
Budget 2025 : des milliards pour l’emploi et un déficit qui s’envole

Le ministre des Finances a présenté, ce jeudi, le budget de 2025. Un plan financier pas comme les autres : le premier depuis la réélection du gouvernement Ford et depuis l’application des droits de douane américains. Avec son « plan pour protéger l’Ontario », la province met les bouchées doubles sur la protection des emplois et le développement économique. Tandis que le déficit va tripler cette année, à hauteur de 14,6 milliards de dollars, le retour à l’équilibre budgétaire est repoussé d’un an, soit en 2027-2028.
Dans un contexte d’augmentation du chômage et de prévision de pertes d’emploi, le gouvernement présente un plan qui ambitionne de protéger les travailleurs et les entreprises, via notamment la création d’un fonds d’aide atteignant jusqu’à 5 milliards de dollars dans les secteurs fortement impactés par les tarifs douaniers.
Parmi les aides pour les entreprises : 1,3 milliard de dollars en crédit d’impôt pour l’investissement dans la fabrication ainsi qu’un report d’impôts de 11 milliards de dollars pour 80 000 entreprises, incluant un rabais de 2 milliards par l’intermédiaire de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (WSIB), afin de maintenir les travailleurs en poste.
Le gouvernement augmente l’enveloppe du Fonds pour le développement des compétences (FDC) à près de 1 milliard sur trois ans, soit un total de 2,5 milliards, pour la formation des travailleurs de l’Ontario, dont ceux qui sont touchés par les mises à pied résultant des tarifs.
Cela comprend un nouveau financement de 705 millions de dollars afin de former davantage de travailleurs, notamment dans l’industrie manufacturière et le secteur de la santé.
Près de 600 millions de dollars sont alloués au Fonds pour l’investissement de l’Ontario, afin de créer des emplois et attirer des investissements.

Le gouvernement mise sur le développement du secteur minier en injectant 500 millions de dollars dans la création d’un nouveau Fonds pour le traitement des minéraux critiques (FTMC), en plus de 70 millions sur quatre ans pour le Fonds pour la participation des Autochtones « aux processus de réglementation » de l’exploration minérale et au développement minier, de par les débouchés économiques qui découleraient du secteur.
Le montant maximal des garanties de prêt par l’entremise du Programme de financement pour les initiatives autochtones est également triplé, passant à 3 milliards de dollars.
175 millions sur cinq ans appuieront les vignerons et les établissements vinicoles de la province, auxquels s’ajoutent 420 millions sur cinq ans pour l’élargissement du Programme d’aide à la promotion des vins de la Vintners Quality Alliance (VQA).
Pour le particulier, ça change quoi?
Dans le cadre du nouveau budget, l’Ontario a annoncé plus tôt cette semaine réduire de façon permanente la taxe sur l’essence, soit une économie de 115 $ en moyenne par ménage chaque année, et abolir le péage sur l’autoroute 407 est, le seul tronçon provincial restant, faisant réaliser chaque année une économie de 7200 $ aux navetteurs quotidiens.
Côté logement, si on ne voit pas de rhétorique sur le retour du contrôle des loyers, à partir de 2026, les municipalités pourront réduire jusqu’à 35 % le taux d’imposition foncière municipal pour les logements locatifs abordables admissibles.
Cinq milliards de dollars sont ajoutés au Fonds ontarien pour la construction pour « aider à débloquer des projets d’infrastructure dans des domaines prioritaires », dont le logement abordable.
En tout début de semaine, le ministre du Logement Rob Flack annonçait un nouvelle loi destinée à accélérer la construction de logements et d’infrastructures. Parmi les mesures fortes, la province réduira les frais d’aménagement locaux « qui peuvent ajouter des centaines de milliers de dollars au coût des nouveaux logements » et qui varient d’une ville à l’autre, et ce, en collaboration avec les municipalités.
400 millions de dollars supplémentaires seront injectés au Fonds pour les réseaux d’eau pour la construction de logements (FRECL) et au Programme pour l’infrastructure municipale et le logement (PIML), soit 2,3 milliards de dollars sur quatre ans.
Pour 2025-2026 une aide aux chercheurs d’emploi via le programme Meilleurs emplois Ontario qui recevra 50 millions supplémentaires pour couvrir des dépenses telles que les frais de scolarité, de transport et de garde d’enfant.
Hausse spectaculaire du déficit en 2025-2026
La projection de déficit pour 2024-2025 est chiffrée à 6 milliards (mieux que les 9,6 milliards estimés un an plus tôt). En revanche, l’estimation du déficit pour 2025-2026 s’envole avec 14,6 milliards de dollars, plus de trois fois plus que les projections d’il y a un an (4,6 milliards).
Le gouvernement envisageait l’année dernière un retour à l’équilibre budgétaire dès 2026-2027, maintenant repoussé à 2027-2028 avec un mince excédent de 0,2 milliard de dollars.
Le coût total des dépenses s’élève à 232 milliards de dollars, 5 milliards de plus que dans le budget 2024.
Comme prévu, la croissance du PIB est faible avec respectivement 0,9 % et 1,1 % en 2025 puis en 2026, avec une projection de remontée à 2 % d’ici à 2027.

Déception de l’opposition quant à la santé, à l’éducation et au logement
Enfin, comme annoncé précédemment pour le secteur de la santé, l’objectif du gouvernement est que tous les Ontariens aient accès à un médecin de famille d’ici 2029. Un objectif pour lequel il met 1,8 milliard de dollars sur la table pour rejoindre 2 millions de personnes qui en sont dépourvues. Cette année, 80 équipes de santé primaire seront renforcées pour 300 000 personnes.
En éducation, le gouvernement annonce un investissement de 30 milliards de dollars au cours des 10 prochaines années, dont 23 milliards pour la construction et rénovation d’écoles. Pour 2025-2026, 2 milliards seront alloués à la réfection d’écoles existantes.
La cheffe officielle Marit Stiles qualifie pourtant le budget d’une « occasion ratée de renforcer l’Ontario », notamment « pour les familles qui se demandent comment elles vont joindre les deux bouts cet été, pour le personnel de la santé surmené qui peine à s’en sortir, pour les travailleurs de l’automobile inquiets pour leur avenir. Ce budget n’offre ni espoir ni réconfort. »
Déplorant notamment que « Le budget de cette année réduit sérieusement le financement de l’éducation postsecondaire, ne parvient pas à combler l’écart dans nos écoles, renforce les échecs de Ford en matière de logement, et ne livre aucun soutien pour les communautés qui font face aux fermetures de salles d’urgences et de projets d’hôpitaux retardés ».
« Les maisons, les hôpitaux et les écoles sont des infrastructures essentielles à la construction nationale pour renforcer l’Ontario et bâtir un avenir à l’épreuve des tarifs. Ceci n’est qu’une rustine budgétaire qui rate complètement la cible en matière de réconfort, de soutien et de livraison de résultats pour Ontariens. »
La cheffe du Parti libéral Bonnie Crombie s’est, elle, dite : « consternée par le sort des jeunes qui n’ont pas accès au logement abordable, des familles qui ont du mal à payer pour leurs épiceries, des parents qui ne voient aucune amélioration dans les classes surpeuplées et des personnes âgées qui voient le financement des soins de santé diminuer tandis que les temps d’attente s’allongent ».
« Chaque budget qui ne s’attaque pas à la crise des soins de santé, de l’éducation et du logement aggrave les problèmes, a-t-elle pointé du doigt. Il faudra une décennie ou plus pour réparer les dégâts. Malgré la crise d’abordabilité, le budget n’offre aucun allègement significatif aux familles de travailleurs ».