Une semaine de revendications intenses pour les Franco-Manitobains

L'ancien hôtel de Ville de Saint-Boniface. Archives ONFR+

WINNIPEG – Les francophones du Manitoba ont eu du pain sur la planche au cours de la semaine. D’abord sur le dossier brûlant de la vente de l’ancien hôtel de ville de Saint-Boniface, mais aussi après la volonté du gouvernement manitobain d’éliminer les divisions scolaires gouvernées par des élus locaux.

À priori, le projet de loi 64, dévoilé lundi dernier, et lequel prévoit d’unifier 37 divisions scolaires (l’équivalent des conseils scolaires en Ontario) en une seule entité provinciale ne concerne pas les francophones. La Division scolaire franco-manitobaine (DSFM) serait pourtant écartée de ce regroupement en vertu de l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés.

Mais quelques ombres persistent.

« Si le changement est certes minime, il faut que l’on soit vigilant », explique Daniel Boucher, directeur général de la Société de la francophonie manitobaine (SFM) en entrevue pour ONFR+.

« On a une inquiétude par rapport aux programmes d’immersion en français qui sont directement inclus dans les divisions scolaires concernées par ce projet de loi. Les élèves doivent conserver l’occasion d’apprendre le français. »

Daniel Boucher, directeur général de la SFM. Archives ONFR+

D’autant que le nouveau projet de loi se caractérise par la suppression des postes de conseillers scolaires. Une nouvelle structure laquelle pourrait être moins « redevable aux Manitobains », croit la Fédération nationale des conseils scolaires francophones (FNCSF).

« Les conseillers scolaires permettent d’assurer l’engagement des membres des communautés relativement aux décisions qui touchent l’éducation. Ce processus démocratique vient en aide aux écoles qui sont appelées à trancher sur diverses questions éducatives », indique Louis Arseneault, président de la FNCSF, par voie de communiqué de presse.

« Certains de nos membres n’auront peut-être plus accès à des activités en français dans les écoles », craint Ariane Freynet-Gagné, présidente du Conseil jeunesse provincial (CJP).

« On attend que les décisions soient prises, mais on reste en alerte. »

L’enjeu est de taille, car si plus de 40 000 personnes possèdent le français comme langue maternelle au Manitoba, plus de 100 000 personnes le parleraient, selon les chiffres de Statistique Canada.

Un symbole historique malmené 

Ariane Freynet-Gagné était aussi lundi à l’hôtel de Ville de Winnipeg dans le but d’annuler la vente du bâtiment du 219, rue Provencher. En vain.

L’ancien édifice municipal de Saint-Boniface – le tout avant la fusion à la Ville de Winnipeg en 1972 -, abrite la Maison des artistes visuels francophones, les bureaux de Tourisme Riel ainsi que ceux du World Trade Centre Winnipeg.

L’ancien hôtel de Ville de Saint-Boniface. Archives ONFR+

Selon la décision validée par la Ville de Winnipeg ce lundi, la municipalité se départit de l’ancien hôtel de ville au profit de l’organisme Manitoba Possible, en passe de devenir le nouveau propriétaire du bâtiment historique.

Une décision qui fait a fait fulminer la SFM évoquant une « preuve de mépris total concernant les devoirs envers la minorité francophone », dans un communiqué publié en début de semaine. La bâtiment doit rester dans le domaine public, clame-t-elle.

Et les mots sont à la hauteur du choc à Saint-Boniface, officiellement un quartier de Winnipeg depuis la fusion de 1972, mais demeurant tout de même le foyer des francophones au Manitoba. D’autant que le boulevard Provencher est l’artère principale de l’endroit.

Archives ONFR+

« Nous ne voulons pas être locataire du bâtiment, que ce soit clair », laisse entendre Daniel Boucher. « On parle d’un symbole très important pour la communauté de Saint-Boniface. Il est très difficile à voir que cette vente immobilière sera sans conséquence. On veut que le 219 Provencher soit une entité unique, et non d’une tierce partie. »

Pour le directeur général « le symbole de payer un loyer dans notre propre bâtiment » est avant tout une note « loin d’être positive ».

Ariane Freynet-Gagné n’était pas née en 1972 lors de l’amalgamation. « Mais tout c’était un mariage un peu forcé », dit-elle. « En tout cas être locataire au 219, boulevard Provencher, ça ne sera jamais une option. »

La SFM continue d’explorer tous les options, même judiciaires pour infléchir la décision de la Ville de Winnipeg.