Alexis Normand était en spectacle en début de soirée, samedi. Photo: Rachel Crustin / ONFR

PIKE LAKE – Le 41e festival fransaskois s’est tenu la fin de semaine dernière au parc provincial de Pike Lake, en Saskatchewan. ONFR était sur place pour discuter avec la communauté francophone de cette province des prairies.

Si 1,2 % de la population saskatchewanaise déclare le français comme première langue parlée, ici, « tout le monde parle français », nous lance un homme à l’entrée du terrain réservé pour le Festival fransaskois, dans le parc provincial de Pike Lake.

L’événement donne l’impression d’un rassemblement de famille. C’est d’ailleurs ce que nous mentionnent spontanément les personnes interrogées. La fransaskoisie étant dispersée à travers la province, le Festival fransaskois est le prétexte par excellence pour se retrouver au même endroit une fois par année.

Certains viennent aussi du Manitoba, de l’Ontario, du Québec ou des Maritimes pour renouer avec leurs cousins, de sang ou de coeur.

C’est le cas du musicien Michel Lalonde. Membre du groupe la Raquette à claquettes, en tête d’affiche du festival, et mieux connu en Ontario pour l’époque Garolou, il est établi à l’Île-du-Prince-Édouard depuis quelques années. Il profite de l’occasion pour monter sur scène, mais aussi pour voir sa fille, ses petites-filles et ses amis.

Michel Lalonde a vécu en Saskatchewan pendant une trentaine d’années. Photo : Rachel Crustin / TFO

« Je me suis occupé de la programmation du festival pendant quelques années. Je le regarde maintenant d’un œil plus distant, mais c’est le fun d’être là comme participant et comme musicien », explique-t-il au micro d’ONFR.

De la relève

Même si le festival a connu des années plus achalandées, Michel Lalonde est optimiste. « Quand je regarde la communauté, ce qui m’encourage, c’est qu’on voit beaucoup de nouveaux visages et de jeunes familles. Je sens une espèce de relent, alors que certaines années ont été plus difficiles. »

Parmi ces nouveaux visages, il y a ceux des curieux qui viennent simplement vivre une expérience fransaskoise. C’est le cas de Joanne Lussier-Demers et Marc Demers. Le couple venu de Winnipeg avait l’habitude d’assister au festival Terre Ferme, organisé par la famille Campagne, qui s’est terminé l’an dernier. « On connaît déjà plusieurs des artistes, comme Andrina Turenne ou Fire & Smoke, du Manitoba, et bien sûr, la famille Campagne. »

Sylvie Clairefond, à gauche, et Samblo Marseille, à droite, viennent tous deux de France et ont choisi de s’établir en Saskatchewan. Photo : Rachel Crustin / ONFR

De son côté, Samblo Marseille vit pleinement sa nouvelle identité fransaskoise. Arrivé à Saskatoon au mois de mars, il s’est senti particulièrement accueilli dans la communauté. C’est aussi ce qu’a vécu Sylvie Clairefond, il y a près de trois ans. Ces deux Français d’origine s’impliquent activement parmi les bénévoles de l’événement.

Une grande partie de la relève de la communauté fransaskoise est aussi formée de ses enfants, nombreux à accompagner leurs parents jusqu’à tard en soirée. La disco silencieuse, menée par Shawn Jobin, les a particulièrement fait danser.

En plus d’animer l’événement, Shawn Jobin était responsable de la fin de soirée du samedi. Photo : Rachel Crustin.

Pour tous les âges

De la zone jeunesse en journée aux feux de camp pour les couche-tard, le Festival fransaskois tente de rejoindre l’ensemble de sa communauté. La soirée du samedi était la plus remplie au niveau musical. Marie-Véronique Bourque s’est produite en fin d’après-midi, suivi plus tard par Flora Luna. Nommée par Francopresse comme l’une des dix personnalités influentes de la francophonie canadienne, Alexis Normand a touché le public avec ses chansons qui traitent d’insécurité linguistique de façon intime.

Le duo C’est ma cousine, composé de Sylvie Walker et Liz Tkachuk, a fait rire la foule avec ses « invités prestigieux, » c’est-à-dire d’autres artistes fransaskois venus personnifier de grands noms de la chanson. On a ainsi pu voir Isabelle Mercier en Isabelle Boulay ou Anique Granger en Neil Young.

Andrina Turenne et le duo de Claire Morrison et Daniel Péloquin-Hopfner, Fire & Smoke, ont poursuivi la soirée avant l’arrivée du clou du spectacle, le groupe fransaskois la Raquette à claquettes.

