Nouvelle défaite pour les francophones en Colombie-Britannique
VANCOUVER – La Cour fédérale a rejeté, ce mercredi, la demande de la Fédération des francophones de la Colombie-Britannique (FFCB) qui reprochait au gouvernement fédéral d’avoir oublié ses obligations linguistiques en transférant aux provinces les services d’aide à l’emploi, en 2008. Un argument de plus pour une modernisation de la Loi sur les langues officielles, selon l’avocat Mark Power.
BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet
« Nous sommes déçus, mais nous respectons le jugement de la Cour fédérale », lance Padminee Chundunsing, présidente de la FFCB.
Depuis 2013, l’organisme porte-parole des francophones de Colombie-Britannique se bat contre le gouvernement fédéral responsable, selon l’organisme, de la baisse d’accès et de qualité des services à l’emploi en français dans la province.
En 2008, le gouvernement conservateur avait décidé de transférer aux provinces la responsabilité d’offrir les services et programmes d’aide à l’emploi, tout en continuant à y contribuer financièrement.
« Le résultat de ce transfert, c’est que nous avons perdu nos cinq centres d’aide à l’emploi qui offraient des services en français à Kelowna, Penticton, Prince George et Vancouver. Ils ont été remplacés par des centres anglophones ou bilingues où il est très difficile de se faire servir en français », rapporte Mme Chundunsing. « Souvent, on nous dit d’utiliser Google translate! »
Mais dans son jugement du 23 mai, le juge Gascon estime que le gouvernement fédéral n’a pas enfreint ses obligations de prendre « des mesures positives » pour favoriser l’épanouissement des communautés francophones et anglophones du Canada en prenant cette décision.
La FFCB avait déposé plusieurs plaintes auprès du commissaire aux langues officielles du Canada dans le dossier. Le commissaire lui avait donné raison en avril 2013, encourageant ainsi la FFCB à aller devant les tribunaux.
« Quand nous sommes allés en cour, nous n’avions pas le choix, car la province ne voulait rien savoir », assure Mme Chundunsing.
Un argument pour moderniser la Loi
L’avocat de la FFCB, Mark Power, qui défend de nombreuses causes linguistiques, se dit surpris par la décision de la cour.
« Le jugement d’aujourd’hui nous ramène à la case départ en disant que la partie VII de la Loi sur les langues officielles [sur la Promotion du français et de l’anglais] n’impose aucun seuil minimal en matière de mesures positives. C’est une décision étonnante et difficile pour les communautés francophones d’un océan à l’autre. »
« Jean-Robert Gauthier doit se retourner dans sa tombe! » – Mark Power, avocat
Pour lui, tous les regards sont désormais tournés vers Ottawa.
« Ce jugement démontre l’urgence d’agir pour revoir de fond en comble la Loi sur les langues officielles. Changer les règlements d’application ne résoudrait rien, car ils peuvent être abrogés du jour au lendemain. La modernisation est la meilleure solution pour répondre à l’écart qui existe entre la réalité sur le terrain et la capacité de la Loi dans sa forme actuelle de répondre à ces nouveaux défis. Actuellement, la Loi ne permet aucun contrôle sur ce genre de décisions du gouvernement fédéral. »
La présidente de la FFCB prévoit profiter de son passage prochain à Ottawa pour rencontrer des députés fédéraux et insister sur la nécessité de modifier la Loi.
La cause en appel?
Ces dernières années, la Colombie-Britannique a été le théâtre de plusieurs causes francophones devant les tribunaux, notamment en matière d’éducation.
Seule province à ne posséder ni loi ni politique sur les services en français, elle compte pourtant de nombreux francophones et francophiles, explique Mme Chundunsing. Selon le recensement de 2016, 314 980 personnes y maîtrisent le français.
« Les gens pensent pourtant qu’il n’y a pas besoin de services en français », regrette-t-elle.
Aujourd’hui, toutefois, dit-elle, la situation semble changer tranquillement avec l’arrivée au pouvoir du néo-démocrate John Horgan et de son ministre responsable du Programme des affaires francophones de la Colombie-Britannique, Adrian Dix.
« Le ministre comprend nos enjeux et nous écoute, c’est un allié. »
Mais la possibilité de faire appel existe, reconnaît la présidente de la FFCB, qui indique que l’organisme doit d’abord consulter la communauté et ses avocats.
POUR EN SAVOIR PLUS :
L’utilisation des fonds fédéraux pour l’éducation en français devant les tribunaux?