Qu’attendre du dépôt du budget de l’Ontario?

Le ministre des Finances Peter Bethlenfalvy. Source: Facebook

TORONTO – Le premier budget de l’ère Ford, déposé en avril 2019, était sous le sceau de l’austérité économique. Le second, présenté début novembre, était placé sous le signe de la relance économique. Qu’en sera-t-il aujourd’hui pour le dépôt du troisième document du genre en deux ans et demi?

Un changement de style?

❌ Peu probable.

Il sera un peu plus de 16h lorsque le ministre des Finances, Peter Bethlenfalvy, se lèvera de son siège à l’Assemblée législative pour présenter le budget. Ce moment solennel marquera la levée de l’embargo. Les détails du budget seront alors rendus publics.

Pour ce troisième budget de l’ère Ford, M. Bethlenfalvy sera le troisième ministre des Finances à présenter un tel document. De quoi s’attendre à des changements? « Il risque de n’avoir pas beaucoup de changements fondamentaux », prédit la politologue du Collègue militaire royal du Canada, Stéphanie Chouinard. « Le gouvernement provincial est obnubilé par la COVID-19 et va continuer à l’être au moins pour les six prochains mois. »

Un déficit budgétaire qui s’alourdit?

✔️ Probable.

COVID-19 oblige, le gouvernement doit mettre les bouchées doubles dans le budget de la santé. À l’automne, le déficit budgétaire pointait à 38,5 milliards de dollars. À titre de comparaison, ce même déficit avait plongé à 24,7 milliards au lendemain de la crise économique de 2008. Et la somme pourrait encore grossir ce mercredi.

« Cela sera difficile de lutter contre le déficit, car en Ontario, 35 % du budget va dans les dépenses de santé », analyse Peter Graefe, politologue à l’Université McMaster de Hamilton.

La ministre de la Santé, Christine Elliott. Source : Facebook

« Ils (le gouvernement) ont peu de contrôle sur les finances, et en plus, ils doivent dépenser en ce moment beaucoup dans le domaine de la santé et de l’éducation. C’est toujours plus un défi au niveau provincial de combattre une dette, car il est plus difficile d’augmenter les revenus, et plus difficile aussi de faire des économies, contrairement au palier fédéral. »

Le gouvernement s’est engagé à ne pas hausser les impôts, ce qui pourrait confirmer un accroissement du déficit.

De nouvelles grosses dépenses en santé?

✔️ Probable.

Le gouvernement ontarien a insisté qu’il n’y aura pas de réduction des services publics dans le budget. On devrait retrouver un document dans la lignée de celui de l’automne où une somme record de 45 milliards de dollars avait été investie sur trois ans directement pour la santé et l’aide à la population.

L’équipe Ford vient par ailleurs d’annoncer une enveloppe d’1,2 millard de dollars pour aider les hôpitaux, tandis que 933 millions de dollars dans 80 nouveaux projets de soins de longue durée ont été dévoilés pour « moderniser des milliers de places supplémentaires » dans les foyers de soins de longue durée (FSLD).

« Le gouvernement Ford a été élu sur une promesse de rééquilibrer les finances, mais la COVID-19 a changé énormément les attentes, et donc le gouvernement Ford est dans une position particulière », analyse Stéphanie Chouinard. « Il se fait actuellement rapprocher de pas avoir dépensé dans des domaines névralgiques. La population est à feu et à sang sur la question des FSLD. »

L’onde de choc reste grande en Ontario, puisque plus de 3 800 ainés ont succombé au coronavirus dans les différents centres de la province.

Des aides généreuses pour l’éducation?

🟠 Difficile à prévoir.

Les syndicats enseignants restent toujours très dubitatifs des dépenses du gouvernement quant à l’équipement dans les écoles. Ceux-ci réclament plus de moyens pour la santé et la sécurité des travailleurs en éducation. Système de ventilation, ajout de fenêtres, financement pour embaucher davantage d’enseignants et restreindre les groupes à 15 élèves, autant de demandes lesquelles reviennent avec récurrence.

Lors du budget déposé en novembre, les syndicats avaient grincé des dents devant l’augmentation de 2,8 % du financement de base alloué au ministère de l’Éducation (31 milliards de dollars). Une somme bien insuffisante selon eux au regard de la hausse des dépenses induite par les équipements pour lutter contre la COVID-19.

Crédit image : FatCamera / E+ via Getty Images

Du côté de l’Association des enseignantes et des enseignants de l’Ontario français (AEFO), on attend encore la création d’un groupe de travail permanent pour la promotion et le recrutement d’enseignants de langue française.

Le risque d’un 15 novembre 2018?

❌ Peu probable.

Il y a peu de chances que le gouvernement Ford réitère le coup de théâtre de l’énoncé économique du 15 novembre 2018, synonyme d’annulation (provisoire) du projet de l’Université de l’Ontario français (UOF) et de la suppression du poste de commissaire aux services en français. Dans les coulisses, on insiste que l’équipe Ford a appris la leçon.

Difficile de prévoir en revanche ce que le budget réservera pour les francophones. Des aides sous forme « de bouée de sauvetage » aux organismes seront peut-être cités, selon Mme Chouinard. D’autant que L’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) vient de dévoiler la liste des six organismes bénéficiaires des subventions de la deuxième ronde du Fonds de secours des organismes sans but lucratif francophones. 

Dans son budget présenté en novembre, le gouvernement ontarien avait mis sur pied un « Fonds de secours pour les organismes francophones sans but lucratif suite à la COVID-19 » d’un million de dollars. Satisfaite du montant, l’AFO réclamait toutefois un total de 12,5 millions de dollars au gouvernement pour aider les organismes sans but lucratif.

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