Rentrée : ces choses qui changent dans les salles de classe ontariennes

Après des résultats en chute libre entre 2020 et 2022, le taux de réussite des élèves est en hausse, notamment en mathématiques. Source: ThinkstockPhotos

Qui dit rentrée dit forcément changement dans les salles de classes ontariennes. Soucieux d’imprimer sa marque, le gouvernement progressiste-conservateur de Doug Ford a mis en place de nouvelles mesures. Decryptage de quatre d’entre elles avec la politologue du Collège militaire royal du Canada, Stéphanie Chouinard, et le président de l’Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO), Rémi Sabourin. 

Interdiction du cellulaire dans les salles de classe

C’était l’un des points phare de la grande réforme de l’éducation dévoilée par le gouvernement au mois de mars : l’interdiction des téléphones cellulaires dans les salles de classe sera effective à partir du 4 novembre. Jeudi dernier, le ministère de l’Éducation a fait valoir que 97 % des parents, élèves et enseignants interrogés dans les consultations étaient en faveur de « restrictions » quant aux cellulaires à l’école.

« Disons que ça laisse moins de marge de manœuvre pour le professeur », souligne la politologue Stéphanie Chouinard. « Il y avait deux points de vue auparavant, soit on demandait aux élèves de le laisser à la porte ou au casier, ou bien le cellulaire était utilisé à des fins de travail. »

Rémi Sabourin enfonce le clou. « Ce n’est pas un changement, il y avait déjà des règles dans les conseils scolaires et les écoles à ce sujet, mais on voit là le jeu d’un gouvernement populiste. Dire que 97 % des parents souhaitaient des restrictions, c’est jouer sur les mots, car ça ne change rien pour les élèves. »

Un peu plus d’élèves dans les salles de classe

Ce devait être l’une des grandes réformes de la rentrée scolaire : un nombre d’élèves dans les salles de classe porté à 28 entre la 9e et la 12e année pour la rentrée scolaire. Mais il y a quelques jours, le ministre de l’Éducation, Stephen Lecce, a annoncé que son gouvernement faisait volte-face sur le projet. Le nombre d’élèves maximum qu’une classe peut contenir augmentera « d’un demi-élève », l’équivalent d’un total de 22,5 élèves par classe.

De la « pure rhétorique », insiste le président de l’AEFO. « En 2022-2023, on sait qu’il y aura 3 400 enseignants en moins d’après ce que le gouvernement a dit. Ils ont juste réussi à faire que le nombre ne change pas énormément pour cette rentrée. Côté francophone, l’offre de cours va diminuer, il est certain que les écoles vont être affectées, car par exemple dans les régions rurales, il est difficile de maintenir une offre de cours différente de la high school anglophone derrière. »

« C’est un changement », concède Mme Chouinard. « Beaucoup de conseils scolaires avaient compris que la taille devait changer. Certains conseils avaient dû mettre des gens à la porte ou ne pas renouveler leur contrat. Les horaires et les programmes des cours ne peuvent pas se faire deux semaines avant la rentrée. »

Test de mathématique pour les enseignants

La surprise de dernière minute peu avant la rentrée. Le gouvernement a confirmé aller de l’avant avec un test en mathématiques pour tous les nouveaux enseignants de la province.

« On sait que la numératie est très importante pour Doug Ford », analyse Mme Chouinard. « Ce qui est plus curieux, c’est que tous les professeurs vont devoir passer ce test. Dans le contexte où il y a plusieurs écoles francophones qui débordent, c’est certain que les tests de mathématique vont avoir un impact plus fort sur les conseils et écoles francophones. »

Une incidence sur les écoles francophones? Rémi Sabourin le croit en tout cas. « C’est ajouter une barrière au recrutement pour les enseignants francophones, ça ne vas pas vraiment aider. Il faut attaquer les barrières que peuvent avoir les parents et les jeunes vis-à-vis des mathématiques. Rappelons que pour les francophones, les mathématiques ne sont pas un problème, si on regarde les résultats en 3e et 6e année. »

Curriculum d’éducation sexuelle

On attendait des changements assez drastiques à la réforme du curriculum d’éducation sexuelle. Les modifications dévoilées par le gouvernement sont finalement mineurs. L’orientation sexuelle et l’identité de genre seront bien enseignées à la rentrée, mais décalées de deux ans, pour être abordées respectivement en 5e et  8e années.

Encore une fois, le président de l’AEFO se montre dubitatif. « En bout de ligne, on est revenu pas mal au curriculum présenté par le gouvernement libéral en 2015 et qui était passé par une panoplie de consultations, et des intervenants comme des travailleurs sociaux, la police et les enseignants. Le plus grand changement maintenant, c’est que les parents peuvent retirer les enfants pour toute raison. Cela pourrait venir causer certains troubles, s’ils sont retirés pendant les cours. Où iront-ils par exemple? »

« Ça ne change pas grand-chose », admet Mme Chouinard. « Le gouvernement a tenté de sauver la chèvre et le chou, en répondant à la frange plus conservatrice du Parti progressiste-conservateur, tout en ne s’aliénant pas la frange centriste. Plusieurs n’étaient pas à l’aise avec ces changements comme Tanya Granic Allen (présidente du groupe de parents conservateurs Parents as First Educators). »