Chloé Atwood encourage la jeunesse et les femmes francophones à s’affirmer

La Franco-Ontarienne Chloé Atwood.
La Franco-Ontarienne Chloé Atwood. Capture d'écran ONFR+

[LA RENCONTRE D’ONFR+]

CASSELMAN – Lauréate du Prix de la Francophonie au côté de Joël Beddows et Amikley Fontaine, Chloé Atwood, jeune femme de 18 ans originaire de Limoges, se consacre au leadership féminin et à la jeunesse. Son intelligence émotionnelle et son leadership tranquille lui ont permis de s’engager dans des causes qui la touchent tout particulièrement. Une véritable avocate de la jeunesse et de ses besoins.

« Quel est votre rôle de présidente du Sénat au conseil de l’école élémentaire et secondaire L’Académie de la Seigneurie, à Casselman?

Je porte beaucoup d’intérêt à ce rôle qui consiste à rapporter des problématiques importantes au conseil. Généralement, ce sont des sujets qui sont traités lors des rencontres entre sénateurs et sénatrices. Ce sont des consultations, des remarques ou des propositions de changements qui pourraient être appliquées au milieu scolaire. On y soumet aussi des projets. L’an passé, en tant que sénatrice, j’ai réalisé une brochure pour les élèves sur le sujet de la santé mentale. Les points dominants étaient l’anxiété et la dépression.

Existe-t-il d’autres problématiques communes aux 13 écoles du conseil scolaire?

Oui. Par exemple, nous avons eu des questionnements autour du code vestimentaire, car une des écoles est encore soumise au port de l’uniforme, ou sur des sujets plus profonds touchant à la religion. Personnellement, je suis très touchée par la santé mentale. C’est un sujet qui, je pense, a besoin d’être discuté. Il faudrait être plus informé, avoir plus de ressources, être capable de détecter les gens qui ont besoin d’aide. Notre communauté est comme un village et tout le monde se connaît. On le voit quand les gens ne vont pas bien. C’était l’idée derrière la brochure de mon comité!

Quels sont les enjeux qui vous poussent à vouloir améliorer le milieu scolaire?

La santé mentale, plus particulièrement chez les garçons. Je vis dans une communauté où tout le monde se connaît. On se voit au travail, à l’école, on se croise partout : c’est toujours les mêmes gens. Donc on s’habitue au comportement des personnes qui nous entourent. C’est la réalité en communauté rurale. Ayant ce que les gens appellent une intelligence émotionnelle, je remarque quand quelqu’un ne va pas.

En plus, c’est fou, mais encore en 2022, les gens stigmatisent la santé mentale. J’entends des personnes faire des commentaires désobligeants et bien sûr, je le remarque quand ça affecte une personne dans le groupe. Encore aujourd’hui, les hommes sont trop poussés à ne démontrer aucune vulnérabilité et ceci ressort beaucoup en milieu rural pour certaines raisons. C’est donc évidemment que le concept de santé mentale est encore plus sensible pour ce groupe.

Élève de Casselman, Chloé Atwood prône le leadership féminin. Gracieuseté

Que représente l’école à vous yeux?

L’école pour moi, c’est non seulement un endroit où on va pour apprendre, mais aussi un endroit où il faut se sentir bien et à sa place. Étant en 12e, mon but n’est pas d’améliorer le milieu scolaire pour moi-même, mais plutôt pour les autres générations. J’observe mon frère, ma sœur et mes cousins et j’espère sincèrement que l’on réussira à rendre l’école un milieu plus inclusif et plus attentif aux besoins des jeunes dans l’avenir proche.

Comment définiriez-vous le leadership?

Le leadership, pour moi, c’est d’être capable de prendre sa place, de partager ses opinions et d’utiliser sa voix, mais sans prendre trop de place pour ne pas être encombrant pour les autres. C’est d’être un leader, tout en encourageant les autres à faire de même. Étant une leader tranquille, je n’essaie pas de prendre de place en haussant mon ton de voix par exemple, mais plutôt en faisant des actions qui auront un effet ricochet et en encourageant les autres à suivre mes traces et à suivre leur propre chemin via divers conseils. Le leadership c’est donc de collaborer, de communiquer et de s’exprimer tout en respectant ses pairs.

Pouvez-vous nous parler de votre projet Ma Voix, Mon Futur?