Alexis Normand a récemment lancé Empreintes, une compilation des chansons francophones qui ont jalonné sa carrière. Photo : Rachel Crustin / ONFR

Le Festival fransaskois avait adopté le thème « Ouest’ern » pour la 41e édition. Photo : Rachel Crustin / ONFR

De gauche à droite, Liz Tkachuk, Sylvie Walker et Isabelle Mercier, qui arborait une grande perruque rousse pour interpréter une chanson d’Isabelle Boulay. Photo : Rachel Crustin / ONFR

Certains festivaliers ont répondu à l’appel de danser en couple durant une chanson d’amour de Neil Young, interprétée par Anique Granger et le duo C’est ma cousine. Photo : Rachel Crustin / ONFR

Plusieurs musiciens, dont Alexis Normand, sont retournés dans la foule pour regarder les autres prestations. Photo : Rachel Crustin / ONFR

La Raquette à claquette profitait d’une tournée de six dates en Saskatchewan pour s’arrêter au Festival fransaskois. Photo : Rachel Crustin / ONFR

Un effort d’inclusion

Plusieurs personnes rencontrées souhaitent que la communauté fransaskoise continue d’être plus inclusive et diversifiée. Parmi les partenaires sur place, on retrouvait entre autres le Réseau en immigration francophone, l’Association des parents fransaskois. Il y a aussi l’Association jeunesse fransaskoise, qui a créé l’événement il y a 41 éditions et qui s’implique toujours dans une partie de la programmation.

L’organisme En toute fierté était aussi sur place. L’initiative de Denis Rouleau, avec l’Assemblée communautaire fransaskoise, souhaite accompagner la communauté LGBTQ+ francophone de la Saskatchewan. La soirée du samedi s’est terminée avec un petit spectacle d’art de la drag, mettant en vedette le drag king Ford Ranjer.

Denis Rouleau est le fondateur du projet En toute fierté et Coordonnateur Concertation et renforcement communautaire à l’Assemblée communautaire Fransaskoise. Photo : Rachel Crustin / ONFR

Le drag king Ford Ranjer s’est entre autres déhanché sur la chanson Saskatchewan du groupe québécois les Trois accords. Photo : Rachel Crustin / ONFR

Les festivaliers ont bien apprécié le disco silencieux de Shawn Jobin, samedi soir. Photo : Rachel Crustin / ONFR

Les festivaliers ont bien apprécié le disco silencieux de Shawn Jobin, samedi soir. Photo : Rachel Crustin / ONFR

Mais c’est l’activité du dimanche qui a été particulièrement touchante. La religion catholique prend encore une grande place dans la communauté francophone de la Saskatchewan et la messe du dimanche qui s’est fait sur le site du festival a été officiée par le père Daniel Louh de la paroisse Saints-Martyrs-Canadiens. Juste avant, deux membres de la paroisse Saint-Jean-Baptiste de Régina, Roger Lepage et Francine Proulx-Kenzle, se sont adressés à l’assemblée pour partager leur expérience en tant que parents de membres de la communauté LGBTQ+.

Ils ont monté une conférence intitulée « L’accueil de la communauté LGBTQ+ au sein de l’église » afin d’ouvrir le dialogue auprès des fidèles, particulièrement attentifs à leur présentation. Alors que leurs enfants ne se sentaient pas acceptés au sein de l’Église, ils ont choisi d’agir en alliés et parcourent la province avec cette présentation. Ils ont même indiqué avoir reçu des demandes pour la présenter en anglais.

Mission accomplie

La présidente du Conseil culturel fransaskois (CCF), qui organise le Festival fransaskois, s’est dite satisfaite de cette 41e édition. Anne Brochu Lambert s’est entretenue avec ONFR ce dimanche.

« Les gens avaient l’air contents de leur expérience. C’est ce qui est important. C’est à eux et elles de devenir des ambassadeurs pour les prochaines éditions. »

Anne Brochu Lambert est présidente du Conseil culturel fransaskois depuis 2019. Photo : Rachel Crustin / ONFR

Celle qui s’implique au CCF depuis 10 ans explique que le nombre de billets vendus était satisfaisant avant même que le festival débute, selon les attentes de l’organisme pour cette année.

Anne Brochu Lambert conclut : « On va se donner le temps de laisser la poussière retomber et, comme chaque année, on aura une conversation sur le bilan. Moi, je trouve que c’est mission accomplie. Je nous souhaite du succès comme ça encore longtemps, et de la place pour grandir. »