L'Université Laurentienne. Crédit image: Pascal Vachon
L'Université Laurentienne a connu plusieurs difficultés financières dans les dernières années. Crédit image: Pascal Vachon

OTTAWA – Le gouvernement fédéral entend modifier sa Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies pour interdire aux établissements postsecondaires publics de se mettre à l’abri des créanciers, comme l’avait fait l’Université Laurentienne en 2021.

À l’époque, l’établissement de Sudbury avait utilisé cette Loi pour mettre à pied près de 200 membres de son personnel, incluant son corps professoral et supprimer près de 70 programmes, dont une trentaine en français.

Dans son énoncé économique présenté mardi, une sorte de mini-budget, Ottawa indique qu’il modifiera la Loi sur la faillite et l’insolvabilité ainsi que la Loi sur les créanciers des compagnies « pour faire en sorte que les établissements d’enseignement postsecondaire publics ne puissent faire l’objet de poursuites en vertu de l’une ou l’autre de ces lois ». Si cette interdiction avait été en vigueur à l’époque, l’Université Laurentienne n’aurait pas pu se tourner vers cette loi fiscale et aurait dû utiliser d’autres moyens pour régler sa crise financière.

Lors de l’embargo mardi, un haut fonctionnaire de Finances Canada a indiqué que plus de détails autour de cette annonce seront connus ultérieurement, notamment pour définir la définition d’établissement public. Mais cette mesure a pour but d’éviter un autre scénario similaire pour des établissements publics de l’envergure de la Laurentienne, nous a-t-on indiqué.

Cette mesure a réjoui la Confédération des associations de professeurs universitaires de l’Ontario (OCUFA) qui compte près de 17 000 membres.

« Nous sommes fiers de voir de réels changements se produire aujourd’hui pour garantir que nos universités publiques ne seront plus vulnérables aux dangers de la restructuration des entreprises, a déclaré via communiqué son président Nigmendra Narain. Ce qui s’est produit à la Laurentienne n’aurait jamais dû arriver, et nous pouvons maintenant garantir que cela ne se reproduira plus dans une autre université publique au Canada. »

Cette annonce n’est pas si surprenante, car le fédéral avait annoncé en mai dernier qu’il lançait des consultations avec les acteurs du secteur concerné pour voir quelles mesures pouvaient être prises.

Une dette plus élevée que prévue

Le gouvernement Trudeau ne prévoit toujours pas de retour à l’équilibre budgétaire dans les prochaines années, même que la réduction de la dette sera plus lente que l’avait anticipé Ottawa lors de son budget de 2023 en mars et de l’énoncé économique de 2022.

Il y a un an, le Canada se dirigeait, selon les projections du ministère des Finances, vers 2027-2028, avec un léger surplus de 4,5 milliards de dollars. Mais de nouveaux investissements comme la création d’un Régime canadien de soins dentaires et les subventions pour les usines de batteries dans les derniers mois ont fait bondir la projection de la dette fédérale à 14 milliards en 2027-2028. Le gouvernement Trudeau prévoit désormais que ce montant s’élèvera à 23,8 milliards en 2027, baissant ensuite à 18,4 milliards en 2028-2029. 

Le tout s’explique notamment par la hausse des taux d’intérêt ayant augmenté les frais de la dette publique qui est en augmentation de plusieurs milliards de dollars par rapport aux dernières projections.

Le logement et les énergies propres

Dans son énoncé économique, Ottawa prévoit d’investir 15 milliards de dollars supplémentaires pour la construction de logements locatifs en offrant des prêts et du financement aux constructeurs et promoteurs. Cette bonification appuiera la construction de 30 000 nouveaux logements, estime le fédéral dans son document financier. L’énoncé économique comporte aussi un ajout d’un milliard de dollars sur trois ans aux Fonds pour le logement abordable, ce qui devrait aider à la construction de 7 000 nouveaux logements d’ici 2028.

« Notre pays a besoin de plus de logements, et ce, rapidement… Et nous devrons tous contribuer à cet effort : le gouvernement fédéral et les provinces, les villes et les villages, le secteur privé et les organismes à but non lucratif d’un bout à l’autre de ce grand pays », a dit la ministre des Finances Chrystia Freeland lors d’un discours au Parlement après le dépôt du mini-budget.

La vice-première ministre et ministre des Finances, Chrystia Freeland. Crédit image: Stéphane Bédard
La vice-première ministre et ministre des Finances, Chrystia Freeland. Crédit image : Stéphane Bédard

Une autre dépense est l’élimination de la Taxe sur les produits et services (TPS) sur les nouveaux logements locatifs comme l’avait annoncé Justin Trudeau au début de l’automne. Le gouvernement Ford avait annoncé quelques jours plus tard qu’il emboîterait lui aussi le pas en retirant sa portion provinciale de la TPS.

Le fédéral entend punir les propriétaires d’immeubles à logements locatifs à court terme comme Airbnb. Ces derniers ne pourront plus obtenir une déduction fiscale sur les revenus engendrés par ces types de locations à court terme, et ce dès le 1er janvier 2024, a-t-il été annoncé mardi.

Ottawa élargira l’admissibilité au Crédit d’impôt aux entreprises qui produiront de l’énergie propre à partir de déchets biologiques. Cette mesure combinée à d’autres investissements dans l’économie en coûtera près de 907 nouveaux millions de dollars.

Crédit d’impôt doublé pour les médias

Le budget prévoit que le crédit d’impôt destiné aux journaux passera de 25 à 35 % lors des quatre prochaines années. À noter que cette bonification ne s’applique pas à la télévision ou à la radio, mais seulement aux médias écrits. Ces derniers pourront réclamer jusqu’à 85 000 $ pour les coûts associés à la main-d’œuvre, un plafond précédemment instauré à 55 000 $. Cette bonification nécessitera un financement de 129 millions de dollars.

Correctif : une précédente version de ce texte indiquait que l’Université Laurentienne avait mis à pied « près de 300 membres » de son personnel, il s’agit plutôt de « près de 200 membres ».