Quand les organismes franco-ontariens unissent leurs forces

Entrée de la clinique médicale du 555, rue Richmond Ouest à Toronto. Gracieuseté CFGT

Au cours des années, plusieurs organismes franco-ontariens ont décidé de s’allier. Et d’autres y songent afin de faire des économies, mais surtout d’augmenter leurs services.

Avant d’être rebaptisé Centre francophone du Grand Toronto (CFGT), en septembre 2019, l’organisme torontois est d’abord le fruit d’une fusion. En 2004, le Centre francophone de Toronto et le Centre médico-social communautaire se rassemblaient sous une même bannière.

« En quittant son poste, le directeur général du CFT avait lancé l’idée d’étudier une fusion pour faire des économies d’échelle, mais aussi parce qu’il y avait une complémentarité des services », se souvient Jean-Gilles Pelletier, qui était alors le directeur général du Centre médico-social communautaire.

Se regrouper, c’est aussi le choix qu’ont fait le Centre d’activités françaises, l’Association canadienne-française de l’Ontario (ACFO) Huronie et la Radio-Huronie, à Penetanguishene, en 1996.

« Le Centre d’activités françaises était déficitaire, la Radio-Huronie était sur le bord de fermer et on risquait de perdre des services. C’était donc facile de s’entendre », raconte la directrice générale de La Clé d’la Baie, Sylvia Bernard, qui n’était toutefois pas là, à l’époque.

C’est sous cet organisme parapluie, La Clé d’la Baie, que les trois organismes ont ainsi partagé un même toit, une seule direction générale, tout en conservant leur identité.

« C’était un point important, car ils ne voulaient pas perdre ce qui avait été construit. »

La Clé d’la Baie propose plusieurs services dont celui de garderie. Source : Facebook La Clé d’la Baie

Depuis, le Centre multiservice du comté de Simcoe s’est ajouté et La Clé d’la Baie a poursuivi sa croissance.

« Nous avons pu ajouter des projets et désormais, 35 % de nos revenus sont autonomes sur un budget de 3,7 millions de dollars. La radio est active et nous avons développé trois entreprises sociales de garderie, de traiteur et de camps d’été. Ainsi, les surplus peuvent être réinvestis dans les services, selon les besoins. »

Les clés du succès

Selon M. Pelletier, l’important dans une fusion d’organismes est de bien respecter les étapes.

« Il faut qu’il y ait une volonté des deux côtés, une mission et des valeurs semblables. C’est également important que les services offerts soient complémentaires. »

En fin de compte, cela peut permettre d’offrir davantage à la communauté, dit-il.

Aujourd’hui, le CFGT compte sept points de services et un budget annuel de 10 millions de dollars, offrant une gamme de services de santé, d’établissement et sociaux communautaires, du soutien à l’emploi et depuis 2019, d’accueil pour les nouveaux arrivants francophones à l’Aéroport Lester B. Pearson.

« Le Centre francophone de Toronto est devenu un modèle pour le Canada français. Ça a donné de la profondeur à l’organisme qui est devenu un incontournable pour les bailleurs de fonds. »

Même si elle n’est pas d’accord pour dire qu’il y a trop d’organismes en Ontario français, Mme Bernard insiste que la priorité doit être l’ajout de services et que l’exemple de La Clé d’la Baie peut servir.

« Il faut maximiser ce qu’on a et se diversifier. La Clé, c’est une bonne formule avec plus de ressources financières et des économies d’échelle. Les organismes ont intérêt à regarder ces éléments-là quand ils analysent leurs performances. »

Un projet en cours à Ottawa

Et certains y songent… À Ottawa, le Centre Psychosocial, fondé il y a 35 ans, et la Maison Fraternité, active depuis 57 ans, pourraient ne faire qu’un, le 1er avril prochain.

« En novembre 2018, le RLISS [Réseau local d’intégration des services de santé] nous a indiqué son intention de cesser le financement de notre Centre résidentiel pour jeunes francophones à partir d’avril 2020. Nous n’arrivions pas à atteindre l’objectif fixé d’un taux d’occupation de 89 %. On voyait aussi le climat de coupures. On s’est donc dit qu’il serait mieux de s’associer avec le Centre Psychosocial », explique le directeur de la Maison Fraternité, Yvon Lemire.

Pour son homologue du Centre Psychosocial, Mylène Kosseim, la volonté était commune.

« La Maison Fraternité offre des services aux personnes souffrant de dépendance et nous, en santé mentale. Les deux vont souvent main dans la main. Notre vision est commune, nos partenaires sont les mêmes et nos expertises se complètent. On peut offrir des services riches et englobants. »

La Maison Fraternité dans le quartier Vanier. Archives ONFR+

Le projet doit être validé par les ministères des Services à l’enfance et Services sociaux et communautaires et de la Santé, mais il a déjà convaincu le RLISS-Champlain qui confiera à la nouvelle entité son projet de traitement intensif de la dépendance chez les jeunes.

Si plusieurs éléments restent à finaliser, comme de trouver un nouveau nom et de structurer la nouvelle organisation, Mme Kosseim y voit de nombreux avantages.

« On ne fait pas ça pour être plus efficients ou couper des postes, mais simplement pour mieux répondre aux besoins. Même si nous sommes à Ottawa, il y a des défis linguistiques et géographiques à l’accès aux services et de longues listes d’attente », assure-t-elle, citant notamment la grave pénurie de pédopsychiatres en français.

Réunis, le Centre Psychosocial et la Maison Fraternité pourraient ajouter d’autres points de services à leurs sept existants, notamment à l’ouest d’Ottawa, dans la nouvelle Maison de la francophonie d’Ottawa, et même dans Stormont-Dundas-Glengarry, dit-elle.

Pour M. Lemire, ce rapprochement garantit une pérennité.

« La suppression du financement pour le Centre résidentiel pour jeunes francophones représentait une perte de 816 000 $ sur notre budget annuel de 3,5 millions de dollars. Nous aurions donc été plus vulnérables. Là, nous allons pouvoir offrir une meilleure gamme de services. »