Décès de Bernard Grandmaître, père de la Loi sur les services en français
Le bâtisseur franco-ontarien et l’une des grandes figures de l’Ontario français Bernard Grandmaître s’est éteint à l’âge de 92 ans.
Né en 1933 à Vanier (anciennement Eastview), il aura été politicien pendant plus de 20 ans. Maire de Vanier en 1974, il fait ensuite le saut quelques années plus tard en politique provinciale en 1984 comme député d’Ottawa-Vanier. Bernard Grandmaître devient ensuite ministre délégué des Affaires francophones sous le gouvernement de David Peterson, et permet l’adoption de la Loi sur les services en français.
C’est grâce à cette loi qu’est rendu possible l’accès à des services gouvernementaux en français dans la province.
« Il faut comprendre que tout le monde n’était pas d’accord avec le projet de la Loi 8. Certains ministres en particulier. Ceux-là avaient 1 % de francophones dans leur comté. Sans l’appui de l’ancien premier ministre, David Peterson, la loi ne serait probablement pas passée », affirmait-il en entrevue à ONFR en 2016.
« Ben [Bernard] était un ministre très compétent et un champion des droits des francophones. Il a été le pilote de notre historique Loi sur les services en français, qui a transformé l’Ontario pour le meilleur » a partagé dans une déclaration à ONFR, l’ancien premier ministre de l’Ontario, David Peterson.
« On se souviendra de lui pour ses contributions, et il nous manquera, car c’était un homme merveilleux », ajoute l’ancien leader libéral ontarien.
Bernard Grandmaître a été député libéral de 1984 à 1999, notamment comme ministre sous le gouvernement Peterson. En plus de s’occuper des dossiers francophones, il sera ministre du Revenu et des Affaires municipales dans ce gouvernement libéral entre 1985 et 1989.
« La francophonie en Ontario a toujours ce même défi que lorsque j’étais à Toronto dans les années 80. Il a toujours fallu combattre et défendre le peu qu’on avait », rappelait-il en entrevue en 2019, quelques mois après le jeudi noir en Ontario français sous le gouvernement Ford.
En 1999, les prix Bernard Grandmaître, qui récompensent des francophones de la région d’Ottawa, ont été créés en son honneur. En 2013, il a reçu l’Ordre du Canada pour saluer son engagement envers la francophonie ontarienne. Il est aussi le récipiendaire de l’Ordre de la Pléiade, en plus d’avoir reçu des doctorats honorifiques de l’Université d’Ottawa et de l’Université Laurentienne. Des bâtiments dans la région d’Ottawa comme une école et un aréna portent aujourd’hui son nom.
Des réactions aux quatre coins de l’Ontario français
« On perd un homme extraordinaire qui a donné beaucoup pour l’avancement de la francophonie en Ontario », raconte Madeleine Meilleur, qui a représenté la même circonscription à Queen’s Park que Bernard Grandmaître.
À l’instar de Bernard Grandmaître, elle siègeait au conseil municipal de Vanier avant de faire le saut en politique provinciale quelques années plus tard.
« J’ai commencé à faire du porte-à-porte en politique avec lui, se remémore Mme Meilleur au téléphone. Il se présentait à ce moment-là à la province de l’Ontario. Je le connaissais de réputation, mais ça a été mes premières rencontres. Puis après ça, on se voyait, il était toujours très présent à toutes les activés dans l’Ontario français. »

« J’ai vu comment il a fait de la politique et c’est ce qui m’a aidée à être une meilleure politicienne parce que je lui demandais des conseils, mais surtout, c’est ce que j’observais de lui que j’ai voulu adopter », affirme-t-elle.
« En ce moment de tristesse, nous saluons la mémoire d’un homme dont la vision et l’engagement ont profondément transformé notre société », a commenté la ministre des Affaires francophones, Caroline Mulroney.
« Il restera à jamais reconnu comme le père de la Loi 8, une législation historique qui a marqué un tournant majeur dans la reconnaissance et la protection des droits linguistiques en Ontario. Son héritage est immense », ajoute la ministre dans un message sur ses réseaux sociaux.
« Bernard Grandmaître n’était pas seulement un homme politique : il était une voix, une présence continue, une force tranquille au service de la francophonie ontarienne », a souligné Mona Fortier, députée fédérale d’Ottawa—Vanier—Gloucester.
« Son départ laisse un grand vide », souligne l’actuelle députée provinciale d’Ottawa-Vanier, Lucille Collard.

« Je me considère privilégiée d’avoir eu la chance de connaître et de côtoyer Bernard Grandmaître. Il a longtemps été mon voisin et, même après son déménagement, nous avons continué à nous croiser lors de rassemblements importants, notamment à la fête des Franco-Ontariens, un événement qu’il ne manquait jamais », rappelle l’élue franco-ontarienne.
« J’ai eu la chance d’échanger avec lui à plusieurs reprises, tant officiellement qu’en ami. Recevoir le prix Bernard Grandmaître fut pour moi un immense honneur, et un rappel de son héritage durable », indique de son côté Mathieu Fleury, ancien élu du quartier de Rideau-Vanier et figure connue dans la région d’Ottawa.
La lieutenante-gouverneure de l’Ontario Edith Dumont a elle aussi rendu hommage à « l’un des piliers de la francophonie ontarienne » : « Ardent défenseur des droits des francophones, Bernard Grandmaître laisse un vide immense dans nos communautés. Son énergie inépuisable, son engagement social et son sens profond de la communauté ont inspiré et ouvert la voie à une nouvelle génération de leaders. Bernard savait rassembler, mobiliser et faire avancer les causes qui lui tenaient à cœur. Je garderai précieusement le souvenir de son sourire chaleureux et de sa détermination à toute épreuve. Merci, Bernard! »
À l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), c’est le legs législatif du père de la Loi 8 que l’on salue.
« C’est clairement grâce à lui si la communauté francophone peut avoir des services en français dans la majorité des bureaux du gouvernement dans les services désignés, a louangé le président de l’AFO, Fabien Hébert. Ça fait partie de son legs à la communauté », indique celui qui qualifie M. Grandmaître de « grand bâtisseur de la communauté franco-ontarienne ».