Télétravail : un marché immobilier en folie pour l’Est ontarien

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« Du jamais-vu en 12 ans », voilà les propos d’un agent immobilier sur le marché actuel qui aura connu une année historique en raison de la pandémie. Parmi les gagnants de ce marché, figure l’une des régions les plus francophones de la province : l’Est ontarien dont les maisons se vendent comme des petits pains chauds.

« La COVID-19 nous a peut-être affectés au début, mais en 12 ans d’immobilier, j’ai jamais vu le marché fort comme ça. Les maisons se vendent toutes en offres multiples, elles restent 15 jours sur le marché maximum, c’est vraiment ridicule… C’est au moins 40 à 50 % de plus que l’an passé », lance Carl Bougie qui vend notamment des demeures à Rockland et Embrun.

À titre d’exemple, le Bureau de l’immobilier d’Ottawa (OREB) indique que 2 017 propriétés résidentielles ont été vendues en août dernier, contre 1 725 en août 2019, une augmentation de 17 %. Les ventes de maisons ont augmenté de 22 % comparativement à 2019 et de 2 % pour les condos, une tendance qui en dit long selon une courtière immobilière.

« On commence à voir de l’intérêt pour les bureaux à la maison. Les propriétés avec quatre chambres à coucher au lieu de trois rassurent les gens qui veulent un espace pour avoir un bureau à la maison », explique l’agente immobilière Dominique Michaud, qui vend certaines propriétés à L’Orignal et St-Isidore.

En raison du télétravail, la distance entre l’Est ontarien et Ottawa n’est plus autant prise en compte lors d’un achat immobilier, ce qui augmente les ventes.

« On voit une hausse dans des places comme Casselman, Rockland et Alfred, qui sont un peu en dehors de ce que les gens étaient prêts à faire auparavant comme voyagement (…). Il y a aussi le fait que le marché des maisons est tellement bon pour la vente à Orléans qu’ils peuvent aller à Casselman pour s’acheter quelque chose de moins cher que leur profit de vente », précise Dominique Michaud.

L’OREB affirme qu’une propriété de type condominium se vendait pour 383 640 dollars en août 2020, soit une augmentation de 24 % par rapport au même mois en 2019.

« Les prix ont monté, c’est écœurant! J’ai un condo qui était à 172 500 $ il y a trois ans, j’ai monté le prix à 209 000 $ et je l’ai finalement vendu en deux ans à 230 000 $. (…) J’ai jamais vu ça en 12 ans de mettre une maison sur le marché et dire ‘‘pas d’offres avant lundi’’ et rendu le lundi, j’ai quatre à cinq offres », prend en exemple Carl Bougie.

Les régions rurales ont la côte

Le fait que l’Est ontarien et d’autres régions plus en campagne connaissent une hausse est lié au désintéressement des gens pour les grandes villes en Ontario et ailleurs au Canada, juge la courtière Dominique Michaud.

« L’Est ontarien voit la même vague qu’un peu partout. Même les gens de Toronto se rapprochent d’Ottawa. C’est définitivement en raison du prix de l’immobilier, les gens ne sont plus capables de s’offrir la maison qu’ils ont en ville, donc il y a un intérêt qui augmente à l’est, mais il y en a aussi dans l’Ouest d’Ottawa. »

Pour Carl Bougie, ce sont les gros prix à Ottawa qui amènent une hausse des demeures à une quarantaine de minutes de la capitale canadienne.
« Les prix sont exorbitants à Ottawa, en montant de Rockland vers Ottawa, les maisons sont le double du prix que dans notre région à Hawkesbury, Alfred et Casselman. Les prix font monter les gens par ces villes-là. »

Ce ne sont pas juste les ventes de maisons qui ont augmenté dans les coins ruraux, la vente de chalets vient aussi en haut de la liste, croit un agent torontois.

« L’achat des chalets a été effarant et complètement fou. C’est sûrement un des secteurs qui a le plus augmenté en termes de prix. Je parlais avec des collègues hors de Toronto qui sont dans des quartiers typiquement reliés aux chalets et ils me disent qu’ils se sentent dans un mini-Toronto avec cette vente aux enchères », donne en exemple Claude Boiron, agent d’immeuble dans le Grand Toronto.

Un marché toujours en force à Toronto

Reconnue comme un marché à haut prix et en forte croissance dans les dernières années, l’étoile du Grand Toronto ne pâlit pas malgré la baisse d’intérêt pour les grandes villes.

« Je travaille depuis 20 ans à Toronto, donc j’ai une assez bonne impression du marché. Je n’ai donc pas l’impression que des centaines de milliers de personnes quittent Toronto, peut-être c’est des milliers ou un peu plus, mais on ne se retrouve certainement pas avec des immeubles à condos vides », croit l’agent immobilier.

Ce dernier pense que des gens à Toronto vendent… mais pour y rester.

« Je remarque que des gens vendent leur grande maison à Toronto pour s’acheter un petit condo à proximité. Ensuite, avec l’argent du profit, les gens s’achètent une seconde demeure ou un chalet. »

Claude Boiron croit qu’il est encore impossible de déterminer pendant combien de temps le marché pourra surfer sur cette vague.

« Il y a tellement d’inconnus, si on a une deuxième vague de la COVID-19, il y aura des conséquences. »