Services de santé en français : les francophones du Niagara veulent mieux
WELLAND – Écartés de la première phase de concertation, les acteurs francophones en santé de la Péninsule ont finalement été entendus par l’équipe santé Ontario Niagara (ESON) afin de prendre en compte les services en français dans le projet final remis au ministère de la Santé et des Soins de longue durée.
Alors que partout en province se constituent des équipes Santé Ontario, futurs regroupements de soins de santé coordonnés, ONFR+ observait, dès l’été dernier, de grandes disparités entre les 31 premiers projets pré-sélectionnés, sur la manière d’intégrer les services en français.
Ce grand écart d’approche était illustré dans un article publié en août, établissant une comparaison entre deux projets aux antipodes : celui de l’équipe Santé Ontario Ottawa Est et celui de son homologue du Niagara, l’équipe santé Ontario Niagara.
Alors que la première a bâti son modèle sur des services entièrement bilingues, sous le leadership de l’hôpital Montfort, la seconde n’avait tout simplement pas consulté les professionnels de santé régionaux avant d’envoyer sa candidature initiale, en juillet, au ministère de la Santé et des Soins de longue durée.
Une situation dénoncée par Marcel Castonguay, directeur général du Centre de santé communautaire Hamilton-Niagara (CSCHN), et reconnue par Tom Stewart, directeur générale de la structure Niagara Health, une structure majeure de la région dans l’offre de soins.
Trois organisations consultées au dernier moment
Avant de rendre sa copie finale, en octobre, l’ESON a changé son fusil d’épaule, faisant participer les trois principales organisations francophones de la région : le CSCHN, le Foyer Richelieu – un établissement de soins de longue durée basé à Welland – et l’Entité 2, chargée de la planification des services de santé en français sur un territoire s’étendant de Niagara Falls à Waterloo.
« Ils ont reconnu des faiblesses dans leur dossier d’autoévaluation concernant les services en français en soins primaires et les relations avec les peuples autochtones », explique Annie Boucher. L’agente de planification de l’Entité 2 a perçu alors « une ouverture » des responsables du projet « pour revoir leur approche ».
« On a nous-mêmes rédigé les textes dans la demande pour corriger ça, incluant les soins à domicile », précise-t-elle. « Les fournisseurs de soins de santé de l’équipe doivent fournir un continuum intégré, y compris en français, pour avoir la meilleure couverture de services en tout temps. On est tous à une table pour travailler sur ces transitions-là. »
« On va garder un pied dans la porte »
Le document soumis au ministère, l’ESON identifie la communauté francophone comme ayant besoin d’être « pleinement représentée dans le processus de demande complète », ajoutant que « 14 des membres actuels de l’équipe sont au total identifiés pour fournir des services en français, mais n’ont pas tous la capacité de fournir systématiquement ces services. » L’ESON s’engage par ailleurs à ce que « des services adaptés soient disponibles pour les francophones. »
« On va garder un pied dans la porte pour être consulté et être capable de faire des présentations », affirme Mme Boucher. « On ne veut pas de comité sur les services en français mais des représentations à toutes les étapes, que ce soit en santé mentale, en soins à domicile… avec une lentille francophone. »
Outre le CSCHN, le Foyer Richelieu et l’Entité 2, la liste de partenaires inclut les organisations de santé sans but lucratif offrant des services bilingues telles que les antennes régionales de l’Association canadienne de santé mentale Niagara et de la Société Alzheimer, mais aussi Contact Niagara, un organisme d’information bilingue sur les ressources en matière d’aide aux enfant affectés par l’autisme et d’autres troubles.
Si cette inflexion est accueillie comme un soulagement dans le Niagara, d’aucuns restent vigilants quant à la réelle mise en œuvre de ces services de santé en français, au regard du déficit actuel de tels services, notamment dans les hôpitaux, et en l’absence d’une stratégie musclée d’attraction des professionnels de santé bilingues dans cette région.
« On a posé les bases pour avoir une influence », assure la planificatrice. « Tous les signes qu’on nous a donnés sont positifs. Il y a un engagement de l’équipe à se former sur les obligations vis-à-vis de la Loi sur les services en français et à travailler avec communauté. »
D’autres équipes de la région intéressées
Et d’ajouter que d’autres équipes du territoire se sont montrées intéressées. « Dans la plupart des cas, on a identifié les faiblesses des candidatures, fait des recommandations et proposé des textes », précise Mme Boucher.
Reste à savoir comment ces intentions se traduiront par un accès fluidifié et coordonné dans les deux langues souhaité par le ministère. « Les équipes Santé Ontario doivent démontrer qu’elles respectent le rôle des peuples autochtones et des francophones dans la planification, la conception, la prestation et l’évaluation des services destinés à ces communautés », avait stipulé par courriel à ONFR+ le ministère, se disant attentif au respect de la Loi sur les services en français.
Le projet ESON regroupe 44 organismes œuvrant dans la santé, les services sociaux et communautaires, dont 60 médecins de soins primaires. La demande complète permettra de passer à la prochaine étape du processus de création d’une équipe Santé Ontario désignée.