Réforme des bourses à l’U d’O : les francophones auront leur part, croit la direction
OTTAWA – La récente réforme des bourses d’admission pour les programmes de maitrise et de doctorat n’aurait pas d’effet pour les francophones, affirme l’Université d’Ottawa (U d’O). En entrevue pour ONFR+, le vice-recteur à l’international et à la Francophonie, Sanni Yaya, martèle au contraire la volonté de l’institution bilingue d’accroître le nombre d’étudiants francophones.
« Avant la réforme des bourses d’admission, nous avons pris le soin de faire des analyses différenciées. Actuellement, avec la réforme, 41% de nos étudiants actuels ont une moyenne d’admission supérieure à 9/10. En fait, il s’agit de 40 % de nos étudiants anglophones qui seront financés par une bourse de la Centrale, contre 43 % des étudiants francophones qui recevront la même bourse. »
Le vice-recteur assure que les francophones « bénéficient déjà de l’accès à une vingtaine de bourses ».
L’enjeu? L’inquiétude suscitée chez certains professeurs par la réforme des bourses d’admission sur leur campus. Deux d’entre eux sous couvert d’anonymat avaient accepté de parler à ONFR+ dans un article publié le 5 février. Une situation jugée alors « désolante » par le Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO).
Concrètement et pour les étudiants en maitrise, l’U d’O offrira à partir de septembre un montant de bourse de « au moins » 7 500 $ par année contre « au moins » 15 000 $ auparavant. Il faudra maintenant une moyenne d’admission de 9/10 contre 8/10 autrefois pour prétendre à cette bourse.
Quant aux bourses pour le doctorat, leurs montants (une valeur minimale de 72 000 $ pour une période de quatre ans) et moyennes de note d’admission (8/10) restent toutefois inchangés, à une exception près : celles-ci deviendront à partir du mois de septembre accessibles pour les étudiants internationaux.
Autant de nouveaux critères qui inquiéteraient les francophones.
Rendre l’université plus concurrentielle
Plus encore, M. Yaya explique cette réforme.
« Nous avions constaté que nous donnions beaucoup de bourses à la maitrise et au doctorat. Il y avait un incitatif pervers dans le système. Or, nous avons beaucoup de mal à recruter au doctorat, et demeurons peu compétitifs par rapport à des universités comme Toronto et Queen’s, alors que nous faisons partie du U15, c’est-à-dire les quinze plus grandes universités de recherche au Canada. Or, notre financement à la maitrise se comparait peu à ce que les autres universités offraient et se révélait moins généreux au doctorat. Il nous fallait donc un rééquilibrage. »
Et de poursuivre : « Dans un récent sondage que nous avons mené à la rentrée 2019 et 2020 parmi les étudiants de maitrise sur l’attractivité du programme, la question des bourses et financement arrivait en 5e position, alors que le sondage frôlait les 50 % de participation des étudiants. »
Le vice-recteur balaye d’un revers de main l’argument selon lequel la réforme ferait la part belle aux étudiants internationaux aux dépens des francophones.
« Depuis un an, nous avons constaté pour les programmes de maitrise une augmentation de 23.9 % de la demande francophone canadienne. Pour les francophones internationaux, on parle d’une hausse de 32,5%. Au doctorat, la hausse chez les étudiants francophones canadiens est de 28 %. »
30 % des francophones, mais pas de nouveaux chiffres précis donnés
Entré en fonctions en juin 2020, M. Yaya laisse entendre que l’Université veut passer la vitesse supérieure concernant le recrutement de francophones.
« En 2014, nous avons mis en place une nouvelle politique d’exonération partielle des droits de scolarité pour les étudiants internationaux qui souhaitaient obtenir un diplôme de premier cycle en français. Par ailleurs dans certaines facultés, on veut pouvoir avoir des programmes exclusivement en français. »
Le recteur « se donne l’objectif d’atteindre la cible de 30 % » d’étudiants francophones sur le campus, reconnaissant par ailleurs que cette proportion n’atteint que 23,9 % pour les étudiants en doctorat.
Selon les chiffres obtenus par ONFR+, la proportion de francophones sur le campus d’Ottawa avait chuté pour la première fois sous la barre des 30 % en 2018 (29,9 %). Jusqu’alors, l’université conservait la proportion de cet échantillon linguistique entre 30 et 31 %.
L’U d’O n’a pas répondu favorablement aux demandes d’ONFR+ sur des chiffres plus récents et précis concernant le nombre de francophones.
« L’Université d’Ottawa affirme son engagement indéfectible envers le dialogue des langues et des cultures, et plus largement au sein du monde francophone. (…) La proportion d’étudiantes et étudiants francophones sur le campus oscille autour de 30 %, tous cycles confondus, et ce, malgré un déclin démographique au Québec et en Ontario. Toutefois, depuis 2010, nous avons pu accueillir 1 100 étudiants francophones de plus – passant ainsi de 12 300 à 13 400. »
Article écrit avec la collaboration de Pascal Vachon