Des fonds fédéraux pour un recours judiciaire franco-ontarien?

Palais Justice Ottawa
Le Palais de justice d'Ottawa. Crédit image: Archives #ONfr

OTTAWA – Le gouvernement fédéral a annoncé, ce mardi, la composition des comités qui détermineront quelles causes seront éligibles pour obtenir du financement du Programme de contestation judiciaire (PCJ). Une bonne nouvelle pour les Franco-Ontariens qui réfléchissent à un éventuel recours judiciaire, même si plusieurs détails du PCJ restent à régler.

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

Un an et demi après avoir annoncé le rétablissement du Programme de contestation judiciaire, le gouvernement a franchi un nouveau pas. Après avoir annoncé que le nouveau PCJ sera administré par l’Université d’Ottawa, en septembre 2017, la ministre du Tourisme, des Langues officielles et de la Francophonie, Mélanie Joly, a dévoilé la composition des deux comités qui seront chargés de décider les causes qui recevront un appui financier.

Sur le comité responsable des droits linguistiques, on retrouve la professeure de l’Université de Windsor, Emmanuelle Richez, le président de la Commission scolaire Western Québec School Board, James Shea, les avocats, Thomas Maillet, Gilles LeVasseur et André Poulin-Denis, la directrice générale de la Fédération acadienne de la Nouvelle-Écosse, Marie-Claude Rioux et l’avocate générale à la retraite du Commissariat aux langues officielles, Johane Tremblay.

La ministre du Tourisme, des Langues officielles et de la Francophonie, Mélanie Joly. Archives #ONfr

« C’est une étape importante pour la défense des droits des minorités. Nous avons donné au Programme de contestation judiciaire un mandat élargi qui permettra de soutenir des recours en lien avec le fait de pouvoir recevoir des services dans la langue de son choix à travers le pays », a indiqué Mme Joly.

D’ici quelques semaines

Il faudra toutefois attendre les prochaines semaines pour que le programme soit opérationnel, puisque le processus de demande de financement et les critères d’admissibilité doivent encore être déterminés.

« Il a fallu relancer un programme qui avait été aboli, donc ça a pris du temps. Mais l’argent est là. Je m’attends à ce que tout puisse aller rondement avec l’Université d’Ottawa », a assuré la ministre.

Le porte-parole du Parti conservateur du Canada (PCC) en matière de langues officielles, Steven Blaney, déplore ce délai.

« Ça fait 20 mois que les communautés sont privées d’un outil pour amorcer des batailles juridiques essentielles à leur vitalité. Ça a été le choix du gouvernement de vouloir élargir le programme, mais pourquoi pénaliser les communautés que Mme Joly prétend défendre. »

1,5 million pour les droits linguistiques

Le programme de contestation judiciaire fournit une aide financière pour mener des causes linguistiques ou en matière de droits de la personne devant les tribunaux face au gouvernement fédéral, aux provinces ou aux institutions fédérales.

En Ontario, c’est notamment le PCJ qui a permis de financer en partie le recours judiciaire dans la cause de l’hôpital Montfort.

Créé à la fin des années 70, le PCJ avait été supprimé en 2006 sous le gouvernement conservateur de Stephen Harper, puis remplacé par le Programme d’appui aux droits linguistiques (PADL), à la suite d’un recours judiciaire et d’une entente hors cour. Le PADL n’est plus actif depuis le 31 mars 2017.

Sur les 5 millions annuels du nouveau PCJ, 1,5 million sera consacré uniquement aux droits linguistiques, soit la même somme que le précédent PADL. Toutefois, le gouvernement explique que cette enveloppe ne servira qu’à financer des causes devant les tribunaux, et non, comme avec le PADL, l’administration, la promotion des langues officielles ou encore, la résolution des conflits hors cour.

Des causes francophones en attente à travers le pays

Depuis l’annonce du gouvernement ontarien des coupures touchant les francophones, plusieurs acteurs de l’Ontario français ont évoqué la possibilité de se tourner vers les tribunaux. Sans vouloir présumer si cette cause serait éligible, la ministre Joly estime que la communauté franco-ontarienne dispose avec le PCJ « d’un outil de plus pour se défendre ».

L’annonce a été saluée par la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada qui espère que les derniers détails seront réglés rapidement.

« La nomination des comités d’experts tombe vraiment à point nommé. Les francophones de l’Ontario sont en train de s’organiser pour résister et pour faire valoir leurs droits, et c’est sans compter toutes les autres causes qui attendent déjà un peu partout au pays. Il faut qu’ils puissent avoir accès au Programme de contestation judiciaire s’ils en ont besoin. J’ai confiance que les responsables du PCJ mettront les bouchées doubles pour que le Programme soit opérationnel à très court terme », a déclaré, par voie de communiqué, le président de l’organisme, Jean Johnson.

Outre les Franco-Ontariens, la Fédération des francophones de Colombie-Britannique (FFCB) pourrait faire appel au PCJ pour contester la décision récente de la Cour fédérale dans sa cause contre Emploi et Développement social Canada. La commission scolaire de langue française de l’Île-du-Prince-Édouard pourrait elle aussi tenter d’obtenir du financement pour traîner devant les tribunaux sa province à qui elle reproche une mauvaise utilisation des fonds fédéraux pour l’éducation en français.


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