2023. 

« C’est une opportunité lors de laquelle ma clientèle cible est concentrée dans une salle, ce qui nous donne de bons contrats, souligne Lexine Ménard. On peut générer plus de 250 clients qui sont très intéressés et qui nous donnent leur information. Ça en vaut la peine, car si les gens ne te voient pas ou n’entendent pas ton nom, ils vont t’oublier alors c’est vraiment important d’être présent. » 

Pour certains, sans le salon, l’industrie du mariage ne serait pas aussi riche. Justement, la photographe Jasmine Mory pour Mitch Lenet Weddings Photography, explique comment cette fin de semaine est bénéfique pour les exposants. 

« Les salons du mariage sont formidables, car ils nous offrent une excellente visibilité dans la communauté », exprime la photographe. « Je réserve généralement 10 à 15 mariages par salon, ce qui génère un bon revenu. » 

« Nous venons au salon du mariage pour nous permettre de continuer à grandir dans l’industrie. Mocha Tree Studios est connu sur les médias sociaux, mais nous voulons continuer à montrer nos visages, nos photos et être connus dans la communauté, juste pour ne pas être oubliés. »

Pour plusieurs exposants, comme Ricardo Boreka de Sizzle with Decor, le salon du mariage leur donne la chance d’établir des liens importants avec les futurs mariés, ce qui est primordial pour ces membres de l’industrie. 

« C’est certainement profitable. On a la chance de montrer aux futurs mariés qu’on est capable de leur offrir un excellent service, d’établir une connexion avec eux et de les aider à planifier leur mariage », partage Ricardo Boreka. 

Avec l’essentiel des mesures sanitaires levées dès le 1er mars en Ontario, la saison de mariage s’annonce chargée en 2022. La communauté de l’industrie a retrouvé l’esprit du mariage, et les futurs mariés, un avant-goût de tout ce qui les attend. 

« C’est sûr que ça a été dur. Nous avons eu beaucoup d’annulations de mariage, mais ce sont de bonnes nouvelles que les restrictions s’assouplissent maintenant », dit Ricardo Boreka. « Nous avons beaucoup plus de mariées qui sont excitées et prêtes à organiser leur mariage avec nous. » 

Les futurs mariés et les exposants pourront participer au Ottawa Wedding Show le 2 et 3 avril prochain au Centre EY.

Voici la vidéo envoyée par Mélodie Maxwell.

La grande maison, la différence : la magie qui nous unit

Par Nathalie Kuesso, Coup de cœur du jury

Elle dégageait de l’amour, sa joie de vivre émerveillait et séduisait. Elle, c’est Europe. Une jeune maman métisse que j’ai rencontrée dans le bus ce matin. Sans même me connaitre elle s’approcha de moi et on se mit à sympathiser. Europe me racontait ses folles aventures amoureuses.

Elle me faisait le récit de sa journée avec ce jeune Belge qu’elle avait rencontré au restaurant La Banane qui avait dit être tombé amoureux d’elle, mais avant que la flèche de Cupidon ne puisse faire effet, ses yeux avaient croisé ceux de ce jeune arabe qui lui, son turban bien noué, avait pu faire battre la chamade au cœur de notre jeune maman. Soudain, Europe s’arrêta.

Les cris d’une Indienne nouvellement arrivée au Canada avaient tous retenu notre attention. Ne sachant pas comment stopper le bus, elle s’était mise à crier dans le but d’alerter le chauffeur qu’elle était arrivée à bon port. Mort de rire, un jeune homme assis près de nous s’exclama tout en nous pointant du doigt : « Décidément, ces sauvages ne changeront jamais ». Et Europe fondit en larme : c’en était trop.

La diversité, notre force… bienvenue à Toronto. A place to discover, Yours to discover. Désignée en 2016 par l’émission More And Less de la BBC comme étant la ville la plus multiculturelle au monde, Toronto est une ville qui a ceci de particulier : sa grande diversité.

On y rencontre des peuples venus d’un peu partout, vivant en cohésion et travaillant en harmonie.

C’est d’ailleurs pour cela que John Tory s’exprimait en ses mots le 12 septembre 2020 au micro de Radio-Canada : « Toronto a réussi à se transformer de quelque chose de très simple à l’un des endroits les plus diversifiés au monde. »

Dans cette ville, le froid des régions du Pôle nord y est ressenti différemment car la chaleur humaine rend tout de plus en plus « caliente ». Les couleurs de la diversité sont un point d’honneur célébré dans les grands festivals d’été. Les tables de la grande maison sont chaleureuses, on y mange à l’aveuglette, on boit la spécialité du pays à l’honneur, le tout accompagné de causeries, de musique inspirée d’un peu de partout.

Mais, certains phénomènes fragilisent la grande maison. La fraternité et la convivialité interculturelle se dégradent peu à peu. Les séquelles sont perceptibles et hantent nombre d’entre eux, nous poussant parfois à adopter des comportements peu honorables.

À chaque moquerie, insulte proférée, c’est tout un peuple qui se sent attaqué, poussant l’autre, dans le souci de se protéger, à prendre des postures peu sociables. On assiste de plus en plus aux scènes de racisme et les comportements xénophobes sont observés à bout de rue. On se souvient, oui on s’en souvient également en Ontario, de l’incident qui s’était déroulé au Loblaws à Toronto, lors duquel était survenue la mort de Patrick Shand.

