« On veut représenter les intérêts des enseignants de la diversité »

Blaise Nguendo Yongsi, président de l’Association ontarienne des professionnels de l'éducation de la diversité (AOPED). Gracieuseté

[ENTREVUE EXPRESS]

QUI :

L’enseignant franco-ontarien, Blaise Nguendo-Yongsi est le président de l’Association ontarienne des professionnels de l’éducation de la diversité (AOPED).

LE CONTEXTE :

Créée en septembre, l’AOPED veut donner une voix aux enseignants noirs ou immigrants qui travaillent dans les conseils scolaires de langue française. Car plusieurs estiment ne pas être écoutés ni respectés au sein de l’Association des enseignants et des enseignantes franco-ontariens (AEFO). Une controverse a notamment éclaté au sein du syndicat après la présentation, lors de l’assemblée générale annuelle 2019, des résultats d’un sondage mené auprès de plus de 1 000 membres et dans lequel plusieurs d’entre eux, issus de la majorité, semblaient douter des qualifications du personnel immigrant. Le syndicat s’était ensuite défendu en parlant d’un « malentendu regrettable ».

L’ENJEU :

La démarche de l’AOPED pourrait-elle aider l’AEFO à mieux représenter la diversité de ses membres, comme certains le lui reprochent? L’AOPED ne ferme pas la porte à un rapprochement, mais estime que c’est au syndicat de faire le premier pas.

« Vous êtes le président de l’AOPED, une nouvelle association dans le monde de l’éducation franco-ontarien. Comment ce projet est-il né?

Nous avons fondé l’APOED il y a quelques mois à peine, en septembre. Aujourd’hui, nous avons un comité exécutif qui se rassemble environ toutes les deux semaines.

Tout a commencé avec la présentation des résultats d’un sondage à l’assemblée générale annuelle de l’AEFO, en 2019. Un passage indiquait que certains répondants traitaient les enseignants issus de la diversité d’incompétents. Ça a été un coup de tonnerre! On a donc voulu savoir d’où ça venait, on a cherché à comprendre et avons demandé des clarifications qui ne sont jamais venues, pas plus que les excuses du président [Rémi Sabourin, à l’époque], alors que beaucoup d’entre nous se sont sentis humiliés.

Au départ, on ne pensait pas créer l’AOPED, mais en voyant la situation, on a décidé de se lancer.

Qui sont vos membres?

Nous avons quelque 230 membres actifs, mais tous les enseignantes et enseignants de la diversité qui s’en réclament sont membres de fait.

Qu’espérez-vous accomplir avec cette nouvelle association?

On veut agir comme un groupe de pression envers les autorités et défendre les intérêts et les priorités de nos membres, tout simplement. Car nous nous sommes rendu compte que l’AEFO ne répond pas aux problèmes des professionnels noirs et immigrants.

Quels sont ces problèmes?

Il y a le problème du recrutement des personnes issues de la diversité dans les conseils scolaires, même si la situation n’est pas la même partout. On présente ces embauches comme de la compassion, sans faire sentir à ces personnes qu’elles méritent. Nos membres sont aussi plus souvent suppléants. Et puis, pendant leur formation, ils ont plus de difficultés à trouver des stages.

L’AOPED a-t-elle vocation à devenir un syndicat?

On sait qu’actuellement, la Loi ontarienne ne le permet pas, mais c’est notre objectif à moyen terme, car on veut être à la table des négociations. Ça donnerait l’option à chacun de choisir d’intégrer l’AEFO ou l’AOPED. Aujourd’hui, on vient de créer l’AOPED. C’est une première étape et on a déjà prévenu le ministre de l’Éducation, Stephen Lecce, qui est au courant de notre existence.

Est-ce qu’un rapprochement avec l’AEFO est encore possible?

Absolument! L’AOPED n’est pas là pour s’opposer. Mais actuellement, les instances dirigeantes de l’AEFO manquent de diversité et ne représentent pas, proportionnellement, toutes les composantes socioculturelles de ses membres.

Mais si l’AEFO comprend notre démarche et veut se ressaisir, en reconnaissant qu’elle a failli et en commençant une réflexion pour mieux intégrer toutes ces composantes, on est prêt à travailler avec eux.

L’AEFO connaît notre existence. Nous lui avons tendu la main deux fois, on ne le fera pas une troisième fois. Maintenant, c’est à elle de venir vers nous. »