Un déficit pour les cinq prochaines années, selon le BRF
TORONTO – Contrairement aux prévisions financières du gouvernement, le Bureau de la Responsabilité financière de l’Ontario (BRF) prévoit que l’économie ontarienne sera déficitaire et que la dette augmentera drastiquement au cours des cinq prochaines années.
JEAN-FRANÇOIS MORISSETTE
jmorissette@tfo.org | @JFMorissette72
Dans son plus récent budget, le ministre des Finances, Charles Sousa, affirmait haut et fort que les trois prochains budgets de l’Ontario seraient également équilibrés. Toutefois, les plus récentes perspectives économiques du BRF prévoient tout le contraire.
En se basant sur des projections, le BRF prévoit « d’importants » déficits budgétaires pour les cinq prochaines années et qu’il atteindrait près de 6,5 milliards de dollars en 2022.
En fait, le BRF estime que le déficit, cette année même, sera de l’ordre de 500 millions de dollars, alors que le gouvernement prévoit pour la même période un surplus de 600 millions de dollars. Une différent comptable serait à l’origine de cet écart, explique le BRF.
« Il serait donc peu probable que le gouvernement arrive à équilibrer le budget sans apporter d’importants ajustements à sa politique budgétaire afin d’augmenter ses recettes ou de réduire ses dépenses »
Le directeur de la responsabilité financière de l’Ontario, Stephen LeClair, note, dans son rapport, que la hausse des revenus prévus cette année dans son budget est due en partie à la vente d’actifs qui est comptabilisée une seule fois dans le système et que cela ne pourra pas être ajouté dans les années à venir.
Le BRF ajoute qu’un ralentissement dans la croissance des revenus est aussi à prévoir prochainement.
« L’incertitude entourant l’orientation politique de la nouvelle administration aux États-Unis pourrait freiner l’investissement des entreprises et nuire aux perspectives économiques de la province », met en garde M. LeClair.
Le BRF estime également que le risque lié à l’éclatement de la bulle immobilière à l’échelle nationale représente un risque sur l’économie de l’Ontario et pourrait nuire à la croissance actuelle.
Une augmentation de la dette à prévoir
Étant donné les déficits cumulatifs de la province et les dépenses prévues en infrastructure, le BRF estime que la dette nette de l’Ontario grossira de 76 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années et le ratio de la dette nette au PIB monterait alors à 40,3 % d’ici 2021-2022. Selon ses estimations, la dette frôlera les 400 milliards de dollars en 2022.
Le gouvernement estime plutôt que la hausse de la dette par rapport dette/PIB sera moins élevée que la prévision du BRF. Dans son dernier budget, la dette nette de la province doit 311,9 milliards de dollars à la fin de l’année fiscale.
Un budget équilibré, maintient le ministre des Finances
Le ministre des Finances, Charles Sousa, martèle que le plan du gouvernement pour maintenir l’équilibre budgétaire tient la route.
« Notre budget est équilibré pour cette année, l’an prochain et l’autre d’après également », s’est-il exclamé à la sortie de la période de questions.
« Cette année, nous avons excédé nos objectifs », a-t-il rappelé.
Charles Sousa a salué le travail du BRF, tout en ajoutant que les prédictions du gouvernement sont prudentes et que l’économie de l’Ontario se porte bien.
Les chiffres manipulés, estime Patrick Brown
Le chef du Parti progressiste-conservateur (Parti PC) de l’Ontario, Patrick Brown, s’est dit consterné par les chiffres avancés par le BRF. Selon lui, cela démontre que le gouvernement manipule les chiffres « Il n’y a aucun budget équilibré et nous avons un grand déficit », a-t-il déploré.
« C’est un monde magique, ce n’est pas la réalité. Le gouvernement joue avec les chiffres et les leurs sont différents de ceux du BRF et de la vérificatrice générale (de l’Ontario) », a ajouté le chef de l’opposition officielle.
M. Brown estime que le gouvernement a manipulé les chiffres dans le seul but de se faire réélire l’an prochain et qu’il ne reflète pas la réalité de la province.
Le député du Nouveau Parti démocratique (NPD) de l’Ontario, Peter Tabuns, croit que les chiffres avancés par le BRF montrent bien que le budget de cette année n’est pas équilibré, comme le prétend le gouvernement.
Pour lui, il est toutefois clair que même s’il y a véritablement un équilibre budgétaire en Ontario, le gouvernement ne sera pas en mesure de le maintenir pour les années à venir.
« La vente d’Hydro One a toujours été dans le but de faire bien paraître le gouvernement (…). Franchement, c’est à se demander quels sont les autres actifs que le gouvernement est prêt à vendre pour équilibrer le budget? », s’est-il questionné.