Oui, c’est un projet en partenariat avec le Centre Novas et Leadership féminin Prescott-Russell. L’idée était d’amener les jeunes femmes entre 14 ans et 17 ans de Prescott-Russell, de ma communauté, à se poser des questions ensemble, en laissant libre cours à la discussion. C’est un projet en plusieurs étapes dont la troisième phase devrait se dérouler prochainement. En tout cas, ce que ce projet m’a fait réaliser c’est qu’il y a beaucoup de personnes de mon âge avec les mêmes envies et les mêmes défis que moi. Les deux premières consultations que l’on a faites ont vraiment mis en lumière les défis que d’autres jeunes femmes francophones vivent dans la région. Puis, on veut faite une différence dans la société.

Faire une consultation de jeunes femmes âgées de 14 à 17 ans, c’est aussi donner une voix à des jeunes de cette tranche d’âge que peu de gens écoutent. C’est quand même rare quand on nous demande notre avis et qu’on applique réellement ce que l’on demande. Mais ce projet Ma voix, Mon Futur, le but est de mieux comprendre les enjeux qui affectent la confiance et l’estime de soi en tant que jeunes femmes issues d’un milieu rural. Le but c’est de bâtir un leadership.

Chloé Atwood est attachée à la langue française et au valeurs du bénévolat. Gracieuseté

Pourquoi le bénévolat est-il important, selon vous?

On est censé effectuer 40 heures de bénévolat pour valider notre année au secondaire. On a souvent des difficultés dans les régions rurales à avoir des places diversifiées et même à compléter nos 40 heures, dans une petite région comme la nôtre. Il n’y a pas beaucoup de places. On a moins d’options que les jeunes des grandes villes. En même temps, c’est certain qu’en neuvième année, tu ne vas pas te rendre seule dans des places si éloignées. Et faut ajouter à ça le français, et évidemment, là on se retrouve avec moitié moins d’options.

Il faut aussi prendre en compte qu’en tant que jeune, on se fait rejeter, oui, ça arrive. En milieu rural il n’y a vraiment pas beaucoup de choix. Bien sûr, une fois impliqué, c’est clair que c’est plus facile de trouver des entreprises et même d’y prendre goût. Mes activités bénévoles se sont très rapidement transformées en activités très enrichissantes. Dès qu’on dépasse les 40 heures obligatoires, ça devient une envie à ce niveau-là, plus qu’une simple obligation. Mais cela reste difficile, puisqu’il y a très peu d’opportunités.

Promouvoir votre langue française, ça se traduit comment?

Tout se passe en français dans mon quotidien et c’est très important. C’est mon identité et j’ai déjà vu trop de gens abandonner ou perdre leur langue, pour avoir accès à beaucoup plus que ce que nos ressources locales nous apportent. Avec Leadership féminin, on est à l’écoute de la communauté francophone. C’est important de promouvoir le français au travers de ce combat-là. Parce que ça fait partie de notre confiance en soi et de notre estime de soi. Je ne sais pas comment ça se passe dans les Leaderships anglophones, mais pour nous cela fait partie de notre potentiel de leaders.

Malheureusement on s’est trop souvent fait entendre dire : « Mais pourquoi parles-tu français? » alors que tu sais on ne va pas poser cette question à un anglophone, c’est évident. Si on entend ce genre de remarque, c’est parce que nous, les francophones, on parle aussi anglais et certainement qu’ils considèrent que le français ne nous sert à rien. Si on parle français, c’est aussi pour être capable de parler de choses importantes dans notre communauté.

Quels sont les projets auxquels vous allez participer dans les prochains mois?

Avec Leadership féminin Prescott-Russell, il y a un nouveau projet de revue, pour les jeunes femmes. On vise une publication en juin. C’est une très belle façon de partager, et d’encourager les jeunes femmes à avoir confiance en elle, mais aussi à s’investir dans des projets qui comptent à leurs yeux. Promouvoir le leadership féminin c’est ça! Puis, bientôt nous allons participer à notre troisième phase en présentiel de notre consultation pour Ma voix, mon futur, ce sera la première en physique. Et plus personnellement, l’année prochaine j’entre à l’université et je compte étudier en santé. »

La jeune militante compte étudier dans le domaine de la santé. Gracieuseté

 LES DATES-CLÉS DE CHLOÉ ATWOOD :

2004 : Naissance à Ottawa

Mars 2021 : Lancement du projet Ma voix, mon futur

Avril 2021 : Devient présidente du Sénat du CEPEO

Octobre 2021 : Panéliste durant la Conférence Ma voix, l’égalité pour notre avenir

2022 : Récipiendaire du prix de la Francophonie