Ces Franco-Ontariens qui quittent la province à cause du prix de l’immobilier
La situation devient intenable pour beaucoup d’Ontariens désireux de faire l’acquisition de leur premier bien immobilier ou simplement d’avoir plus d’espace de vie, sans se saigner pour ce faire. Certains Franco-Ontariens choisissent même d’aller s’installer dans d’autres provinces où la maison de leurs rêves est largement plus abordable.
« J’ai habité en Ontario toute ma vie, majoritairement dans l’Est de la province. On a décidé de déménager à Québec l’année dernière à cause du logement. Les prix et la tendance haussière étaient décourageants pour un jeune couple comme nous qui souhaitait se procurer une maison », raconte Nicolas Daoust, ce courtier immobilier.
Les témoignages se suivent et se ressemblent dans ce sens. Des Franco-Ontariens préfèrent quitter l’Ontario pour d’autres provinces telles que le Québec ou le Nouveau-Brunswick où le coût d’un toit est jugé beaucoup plus accessible.
« J’ai en partie quitté l’Ontario à cause du logement. Je préférais habiter seule et je n’avais pas les moyens de le faire en Ontario où je partageais un loyer avec une amie dans le quartier Vanier », fait savoir l’autrice Sonia-Sophie Courdeau qui habite actuellement à Gatineau, plus abordable.
Impossible d’acquérir un premier bien, même en gagnant bien sa vie
La première cause de cette immigration interprovinciale réside dans la disproportion persistance entre la montée en flèche du prix de l’immobilier et celle, beaucoup moins marquée, des revenus.
En effet, à la fin 2021, le prix moyen d’un logement en Ontario était de 923 000 $ contre 329 000 $ dix ans auparavant, soit un bond de 180 % alors que le revenu moyen, lui, ne s’est bonifié que de 38 % durant la même période.
Il en résulte que « l’acquisition d’une propriété est hors de portée de la plupart des acheteurs d’un premier logement de la province, même ceux qui occupent un emploi bien rémunéré », comme le mentionne le rapport du groupe d’étude ontarien sur le logement abordable publié en février dernier.
L’écart est d’autant plus important qu’« il n’y a pas si longtemps, les Ontariens travailleurs (enseignants, travailleurs de la construction, propriétaires de petites entreprises, etc.) pouvaient s’offrir le logement de leur choix », à en croire le même document.
Toutefois, certains malins voient en cette situation une opportunité en or plutôt qu’un exil foncier forcé. « Vendre dans un marché en super puissance et acheter dans des marchés moins achalandés, c’est ce qu’on a fait. On a récemment vendu notre maison à Aylmer près de London et, avec cet argent, nous avons acheté un terrain où on est en train de construire une maison et nous avons également acheté une autre maison à Saguenay au Québec, et tout ça sans avoir eu recours à l’hypothèque, vive le Québec », s’extase cet autre ancien Franco-Ontarien, Rene Bouchard.
Une véritable hémorragie
« Si les choses ne changent pas, d’ici deux à trois ans maximum, quand on aura notre deuxième enfant, on ne sera plus là, on sera probablement au Québec ou carrément en France. On aime bien vivre dans cette ville et du coup, partir c’est faire le deuil d’une vie qu’on aime bien. C’est un véritable crève-cœur parce que le prix du logement c’est vraiment la seule chose qui nous ferait fuir d’ici, et on n’est pas les seuls dans ce cas », regrette Marion Nguyen de Toronto.
Et d’ajouter : « Le problème c’est que même si vous gagnez bien votre vie, et c’est notre cas mon mari et moi, c’est très difficile d’acheter une maison ou un condo de trois chambres. Même si l’obtention d’un prêt immobilier peut s’avérer facile, l’apport du départ est énorme parce que les prix de ce genre de biens sont exorbitants. Qui a, à la trentaine, 500 000 $ à mettre dans l’apport, à moins d’être un riche héritier? »
Il est donc certain que le coût du logement qui constitue la première dépense des ménages ontariens est en grande partie responsable d’une véritable hémorragie. Résultat des courses, la province perd non seulement des habitants, mais aussi une population spécialisée, celle des francophones qui fait actuellement défaut dans beaucoup de secteurs d’activité.