Ford stable, mais toujours impopulaire auprès des Ontariens
TORONTO – Les récents sondages montrent un Doug Ford soutenu par près d’un tiers de la population de l’Ontario et des intentions de vote en baisse. Alors que son taux de popularité avoisinait les 70 % durant le début de la pandémie, ce dernier a perdu près de la moitié de ses appuis au cours des 18 derniers mois.
Depuis près d’un an, le premier ministre de la plus grosse province canadienne est passé de 55 % d’appui à 35 % aujourd’hui selon un sondage de la firme Angus Reid. De son côté, un coup de sonde de la firme Léger le montre avec 38 % d’opinions favorables, mais plus de la moitié des Ontariens, soit 54%, disent le contraire.
« Il a perdu des plumes et ça peut être décevant car, durant la crise de la pandémie, il y a eu durant la première vague un taux de satisfaction assez élevé, mais ça ne se matérialise pas aujourd’hui dans les intentions de vote », résume la politologue de l’Université d’Ottawa Geneviève Tellier.
« Tous les premiers ministres ont connu des baisses », poursuit-elle, « mais la sienne est quand même importante. Il a pris des décisions l’hiver passé qui était moins bonne et il ne s’est pas expliqué et il n’a pas réussi à renverser la situation. Les gens ont donc commencé à se demander si c’était l’homme de la situation pour la suite des choses. Il y a du travail à faire pour M. Ford, ce n’est pas gagné d’avance. »
Un sondage Léger place de son côté les progressistes-conservateurs avec 35 % des intentions de vote, soit 5 % de moins que lors des élections de 2018 mais avec des électeurs indécis.
« À 35 % après la répartition des indécis, il est assez proche du nombre de votes pour former un gouvernement majoritaire avec notre système électoral. Il est probablement à 2 % ou 3 %. Il a un budget ce printemps où il peut aller dans une opération séduction pour aller chercher des votes », analyse pour sa part le politologue à l’Université McMaster, Peter Graefe.
Il reste toutefois beaucoup de chemin à parcourir pour Doug Ford d’ici les élections de juin 2022, croit Mme Tellier.
« Il y a une place à l’amélioration. Il peut compter sur son expérience. Il peut dire « qu’est-ce que vous préférez, un gouvernement qui vous a accompagné durant la COVID-19 et que vous savez qui c’est ou un autre premier ministre dont vous ne connaissez pas du tout les intentions et qui n’a pas fait ses preuves durant la pandémie? ». Ce n’est pas catastrophique la position de M. Ford, mais ça montre qu’il y a des gains à faire, mais on ne voit pas une tendance qui baisse. Ça baissait l’hiver passé. Là, ça s’est stabilisé. »
En embuscade, Del Duca promet une réforme électorale
Dans le sondage Léger, les libéraux de Steven Del Duca pointent à 30 %, tandis que les troupes d’Andrea Horwath sont créditées de 25 %, un score stable par rapport à des chiffres de mai 2021 alors que les libéraux sont en faible hausse de 4 %. Ces nombres très similaires pourraient être un plus pour les progressistes-conservateurs.
« Pour gagner, M. Ford doit faire deux choses, maintenir la division entre les partis de l’opposition, car il a tout intérêt à ce que le NPD reste fort, car la marque libérale est beaucoup plus forte que le NPD en Ontario. S’il y a un effondrement du vote du NPD, ça jouera en faveur de M. Del Duca. Il doit aussi attaquer M. Del Luca, car il y a un vote libéral qui était vraiment tiré par le bas la dernière fois (en 2018), mais qui va rebondir. Il doit faire en sorte que ça ne rebondisse pas trop », décrypte M. Graefe.
Le chef du Parti libéral a avancé des pions au cours du week-end lors de l’assemblée générale annuelle de sa formation politique. S’il est élu, M. Del Duca s’est engagé à réformer le scrutin électoral provincial avec l’adoption du mode préférentiel qui consiste à inscrire les noms de ses candidats par ordre de préférence, le premier atteignant 50% étant élu. Il a annoncé en outre qu’il lancerait un projet pilote de semaine de travail à quatre jours.
Le politologue de Hamilton note par ailleurs que les deux partis de l’opposition parviennent à aller chercher des votes dans leurs bases électorales.
« On voit des différences assez importantes dans les régions où le NPD est fort à Hamilton-Niagara, le Sud-Ouest et même dans le Nord. Le Parti libéral, c’est surtout à Toronto, le 905 et dans l’Est de la province. Il reste aussi à voir comment ça va se jouer. Est-ce que l’on va continuer à avoir des différences régionales pour les deux partis de l’opposition où l’on va être capable d’aller séduire plus largement? »
Le travail d’opposition d’Horwath peu payant dans les sondages
Chez les autres partis, Steven Del Duca des libéraux, est dans les trois principaux chefs, celui avec l’opinion la plus favorable, mais c’est aussi le plus méconnu avec 36 % des Ontariens qui disent ne pas le connaître.
« On ne peut pas faire abstraction au fait que le Parti libéral est un incontournable sur la scène politique ontarienne. Quand on parle des libéraux, les gens savent à quoi ça fait référence même si on ne connaît pas trop le chef ou le programme, on sait qu’on va être entre la gauche et la droite. Il va falloir qu’il soit plus visible et pour bon nombre d’électeurs, c’est la personnalité du chef qui compte, alors les gens vont vouloir savoir à qui ils font affaire », soutient la professeure de l’Université d’Ottawa.
Pour cette dernière, la performance des néo-démocrates avec la baisse de popularité de M. Ford se doit d’être décevante pour les partisans du parti progressiste.
« C’est décevant comme sondage, c’est quand même un parti qui a marqué des points pendant la pandémie et qui a fait reculer le gouvernement notamment sur les congés de maladie payés. Ils ont été actifs et de ne pas être capable d’avoir plus d’appuis que ça est surprenant. Ils auraient dû être devant les libéraux. »
Le sondage Léger a été mené en ligne auprès de 1 003 Ontariens entre le 8 et 10 octobre. La marge d’erreur est de près de 3,1 %.