Le racisme systémique court les rues et on se demande bien si lesdites règles judiciaires sont appliquées à tous et de la même manière. La mort de Regis Korchinski-Paquet est un cas de trop. La police ne pouvait-elle pas réagir pour éviter le pire? La question demeure posée et, selon les enquêtes, la police ne pouvait pas grand-chose. Pour mieux nous expliquer et nous éclaircir sur la notion de racisme, Radio-Canada a tendu le micro à Nicolas Ouellet. La vidéo est disponible sur tous les comptes numériques de cet organisme médiatique. Qu’il soit systémique ou pas, le racisme doit être aboli.

Essayons un instant de nous mettre à la place d’Europe qui dit être tombée ce matin-même de manière hasardeuse sur une lettre écrite par sa fille dont le titre était : Lettre à ma peau. Europe avoue avoir pleuré toute cette soirée en lisant les écrits de sa fille de 11 ans.

Sa belle peau ébène était devenue pour elle un facteur de gêne. Elle était exaspérée de voir ses camarades de classe l’approcher avec une efface. On ne peut pas plaindre les enfants qui sont uniquement le reflet de l’éducation donnée par les parents. Et si les rôles étaient inversés et si à la place d’Europe, c’était vous? Que feriez-vous?

Quand le racisme s’introduit à l’école, il devient encore plus nocif, car c’est la société de demain qui est en train d’être détruite. Lorsqu’un enseignant entre dans sa salle de classe de neuvième année à Parkdale Collegiate Institute avec une face teintée de noir, prétextant qu’il s’agit d’Halloween, on veut bien savoir si son déguisement reflète pour lui le sort qu’il a reçu en refusant des bonbons aux enfants. C’était pour faire rire qui? Vous? Moi? Le gouvernement? Le bon Dieu? Malgré tout, une belle partie de la communauté de Toronto a gardé son côté accueillant, chaleureux, courtois et serviable.

Les résultats de la petite enquête menée auprès de la communauté internationale des étudiants de l’Université de l’Ontario français sont le reflet de la grande sympathie des habitants de la ville. Fabrice Managa , étudiant de Cultures numériques, a pris la parole pour remercier du fond du cœur cette philanthrope qui l’avait plus qu’aidée le jour de son arrivée à Toronto.

Et son camarade Thierry Noutsa Dylane d’ajouter : « J’avais perdu mon sac dans un bus et j’étais rentré sans m’en rendre compte. C’est grâce à une conductrice que je l’ai retrouvé, grandement merci. » Comment faire cesser le racisme ou du moins atténuer ses effets? C’est la grande question à laquelle il faut répondre.

Il faut se lever tous et combattre ensemble ce fléau. Prôner les différentes valeurs de la francophonie pourrait être une solution. Il faudra vulgariser la langue à travers la ville, car la langue française ce n’est pas uniquement la parole, « le bon français » et l’on pourrait se douter s’il existe encore.

Certes, il faut maîtriser la base comme le disait Léopold Sédar Senghor, mais la langue française est une langue d’ouverture qui prône l’adaptation selon la culture et l’impact du milieu.

On parle du chiac au Nouveau-Brunswick, du franglais dans d’autres provinces anglophones du Canada. Très ouverte et dynamique, la vulgarisation de la langue serait un atout d’intégration et d’acceptation sociale de par sa grande diffusion à travers le monde.

Rencontrer quelqu’un qui parle la même langue que moi est toujours un facteur de socialisation. Il faut donc promouvoir au travers des différentes écoles le côté chaleureux, accueillant, diversifié et inclusif de la francophonie. Il est bien vrai que l’école formelle n’est pas forcément nécessaire car l’école de la vie et de nos aïeux nous enseigne tant sur cette belle langue.

Mais la nécessité d’acquérir des connaissances solides pour notre environnement est primordiale. Les écoles francophones à Toronto sont là, non seulement dans le souci de voir se développer de futures ambassadrices de la langue française à Toronto, mais aussi dans l’espoir d’avoir un jour une plus grande communauté francophone dans cette grande métropole. Tout comme le soulignait Mme Lise, lors d’une rencontre en tête à tête parlant de la semaine de la francophonie qui se déroule chaque année du 20 au 27 mars, la langue française c’est également la transmission : « Une langue, c’est une langue mais c’est comment on la fait vibrer cette culture francophone, cette culture globale, dynamique et inclusive. »

Toutefois, vu les résultats qu’on a recueillis lors d’une étude ethnographique d’un tweet ONFR+ concernant l’Université Laurentienne et l’Université de l’Ontario français, certains n’ont pas encore bien accueilli le projet, et ne parviennent pas à saisir toute la nécessité du français à Toronto.

Comme le mentionnait également Mme Lise, « les valeurs de la francophonie sont très claires et simples : la francophonie ensemble nous réunit. Être réuni est très important pour la francophonie parce qu’il y a plusieurs francophones à Toronto. La francophonie est globale : elle est diversifiée de partout dans plein de pays. Collaborer, se réunir et célébrer ensemble, la langue, la belle langue ».

Pour faire valoir la langue française et faire comprendre sa nécessité, il est primordial pour nous francophones de Toronto de se réunir et travailler ensemble pour prôner les valeurs de l’inclusion sociale et l’acceptation de la francophonie plurielle. C’est comme cela qu’on réussira à diminuer les impacts du racisme et freiner sa progression.