Un débat des chefs à saveur personnelle
[ONVote2018]
TORONTO – À 11 jours du scrutin, les trois chefs ont croisé le fer pour une dernière fois. Même si les programmes ont été quelque peu débattus, ce sont plutôt les attaques personnelles qui ont marqué cette joute politique.
JEAN-FRANÇOIS MORISSETTE
jmorissette@tfo.org | @JFMorissette72
Maintenant en tête dans les sondages, Andrea Horwath, la chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), a été la cible principale de la soirée. Doug Ford, chef du Parti progressiste-conservateur (Parti PC), n’a d’ailleurs pas attendu avant de décocher des flèches vers son adversaire.
« Votre plan va annihiler la classe moyenne », lui a-t-il lancé.
Il a aussi accusé le NPD d’être un parti avec des militants « extrémistes, qui font l’apologie d’Adolf Hitler ».
« Ce sont des attaques qui divisent, dignes des tabloïdes », a rétorqué à un moment Mme Horwath, accusant M. Ford de « mentir » sur plusieurs points.
À de nombreuses reprises au cours de la joute, Doug Ford a été appelé à défendre son absence de programme, alors que le vote par anticipation a déjà débuté en Ontario.
Le chef du Parti PC a assuré que si les Ontariens le portent au pouvoir le 7 juin, « un nouveau jour va se lever sur l’Ontario ».
« À qui faites-vous confiance pour gérer votre argent? » – Doug Ford
Avec son plan, « personne ne va perdre son emploi », a-t-il également assuré, en ajoutant que pendant qu’il était conseiller municipal à Toronto, il avait trouvé des économies à grande échelle.
Mais cela n’a pas été suffisant pour convaincre ses adversaires.
« Vous pensez que faire une série de promesses équivaut à faire un programme électoral chiffré », lui a lancé Mme Horwath.
Kathleen Wynne, la chef du Parti libéral de l’Ontario (PLO), a pour sa part, dû défendre son bilan et elle s’est même « excusée » auprès des électeurs.
« Désolée si les gens ne m’aiment pas, mais je ne suis pas désolée que l’on ait travaillé pour protéger l’environnement ou que l’on ait augmenté le salaire minimum », a-t-elle dit.
Mme Wynne a aussi lancé son lot d’attaques envers ses deux adversaires, indiquant que M. Ford « n’avait pas de plan » et que Mme Horwath avait un plan, mais « truffé d’erreurs », en faisant référence à l’erreur comptable dans la plateforme du NPD.
Le spectre Bob Rae
Doug Ford n’a pas hésité à sortir le spectre de l’ancien premier ministre ontarien, Bob Rae, pour attaquer son adversaire néo-démocrate. Il a rappelé que lorsque M. Rae était au pouvoir, des milliers d’emplois avaient été perdus.
« Les entreprises que je visite en Ontario sont terrifiées à l’idée d’un gouvernement néo-démocrate », a-t-il lancé.
Mme Horwath a souligné que lorsque M. Rae était en poste, la situation économique de l’Ontario était bien différente de celle d’aujourd’hui.
« Nous sommes en 2018, pas dans les années 90 et je ne suis certainement pas Bob Rae » – Andrea Horwath
Même Bob Rae a fait une sortie publique sur Twitter afin de réagir à la mention de son nom durant le débat.
« Pour votre information, je suis entièrement d’accord que 2018 n’est pas 1990 et qu’Andrea Horwath n’est pas Bob Rae », a-t-il écrit sur le média social.
Le bilan Wynne
À plusieurs reprises au cours du débat, Mme Wynne a dû défendre son bilan, rappelant qu’en étant au pouvoir, il « fallait faire des choix difficiles ».
« Je comprends qu’il y a encore du travail à faire », a néanmoins insisté Mme Wynne.
Mme Wynne a aussi été appelée à justifier la vente d’Hydro One, un boulet à sa cheville depuis le début de la campagne.
« Nous avons vendu une pièce d’une pièce, d’une pièce pour financer des projets d’infrastructures. » – Kathleen Wynne
Mme Horwath, qui est opposée à cette privatisation, a rapidement indiqué que les projets d’infrastructures auraient pu être financés d’une autre manière, « qui n’aurait pas mis en péril l’avenir de la province ».
En mêlée de presse après le débat, la première ministre sortante a promis vouloir « travailler sur les fondations » que son parti a mises en place depuis quatre ans.
Kathleen Wynne, gagnante
Selon la politologue au Collège militaire à Kingston, Stéphanie Chouinard, Kathleen Wynne est sortie gagnante de ce débat.
Bien qu’elle avoue que ce débat n’en était pas un d’idées, elle souligne que Mme Wynne a su rester calme dans les échanges et était en contrôle des dossiers.
Mme Chouinard souligne que Mme Horwath a été très « agressive » dans ses interventions et elle ne sait pas si la stratégie va être payante. La politologue croit, en fait, que Mme Horwath aurait tout à son avantage de miser davantage sur les différences de son parti et de celui de Mme Wynne.
Stéphanie Chouinard estime finalement que M. Ford n’a pas marqué les esprits dans la troisième joute de campagne.
« Par moment, il était complètement déconnecté de la conversation », a-t-elle noté en entrevue avec #ONfr.
Groupe Média TFO, en collaboration avec Radio-Canada, organise un débat le 29 mai prochain entre trois représentants des principaux partis pour parler des enjeux de la francophonie. Les trois chefs feront des apparitions vidéos au cours de la joute.
Quelques phrases choc :
Sur les garderies, après que M. Ford ait laissé entendre que les garderies gérées par le gouvernement ferment à 16h30
« Êtes-vous déjà allé dans une garderie? » – Kathleen Wynne
Sur le programme électoral du Parti PC
« Les gens ont commencé à voter hier, où est votre programme électoral? » – Andrea Horwath
« Vous pensez que faire une série d’annonces équivaut à faire un programme électoral chiffré. » – Andrea Horwath
« Si vous voulez défendre la classe moyenne, pourquoi vous opposez-vous à la hausse du salaire minimum » – Kathleen Wynne
Sur les économies promises par M. Ford
« Pas une seule personne à Toronto n’a perdu son emploi quand j’étais à la ville et personne ne perdra son emploi dans la fonction publique sous un gouvernement conservateur. » – Doug Ford
Sur le spectre de Bob Rae
« Comment allez-vous empêcher une autre récession comme celle causée par le dernier gouvernement néo-démocrate. » – Doug Ford.