
Paris 2024 un an après : Samuel Zakutney, la mémoire vive d’un été historique pour la gymnastique canadienne

Jeux olympiques de Paris 2024, un an après
Un an après les Jeux olympiques de Paris, ONFR vous propose de revenir sur les souvenirs des athlètes franco‑ontariens et surtout sur leur année après les Jeux. Ce samedi, c’est au tour de Samuel Zakutney, membre de l’équipe canadienne masculine de gymnastique artistique, de revenir sur cette expérience unique et sur l’année qui a suivi sa première participation olympique.
Il n’a pas gagné de médaille, ni monopolisé les écrans de télévision, mais pour Samuel Zakutney, les Jeux de Paris ont été un sommet personnel et collectif. Le gymnaste franco-ontarien, membre de la première équipe canadienne masculine qualifiée en gymnastique artistique depuis 2008, revient sur un été 2024 chargé d’émotions et d’enseignements, entre performances sportives, mariage et nouveaux objectifs.
Une qualification historique et des émotions fortes
« Le sentiment de compétitionner dans la finale d’équipe, c’est ce que je garde le plus fort », confie Zakutney d’entrée de jeu. Car son souvenir des Jeux commence bien avant l’ouverture officielle. Avec ses coéquipiers, il se sont battus pendant trois ans pour qualifier une équipe complète, chose que le Canada n’avait plus réalisée depuis les Jeux de Pékin.
Le suspense a duré jusqu’au bout. Après une première journée correcte, mais imparfaite selon lui, l’équipe canadienne devait attendre la fin des deux autres subdivisions pour connaître son sort.
« J’étais dans les gradins de Bercy avec mon entraîneur… complètement recroquevillé dans mon siège, les doigts sur les yeux », se remémore-t-il. Une chute sur la barre fixe d’un concurrent et l’annonce du classement final a libéré tout un groupe.
« Canada, 8e place. On l’avait fait. »

Ce soulagement a laissé place à l’extase en finale, et à un moment inoubliable pour l’athlète natif de Saint John au Nouveau-Brunswick, qui a grandi du côté d’Ottawa :
« J’ai ‘stiqué’ ma sortie à la fixe, c’était une routine super propre. Quand j’ai atterri sans bouger les pieds, la foule a explosé. J’ai vu l’équipe, j’ai eu un flashback de toutes les blessures, de tout le chemin parcouru… Le temps s’est arrêté. »
Ces trois années de qualification ont été tout sauf linéaires pour Samuel Zakutney. Entre une fracture du scaphoïde, une déchirure du pectoral droit, et des douleurs persistantes au genou, le gymnaste a souvent été contraint à des pauses forcées. Mais à force de résilience et d’ajustements dans sa préparation, il a réussi à revenir à son meilleur niveau au bon moment.
Le village olympique, un monde à part
En dehors des agrès, Zakutney a goûté à la magie du village olympique.
« C’est spécial d’être entouré de tellement de gens qui savent ce que ça prend pour arriver ici. Même un simple échange de regards dans la cafétéria, c’était du respect. »
S’il n’a pas trop profité des installations et compétitions en dehors de la gymnastique, concentration oblige, il a tout de même pu assister à une journée d’athlétisme avec ses sœurs.
« On n’était pas là pour se promener. On avait un job à faire. Mais on a quand même profité un peu de l’ambiance. »
Un boost de confiance, plus qu’une vitrine
Les Jeux n’ont pas changé la vie de Zakutney en matière de notoriété ou de contrats.
« Personnellement, non. J’ai fait quelques entrevues, mais ça n’a pas vraiment augmenté ma visibilité. D’autres coéquipiers comme Félix Dolci ou William Emard, eux, ont eu beaucoup plus d’attention. »
Mais sur le plan mental, l’impact est profond.
« J’avais encore des doutes après mes blessures. Je n’étais pas dans ma meilleure forme, surtout sur les anneaux, à cause d’un déchirement au pectoral. Mais j’ai appris à lâcher prise, à faire confiance au processus. »
Ce changement d’état d’esprit, il l’emporte avec lui :
« Aujourd’hui, je sais mieux comment me mettre dans le bon état mental pour performer. Même si le stress reste, j’ai plus de confiance en moi. »
Des anneaux à l’alliance
Le lendemain même de la finale par équipe, Samuel Zakutney a demandé en mariage sa compagne de longue date à Paris. Le mariage a eu lieu récemment au Palais de justice de Montréal, lors d’une cérémonie civile en présence de leurs proches. Une seconde cérémonie plus traditionnelle est prévue pour l’année prochaine avec leurs amis et leurs familles.
« On s’est rencontré à Penn State et elle était à mon côté depuis ce temps-là. Elle m’a toujours supporté dans mon rêve d’aller aux Jeux », souligne-t-il.

Après un mois et demi de repos, il a repris doucement l’entraînement en octobre, et la compétition dès janvier 2025 avec Elite Canada, puis une tentative de retour international en mars lors d’un tournoi en Allemagne, avortée à cause d’une gêne au genou.
Mais la forme est revenue aux Championnats canadiens où il a décroché la deuxième place aux barres parallèles, la quatrième aux arçons et la cinquième au concours général.
« C’était quand même une bonne compé », résume-t-il.
Cap sur les championnats du monde
L’objectif maintenant est clair : les Championnats du monde de gymnastique artistique en Indonésie à la fin octobre. Une compétition individuelle, sans classement par équipes, mais où Zakutney espère briller sur deux agrès :
« Si je peux entrer dans le top 12 ou le top 16 aux barres parallèles et à la fixe, ce serait l’idéal. »
Pour cela, il a adapté ses routines au nouveau code de pointage post-olympique, qui exige huit éléments au lieu de dix.
« J’ai passé l’hiver à bosser là-dessus pour augmenter ma note de difficulté. Je pense que je suis en bonne position. »
À 27 ans, Zakutney ne sait pas encore jusqu’où son parcours l’emmènera, mais une chose est certaine, Paris lui a donné un élan nouveau, et le sentiment d’avoir sa place parmi les meilleurs.
« J’ai eu l’une des plus belles journées de compétition de ma carrière aux Jeux. Maintenant, j’avance avec confiance. »