Test d’évaluation de français : l’échec du gouvernement Trudeau

Source: Pixabay

OTTAWA – En novembre 2018, le gouvernement libéral de Justin Trudeau annonçait fièrement avoir trouvé une solution aux inégalités constatées entre les tests de français et d’anglais pour les candidats à l’immigration. Mais deux ans plus tard, la version française reste plus chère, moins accessible, et ses délais plus longs.

« Le coût moyen national du test de français sera comparable au coût moyen du test d’anglais et il sera disponible dans les villes où il n’est pas disponible actuellement, à partir du 1er décembre », promettait le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de Citoyenneté du Canada (IRCC) de l’époque, Ahmed Hussen, en conférence de presse au collège La Cité, à Ottawa.

Deux ans plus tard, force est de constater que les promesses libérales n’ont pas eu l’effet escompté.

Dans son plus récent rapport annuel, le commissaire aux langues officielles du Canada, qui s’était intéressé à la question en 2016, se dit satisfait de voir qu’IRCC a mis plusieurs mesures en œuvre depuis son rapport d’enquête de 2017. Mais le suivi qu’il a opéré en 2019 lui a aussi fait remarquer que, deux ans plus tard, « la qualité des services de test de langue française n’est toujours pas égale à celle des services de test de langue anglaise : les écarts de coûts, la disponibilité géographique et le temps d’attente global sont toujours monnaie courante ».

« Les tests linguistiques ne sont toujours pas de qualité égale dans les deux langues officielles » – extrait du rapport annuel 2019-2020 du commissaire aux langues officielles

Le test d’évaluation linguistique est obligatoire pour compléter les demandes d’immigration afin de prouver la maîtrise d’une des deux langues officielles. Pour beaucoup d’intervenants en immigration au sein de la francophonie, les inégalités entre les tests de français et d’anglais sont un obstacle supplémentaire qui se dresse sur la route des candidats francophones à l’installation à l’extérieur du Québec.

Contacté par ONFR+, le Commissariat aux langues officielles déplore que le plan d’action sur les évaluations linguistiques d’IRCC « ne comprend aucune mesure pour résoudre deux enjeux soulevés dans le rapport [de 2017] : la disparité des périodes d’attente pour recevoir les résultats des tests d’évaluation en langue française et anglaise ainsi que la disparité des périodes d’attente entre la date d’inscription et celle du test en français et en anglais ».

Moins d’accès, délais plus longs et coûts plus élevés

En 2016, le test d’évaluation de français était disponible dans 18 centres au Canada, dont huit au Québec qui gère lui-même son processus d’immigration. Aujourd’hui, bien que le nombre de centres a considérablement augmenté, le test n’est toujours pas disponible à l’Île-du-Prince-Édouard et dans les territoires. En Saskatchewan, il n’est offert qu’à Regina, et en Ontario, aucune option n’existe dans le Nord de la province.

Deux organismes français proposent le test : la Chambre de commerce et d’Industrie Île-de-France qui compte 39 sites, dont 21 au Québec et huit en Ontario, et le Centre international d’études pédagogiques (CIEP) qui rapporte 22 centres, dont 13 au Québec.

À titre de comparaison, le Programme canadien d’indice de compétence en langue anglaise (CELPIP) dispose de 85 sites, et l’International English Language Testing System (IELTS) revendique 150 centres au Canada.

Alors qu’il faut compter de quatre à 13 jours pour obtenir ses résultats en anglais, les délais pour le test de français vont de quatre à six semaines, selon les centres joints par ONFR+.

« Dans son rapport de suivi des recommandations en novembre 2019, le commissaire a noté que le coût global des tests en français demeurait plus élevé que celui des tests en anglais », note également le Commissariat. 

Vérification faite, alors qu’il variait entre 330 $ et 485 $ contre 265 $ à 365 $ pour le test d’anglais en 2016, il en coûte désormais entre 380 $ et 440 $ pour le test de français, contre 300 $ en moyenne pour le test d’anglais.

Encore des plaintes en trois ans

Le dossier des tests d’évaluation avait fait les manchettes en 2016 et plusieurs plaintes avaient atterri sur le bureau du Commissariat aux langues officielles.

Depuis, 15 nouvelles plaintes ont été enregistrées, dont une en 2017, deux en 2018 et 12 en 2019. 13 proviennent de l’étranger, deux du Québec et une de l’Île-du-Prince-Édouard.

Le commissaire Raymond Théberge dit garder un œil sur cet enjeu.

Joint par ONFR+, le bureau de la ministre Joly a redirigé notre demande d’entrevue vers l’équipe du ministre de l’IRCC, Marco Mendicino,qui n’y a pas non plus répondu.